Dans un contexte où le rapport au travail se transforme profondément, les salariés aspirent à davantage d’autonomie et de sens dans leur activité professionnelle. Selon un sondage OpinionWay pour l’Anact en 2022, 4 actifs sur 10 envisagent de quitter leur emploi actuel au cours des 2 prochaines années pour un travail qui aurait plus de sens.
Et quoi de mieux pour donner du sens que de transformer les salariés en véritables artisans de leur bien-être au travail ? C’est ce que promet le job crafting, qui peut être traduit comme “l’art de façonner son job à la main”.
Le job crafting, c’est cette démarche qui permet aux collaborateurs de façonner leur poste pour mieux l’aligner sur leurs aspirations et leurs compétences. Cette pratique innovante, qui bouleverse la vision traditionnelle du travail prescrit par le haut, connaît aujourd’hui un véritable essor dans les entreprises.
Mais quels sont les fondements de cette approche ? Et quels sont les bénéfices pour les organisations comme pour les salariés ? Tour d’horizon.
Les fondements du job crafting
L’émergence du concept de job crafting remonte à 2001, avec les recherches pionnières d’Amy Wrzesniewski et Jane Dutton. Leurs travaux ont mis en lumière une réalité jusqu’alors peu étudiée : les collaborateurs les plus épanouis sont ceux qui adaptent leur travail de manière proactive, sans attendre une redéfinition formelle de leur fonction de la part de leur manager ou de leur hiérarchie.
Cette approche se structure autour de trois dimensions clés :
- Le task crafting.
- Le relational crafting.
- Le cognitive crafting.
La première dimension – le task crafting – consiste à modifier le périmètre ou l’organisation des tâches, par exemple en proposant de nouvelles méthodologies ou en priorisant différemment ses activités.
Quant au relational crafting, il touche aux interactions professionnelles : il peut s’agir de développer certaines collaborations, de limiter d’autres échanges moins porteurs de valeur, ou d’initier de nouveaux réseaux au sein de l’entreprise.
Enfin, le cognitive crafting, permet de redéfinir sa perception du poste pour lui donner plus de sens. Il s’agit alors de travailler sa représentation du métier et de la fonction occupée.
On le voit, le job crafting est un phénomène multidimensionnel. Il nécessite d’agir non seulement sur le périmètre du poste, mais aussi sur la représentation donnée à son travail et sur ses relations professionnelles. Mais quels sont les bénéfices de cette démarche, au juste ?
KPIs RH 2025 : le guide complet
Saviez-vous que 40 % des profils RH ne sont pas à l’aise avec l’utilisation des KPIs dans la gestion des RH ? Pour vous accompagner, Culture RH a mis à jour son livre blanc sur les indicateurs RH incontournables à suivre en 2025.
Je télécharge le livre blancQuels sont les bénéfices du job crafting ?
Le job crafting génère des bénéfices concrets, tant pour les collaborateurs que pour les organisations. Pour les employés, l’impact est mesurable sur plusieurs dimensions. L’étude de la MIT Sloan School of Management (2020) révèle une réduction significative du stress au travail, avec une diminution de 29% chez 92% des participants.
Cette pratique renforce également la satisfaction professionnelle, comme le démontre une étude franco-québécoise menée dans le secteur infirmier auprès des personnels soignants.
Les entreprises constatent aussi des résultats probants. L’expérience menée chez Google est éloquente : après seulement six semaines de pratique, les managers ont noté une amélioration de la performance de leurs équipes.
Enfin, le job crafting favorise également la rétention des talents. Les collaborateurs qui peuvent façonner leur poste développent un attachement plus fort à l’entreprise et s’inscrivent dans une dynamique d’évolution ou de mobilité interne plutôt que de recherche de nouvelles opportunités à l’externe.
En matière d’innovation, le job crafting agit comme un accélérateur. En permettant aux collaborateurs d’expérimenter de nouvelles approches dans leur travail quotidien, les organisations bénéficient en retour d’améliorations de leurs processus.
Cette culture de l’innovation et du management participatif renforce aussi leur marque employeur : les entreprises qui encouragent le job crafting sont perçues comme plus attractives par les candidats, notamment les jeunes talents en quête d’autonomie et de sens.
En effet, n’oublions pas que – selon une étude menée par la fondation jean Jaurès – 40% des jeunes estiment qu’un des rôles principaux des entreprises est de donner les moyens à ses salariés de s’épanouir professionnellement !
A lire également :
- Feedback et performance : Le role central des RH
- Mobilité interne : comment repérer les transférabilités de compétences ?
- Parcours Professionnel : Comment accompagner vos salariés ?
Le job crafting au coeur des enjeux RH actuels
Le job crafting s’inscrit pleinement dans les enjeux RH actuels, en particulier la Qualité de Vie et des Conditions de Travail (QVCT). En permettant aux collaborateurs d’adapter leur environnement professionnel, cette pratique répond directement aux exigences légales de la loi Santé au Travail de 2021.
Elle contribue notamment à la prévention des risques psychosociaux en donnant aux salariés plus de contrôle sur leur activité. Or, on le sait, le sentiment d’empowerment – ou pouvoir d’agir- est particulièrement décisif en matière de QVCT.
L’impact sur la marque employeur est aussi significatif. Les entreprises qui encouragent le job crafting se démarquent dans leur stratégie d’attraction des talents. Cette approche résonne particulièrement auprès des nouvelles générations, qui placent l’autonomie et le sens au travail parmi leurs critères prioritaires de choix d’employeur. Dans un contexte de guerre des talents, c’est un avantage compétitif non négligeable.
Le job crafting s’adapte aussi particulièrement bien aux nouvelles formes de travail. Dans un contexte d’hybridation croissante (télétravail, flex office, travail asynchrone), il permet aux collaborateurs d’optimiser leur organisation.
Les salariés peuvent ainsi adapter leurs horaires, leur lieu de travail ou leurs modes de collaboration, tout en respectant le cadre défini par l’entreprise. Cette flexibilité contribue à une meilleure articulation entre vie professionnelle et personnelle, un autre enjeu majeur de nos jours.
Mais quel est le rôle de l’entreprise, au juste ?
Les initatives de job crafting émanent de la bonne volonté des salariés, mais pas seulement. Pour permettre l’émergence du job crafting, l’entreprise doit repenser son organisation et sa culture managériale. Les managers jouent un rôle central : ils doivent passer d’une posture de contrôle à une posture d’accompagnement.
La mise en place d’un environnement favorable requiert des actions concrètes. Parmi les bonnes pratiques à adopter, on pourra penser par exemple à :
- Intégrer la question du job crafting aux entretiens annuels.
- Créer des espaces d’échange dédiés aux nouvelles initiatives.
- Définir un cadre clair d’expérimentation.
Les entreprises les plus avancées mettent également en place des communautés de pratiques où les collaborateurs partagent leurs expériences de job crafting.
Enfin, pour mesurer les bénéfices concrets du job-crafting, encore faut-il pouvoir suivre les KPI’s et indicateurs clés. Au niveau quantitatif, les entreprises suivent généralement le taux d’engagement (via des enquêtes pulse), l’évolution du turnover et le nombre d’initiatives mises en œuvre.
Au niveau qualitatif, elles analysent surtout la satisfaction des collaborateurs et des managers à travers des entretiens réguliers. Ces données permettent d’identifier les meilleures pratiques en matière de job crafting et d’ajuster le dispositif en continu.
En conclusion
Le job crafting s’impose comme une pratique de plus en plus répandue pour répondre aux nouveaux enjeux du monde du travail. Les études scientifiques démontrent ses bénéfices réels : réduction du stress, amélioration de la performance, renforcement de l’engagement. Pour les entreprises, c’est surtout un levier puissant de transformation qui concilie performance et bien-être au travail.
Les perspectives d’évolution sont prometteuses. Dans un contexte de mutation profonde du travail (que ce soit au travers du développement du travail hybride ou de l’essor de la quête de sens), le job crafting devrait continuer à se développer. Les entreprises les plus performantes l’intègrent déjà à leur stratégie RH, conscientes de son impact sur l’attraction et la rétention des talents.
En bref, le succès du job crafting repose sur un équilibre subtil : donner aux collaborateurs la liberté d’innover tout en maintenant un cadre clair. Les organisations qui réussiront à créer cet environnement favorable et à tenir cet équilibre délicat seront mieux armées pour répondre aux attentes des nouvelles générations et aux défis qui les attendent aujourd’hui et demain.
A lire également :
- L’intrapreneuriat est-il une bonne option pour fidéliser les talents ?
- Digitalisation RH et transformation digitale : conséquences ? inconvénients ?
- La marque employeur doit-elle vraiment être gérée par les RH ?