Cahier des charges de formation : comment bien le construire en 2024 ?

Cahier des charges de formation : comment bien le construire en 2024 ?
Déborah PANIGADA

La formation est un levier de performances et de bien-être au travail incontournable, c’est pourquoi elle doit être soignée dans les moindres détails, y compris les plus administratif. En effet, tout commence par un bon cahier des charges. Découvrez comment faire !

Si vous travaillez dans un service formation, vous avez déjà entendu parler du cahier des charges. Peut-être avez-vous en tête qu’il s’agit d’un exercice fastidieux, mécanique et surtout administratif.

Loin de là ! Le cahier des charges est un outil fondamental dans un projet de formation. Il s’agit d’un support écrit qui vous permet de formaliser les éléments essentiels pour la mise en œuvre d’un dispositif. De plus, la bonne rédaction du cahier des charges garantit une meilleure compréhension du besoin par le ou les prestataires et, par conséquent, des réponses de meilleure qualité.

Dans cet article, je vous explique :

  • À quoi sert le cahier des charges ?
  • Comment choisir la bonne typologie de cahier des charges ?
  • Comment le structurer de manière claire et efficace ?
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À quoi sert (vraiment) un cahier des charges ?

Avec un exemple, c’est toujours plus clair…

Votre entreprise chocolatière a modifié son processus industriel. Sa gamme de tablettes de chocolat a été élargie pour séduire une clientèle à la recherche de sensations gustatives inattendues. Vos lutins chocolatiers doivent être en capacité de travailler le cacao avec du piment, de la guimauve, de la courgette séchée (et oui il en faut pour tous les goûts).

C’est pourquoi, il est important de perfectionner les techniques pâtissières de votre personnel. Il s’agit d’un projet stratégique puisque le commanditaire, et demandeur de cette action, est le P.D.G. himself, Monsieur W.Wonkalme.

La partie est donc lancée : vous avez une demande et un besoin auquel on peut répondre au moyen d’une formation. Mais ce n’est qu’un début ! Au stade actuel, la commande n’existe pas. L’expression du besoin et la demande ne sont que des préalables au processus de définition d’un dispositif.

Le cahier des charges : outil magique qui transforme la demande en commande.

En effet, il existe une différence fondamentale entre la demande et la commande. Le cahier des charges est l’outil qu’il vous faut pour transformer la demande de Monsieur Wonkalme en commande.

Mais pourquoi est-ce important de passer de l’une à l’autre ? Et en quoi demande et commande diffèrent-elles ?

Imaginez, vous constatez que votre frigidaire est vide et qu’il faut faire des courses. Cela n’est que le point de départ de votre démarche de réapprovisionnement. Par la suite, il faut identifier ce qui manque, faire une liste, définir vos contraintes et souhaits, les délais … Pour enfin trouver le bon commerçant qui sera en mesure de vous vendre ce dont vous avez besoin.

Continuons la métaphore domestique pour bien cerner l’intérêt du cahier des charges. Il nous est arrivé à tous d’aller faire des courses alimentaires sans avoir bien identifié ce dont nous avions vraiment besoin. En conséquence, nous nous retrouvons avec un caddie rempli de bonbons, de bières et de cacahuètes … Et la note est salée ! Cerise sur le gâteau, notre frigidaire reste vide. Autrement dit, nous n’avons pas défini suffisamment nos achats qui, de surcroît, ne répondent pas à nos besoins réels.

De la même manière, le cahier des charges permet de rationaliser l’achat de formation pour qu’il réponde réellement au besoin.

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Le cahier des charges : un outil de dialogue

Grâce à cette démarche, nous sommes en mesure d’expliquer clairement au prestataire de quoi nous avons besoin. Grâce à cela, il pourra nous proposer le dispositif le plus adapté.

Ainsi, un bon cahier des charges de la demande annonce, en miroir, un bon cahier des charges de l’offre. En effet, le cahier des charges est un outil de dialogue et de négociation avec le prestataire. Il permet de définir les rôles de chacun dans la réalisation du dispositif, ainsi que les contraintes et les marges d’ajustement possibles.

Nous avons défini l’intérêt du cahier des charges. Voyons-en à présent les différentes typologies.

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De quel cahier des charges avez-vous besoin ?

À ce stade, il faut établir si vous avez besoin d’un cahier des charges :

  • Standard : il s’agit d’un document très court puisque la formation recherchée est bien identifiée. C’est le cas des formations dont le cahier des charges est fixé au niveau national avec un contenu très réglementé (CACES, travail en hauteur …). La structure de ce cahier des charges est simple et la partie relative à l’expression du besoin n’est pas très développée. En revanche, les contraintes et les éléments d’organisation sont bien détaillés, tout comme les références juridiques aux habilitations éventuelles dont le prestataire doit être titulaire. Aussi, vous pouvez opter pour un cahier des charges standard lorsque vous recherchez une simple décentralisation d’une formation existante dans un catalogue, sans modification en termes de contenus.
  • Fonctionnel : vous ne désignez pas une formation bien identifiée, mais le résultat que vous souhaitez obtenir. C’est le cas des formations sur mesure, pour lesquelles vous attendez de votre prestataire de l’ingénierie pédagogique.

Mise en application

Dans le cas de notre fabrique de chocolat, votre cahier des charges sera centré sur le besoin et le contexte. Vous demanderez à vos prestataires éventuels de proposer un dispositif qui permette aux lutins chocolatiers d’acquérir de nouvelles techniques de préparation du chocolat. Vous avez là le résultat à atteindre, c’est-à-dire l’objectif général.

Plus vous détaillerez votre contexte de production, vos outils de travail, les compétences des lutins, le projet de développement des nouvelles tablettes de chocolat … plus la proposition des prestataires sera adaptée.

Par ailleurs, la compréhension du contexte d’intervention et la spécificité de la réponse formative font partie des principaux critères d’évaluation d’une offre dans le cas d’un cahier des charges fonctionnel. En définitive, dans un cahier des charges fonctionnel vous développez au maximum la partie relative au contexte et à l’analyse du besoin et vous laissez au prestataire le soin de définir une solution pédagogique.

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Cahier des charges standard ou fonctionnel : un choix stratégique

Lorsque vous définissez une typologie de cahier des charges, standard ou fonctionnel :

  • Vous déterminez aisément la structure de votre document final.
  • Vous orientez l’offre des prestataires, en leur donnant une clé de compréhension de vos attentes.
  • Vous identifiez votre critère de choix principal (dans les cas où il y a une mise en concurrence) : plutôt le prix pour un cahier des charges standard, la valeur technique pour un cahier des charges fonctionnel.
  • Vous définissez implicitement les rôles des uns et des autres dans la définition du dispositif, et notamment du contenu et des méthodes pédagogiques. Cela est ‘imposé’ par l’acheteur dans un cahier des charges standard, et défini par le prestataire dans un cahier des charges fonctionnel.

Le grand malentendu du cahier des charges fonctionnel

Cette démarche vous permet également de vérifier la cohérence entre le type de cahier des charges et le besoin exprimé.

Par exemple, un cahier des charges fonctionnel dans lequel apparaît un programme de formation n’est pas cohérent ! N’oubliez pas que le prestataire vous vend ce que vous demandez. Si vous définissez un programme précis, sa réponse technique sera calée sur ce programme et ne pourra vous apporter aucune plus-value.

J’insiste sur ce point, car j’ai souvent constaté ce malentendu auprès de mes clients. L’acheteur de formation croit parfois que c’est à lui de décrire les préconisations pédagogiques.

Or dans le cas d’une mise en concurrence par exemple, cette approche génère des ‘réponses clones’. Impossible alors de départager les propositions reçues ! C’est-à-dire que tous les candidats se caleront sur le contenu que vous avez indiqué dans le cahier des charges.

Si vous voulez des réponses originales, sur mesure, reflet de l’expertise de vos candidats, ne définissez pas les éléments pédagogiques. Concentrez-vous plutôt sur votre domaine d’expertise à vous : l’analyse du besoin et du contexte !

Ainsi, lorsque vous rédigerez le cahier des charges fonctionnel du dispositif de formation “perfectionnement des techniques pâtissières …”, votre prestataire n’a pas besoin que vous lui indiquiez le contenu d’un programme-type sur le travail du chocolat à la courgette. Il connaît cela, c’est son métier ! En revanche, il ne connaît pas les habitudes des lutins (leurs horaires de travail, difficultés sur le terrain, contraintes de planning, une expertise particulière qui caractérise leur métier …), ni l’enjeu de ce projet.

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Quand faut-il faire un cahier des charges ?

Jusqu’ici j’ai abordé le cas des projets où il est question de mise en concurrence, avec un prestataire extérieur.

Mais qu’en est-il des dispositifs de formation internes ou sans volet financier ?

Et bien, il est conseillé de rédiger un cahier des charges pour tout projet de formation, quel que soit le partenariat envisagé.

Par exemple, si la formation est réalisée par un formateur interne, le cahier des charges lui permettra de :

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  • Aligner son déroulé pédagogique sur le positionnement du commanditaire.
  • Structurer sa réponse.
  • Mieux comprendre le contexte global de son intervention.
  • Connaître précisément l’organisation de l’action et les contraintes éventuelles.

Quels sont les éléments importants à décrire dans un cahier des charges ?

Le tableau ci-dessous peut vous aider à structurer votre cahier des charges. Il conviendra bien entendu de l’adapter en fonction de la typologie et de l’ampleur du projet concerné par votre commande de formation.

De plus, si vous envisagez d’acheter une formation digitale, le cahier des charges sera un peu différent.

PREMIÈRE PARTIE : contexte et analyse stratégique.Description du contexte d’émergence de la formation.
Description ciblée de votre structure (éléments en rapport avec le projet de formation). Problématiques éventuelles et amélioration souhaitée (objectif stratégique). Description du public (effectifs, qualifications, niveau de formation, expérience, rapport à la formation…). Recueil du besoin éventuellement réalisé.
DEUXIÈME PARTIE : éléments pédagogiques.Objectif de formation : compétences à acquérir. Un référentiel de compétences peut vous aider à exprimer clairement les objectifs de formation. Préconisations pédagogiques particulières (à limiter). Processus pédagogique envisagé (inscription, test de positionnement éventuel, évaluation …)
Modalités pédagogiques : formation présentielle, distancielle, co-modale, hybride … Vous pouvez définir ces modalités ou laisser carte blanche à votre prestataire.
TROISIÈME PARTIE : éléments logistiques.Organisation logistique, contraintes de planning, aspects pratiques, matériel mis à la disposition du prestataire, interlocuteurs dans l’entreprise.
QUATRIÈME PARTIE : éléments financiers(En cas de sélection de prestataires par mise en concurrence).
CINQUIÈME PARTIE : dossier administratif et candidature (profils souhaités, habilitations requises …). Sur quels critères allez-vous départager les propositions (si mise en concurrence).
SIXIÈME partie : récapitulatif des prestations et livrables attendus.N’oubliez pas d’indiquer également si des réunions de cadrage sont prévues.

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Comment bien rédiger un cahier des charges ?

Règle numéro 1. Le cahier des charges est spécifique. Résistez à la tentation du copier-coller ! Elle bride la réflexion et n’est jamais synonyme de qualité en formation.

Règle numéro 2. Ne partez jamais de l’offre, mais toujours de la demande.

Autrement dit, n’allez pas chercher des programmes de formation pour rédiger votre cahier des charges. Sinon, vous serez comme celui qui va faire ses courses sans liste et le ventre vide. Faites du benchmarking de manière régulière, mais toujours en dehors des périodes de commande.

Les règles de fond

Un bon cahier des charges comporte quatre qualités essentielles. Nous en avons déjà vu certaines, mais je vous les résume ici pour que vous ayez une sorte de check-list à appliquer à vos cahiers des charges.

  1. La précision et l’économie de l’information. Il faut transmettre des éléments de contexte le plus précisément possible et les sélectionner pour leur pertinence (ne pas détailler des informations qui ne visent pas la construction de l’action de formation). Nul besoin de présenter votre structure en copiant le texte institutionnel qui se trouve sur le site Internet. Vous vous en doutez, les candidats iront par eux-mêmes consulter votre site pour comprendre votre activité. Dites à vos candidats ce qu’ils ne savent pas et limitez-vous au projet.
  2. Le principe de réalité : la pédagogie, et plus généralement l’ingénierie de formation, ne sont pas des pratiques de l’idéal. Il faut tenir compte du principe de réalité. Concevoir un projet de formation, c’est travailler à partir des contraintes matérielles du réel (volume horaire, salles, délais, difficultés des publics …). Ne cachez jamais à un prestataire vos contraintes.
  3. La connaissance du rôle de chacun : le cahier des charges est destiné au prestataire. Il vise à exprimer les attentes de l’acheteur dans le cadre d’un projet de formation. Le prestataire doit élaborer une réponse à ces attentes. Il répond donc à la question suivante : « compte tenu de ce contexte et de ces problématiques spécifiques, quelle solution pédagogique envisager pour insuffler le changement souhaité ? » Cela implique une capacité d’ouverture aux solutions proposées par le prestataire. Le client se doit d’être précis dans la description du besoin et de ses attentes. C’est au prestataire de travailler la solution pédagogique.
  4. Une démarche co-construite : un cahier des charges de la demande se rédige à plusieurs (fonction formation, managers, SSI, public cible …). Ainsi, vous ferez de cet outil votre meilleur allié dans la construction d’une culture formation de votre structure. Co-construire un cahier des charges est également un excellent moyen pour encourager l’engagement en formation des différentes parties.

Les règles de forme

Les règles suivantes découlent d’une règle principale : le cahier des charges doit être lisible.

Pour cela :

  1. Créez des rubriques distinctes pour chaque partie. Un index ne fait pas de mal non plus.
  2. Distinguer les éléments de contexte, pédagogiques, logistiques.
  3. Faites apparaître clairement les différents niveaux d’objectifs rattachés au dispositif. Cela revient à donner une destination au prestataire, pour qu’il puisse vous proposer un itinéraire. Pour cela, un schéma est plus efficace qu’un long texte.
  4. Limitez le nombre de pages. Difficile de donner une indication qui soit applicable à toute sorte de projet. Dans tous les cas, je vous conseille de ne pas dépasser les huit pages.

Pour aller plus loin

En synthèse, le cahier des charges n’est pas votre prison, mais votre espace de liberté ! Il fait partie de ces outils essentiels qui vous aideront à construire des formations efficaces et qualitatives.

Vous pouvez ainsi accorder une place de choix à ce qui est important pour votre organisation et le partager avec votre prestataire. En ce sens, le cahier des charges aide à prévenir les litiges éventuels.

Si vous avez envie d’en savoir plus, je vous conseille deux ressources indispensables :

  1. Le livre de Marc Dennery, “Piloter un projet de formation : de l’analyse de la demande au cahier des charges” (ESF Éditeur, 2008).
  2. La norme AFNOR X50-769 “Formation professionnelle – Processus de réalisation d’une action de formation – Recommandations/Bonnes pratiques opérationnelles”

Bonne découverte !

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Déborah PANIGADA

Deborah est tombée très tôt dans le bain de la formation professionnelle. Elle a ainsi pu faire l’expérience de la diversité des métiers de ce domaine. Depuis plusieurs années, elle est consultante indépendante en ingénierie de formation. A ce titre, elle accompagne les organisations dans le développement de leurs compétences en proposant des solutions innovantes et sur mesure. La créativité, la gamification, le digital, les pédagogies actives, les neurosciences sont ses outils de prédilection.