Travail de nuit : quelles règles en 2024 ? Quelle majoration ?

Travail de nuit : quelles règles en 2024 ? Quelle majoration ?
Laurence Ruaux

Juriste droit social, consultante et rédactrice juridique et RH

Vous souhaitez en savoir plus sur les règles qui régissent le travail de nuit: majoration de salaire, horaires, pénibilité, code du travail… etc. Vous allez tout savoir !

L’article L 3122-2 du Code du travail définit le travail de nuit comme celui « effectué au cours d’une période d’au moins neuf heures consécutives comprenant l’intervalle entre minuit et 5 heures. La période de travail de nuit commence à 21 heures et s’achève au plus tard à 7 heures. » 

Ces horaires de travail atypiques concernent de nombreux secteurs professionnels (armée, police, personnels médicaux, radio….)  et doivent être mis en place par accord collectif de branche ou d’entreprise . 

Le recours au travail de nuit doit être exceptionnel. Pour être valide, il doit être justifié par la nécessité, pour l’entreprise, de maintenir la continuité de l’activité économique ou des services d’utilité sociale ; il doit prendre en compte des impératifs de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs et requiert, à cette fin, la consultation du médecin du travail avant sa mise en oeuvre.

Une fois le travail de nuit mis en place dans l’entreprise, qui sont les salariés concernés ? Peut-on obliger un salarié à travailler la nuit ? De quelle majoration peut-il bénéficier ? Quid de son repos ?

Quelles sont les règles qui entourent le travail de nuit ? Comment sont protégés les travailleurs de nuit ? 

Le statut de travailleur de nuit

Qui sont les travailleurs de nuit ?

Tout salarié peut être concerné par le travail de nuit, quels que soit son poste au sein de l’entreprise et sa rémunération.

Depuis la loi n°2001-397 du 9 mai 2001, le travail de nuit est autorisé pour les femmes dans les secteurs qui l’interdisaient encore tel que l’industrie et les professions libérales.

Cependant, le travail de nuit des jeunes de moins de 18 ans est interdit sauf si une dérogation a été accordée par l’inspecteur du travail (secteur de la boulangerie par exemple).

En revanche, la loi ne prévoit pas d’âge maximum de travail de nuit.

Conformément à l’article L3122-31 du Code du travail, et à défaut d’accord collectif dans l’entreprise prévoyant d’autres dispositions, un salarié est considéré comme travailleur de nuit à condition qu’il remplisse l’une des 2 conditions suivantes :

  • Effectuer, de manière habituelle, au moins 3 heures consécutives durant la période de nuit applicable dans l’entreprise , au moins 2 fois par semaine, 
  • Ou 270 heures de travail de nuit durant 12 mois consécutifs.

Il ne suffit donc pas qu’un salarié soit exceptionnellement ou ponctuellement appelé à travailler tard, ou en urgence, pendant la nuit, pour être considéré comme travailleur de nuit. Si c’est le cas, le salarié sera rémunéré en heures supplémentaires majorées, mais n’aura pas le statut de salarié en travail de nuit.

En revanche un salarié en 3X8 effectuant des horaires de nuit bénéficiera des dispositions liées au statut des travailleurs de nuit. 

Exemple : un salarié travaille du lundi au mercredi de 22 heures à 5 heures. Le vendredi et samedi, il travaille de 9 heures à 17 heures.

Il travaille 3 fois par semaine durant les horaires de nuit (21 heures à 7 heures) de manière habituelle. Il est donc réputé travailleur de nuit et pourra se prévaloir du régime juridique applicable pour ces salariés.

À défaut, il ne s’agira pas de travail de nuit.

Le passage d’un travail de jour à un travail de nuit et inversement 

Peut-on obliger un salarié à passer d’un travail de jour à un travail de nuit ?

Non, Il n’est pas possible d’obliger un salarié à travailler de nuit. 

En effet, le passage à un horaire de nuit constitue une modification essentielle du contrat de travail et, à ce titre, il nécessite l’accord du salarié, même si le contrat de travail contient une clause prévoyant que le salarié s’engage pour travailler de nuit ou de jour. 

La proposition de l’employeur doit être adressée au salarié par lettre recommandée avec avis de réception. Le salarié dispose d’un délai d’un mois pour faire connaître sa réponse.

Le salarié peut être amené à refuser le travail de nuit dans certaines situations motivées par des obligations familiales impérieuses à savoir :

  • Des raisons de garde d’enfant
  • Si le salarié est en charge d’une personne dépendante 

Dans l’une ou l’autre de ces situations, le refus par le salarié de travailler de nuit ne peut en aucun cas constituer une faute.

Face au refus du salarié, l’employeur peut annuler la proposition de modification du contrat de travail ou entamer une procédure de licenciement.

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Comment passer d’un travail de nuit à un travail de jour ?

Les travailleurs de nuit qui souhaitent reprendre un poste de jour dans l’entreprise sont prioritaires pour l’attribution d’un emploi équivalent. 

L’employeur doit alors leur communiquer la liste des emplois disponibles.

Ainsi, sous réserve d’un poste disponible, un travailleur de nuit peut bénéficier d’une affectation à un poste de jour correspondant à sa qualification dans les cas suivants :

  • Des obligations familiales impérieuses incompatibles avec le travail de nuit (garde d’un enfant, prise en charge d’une personne dépendante..).
  • Un état de santé, constaté par le médecin du travail incompatible avec le travail de nuit.

À noter : l’employeur ne peut pas prononcer la rupture du contrat de travail du travailleur de nuit du fait de son inaptitude médicale au poste, sauf en cas :

  • D’impossibilité, justifiée par écrit, de proposer au salarié un poste de jour correspondant à sa qualification.
  • De refus du salarié à une proposition d’un emploi de jour correspondant à ses qualifications et rémunération.

De même, la salariée enceinte , pendant sa grossesse et jusqu’à la fin du congé post-natal, peut, à sa demande ou si le médecin du travail le recommande, bénéficier d’un reclassement sur un poste « de jour ».

Enfin, si, pour convenance personnelle, un salarié souhaite occuper ou reprendre un poste de jour, il bénéficie d’une priorité pour se voir attribuer un emploi ressortissant de sa catégorie professionnelle ou un expérience pertinente.

Majoration des heures de nuit

Les travailleurs de nuit bénéficient de contreparties spécifiques, notamment en termes de repos compensateur et de rémunération. Pour chaque semaine où ils travaillent entre 21 heures et 6 heures, ils ont droit à un repos compensateur de 20 minutes par rapport à l’horaire collectif de référence des salariés travaillant de jour.

Ce repos est majoré de 20 % pour les travailleurs de nuit âgés de 57 ans et plus. Ce repos peut être attribué sur une période de 12 mois sous forme d’un repos forfaitaire équivalent à 2 postes de travail (8 heures par poste). La date de ce repos est fixée conjointement par le salarié et l’employeur, avec un préavis d’au moins 15 jours.

Pour les travailleurs de nuit occupant un poste de nuit de façon continue, le repos compensateur est de 30 minutes par semaine travaillée entre 21 heures et 6 heures, également majoré de 20 % pour ceux âgés de 57 ans et plus.

Ce repos peut aussi être attribué sur une période de 12 mois sous forme d’un repos forfaitaire équivalent à 3 postes de travail. Le salarié fixe une date de repos, tandis que l’employeur en fixe deux, avec un préavis d’au moins 15 jours.

En termes de rémunération, chaque poste de nuit ouvre droit à une majoration de 15 % du salaire effectif pour les heures travaillées entre 21 heures et 6 heures. De plus, les travailleurs de nuit suivant une formation réglementaire bénéficient du maintien de leur rémunération majorée.

Exemple concret

Jean est un travailleur de nuit de 58 ans dans une entreprise de production. Chaque semaine, il travaille de 22 heures à 6 heures du matin, soit un total de 40 heures de travail nocturne par semaine.

Repos compensateur

  • Jean bénéficie d’un repos compensateur de 20 minutes pour chaque semaine où il travaille entre 21 heures et 6 heures.
  • Étant âgé de plus de 57 ans, ce repos est majoré de 20 %, ce qui porte la durée totale de son repos compensateur à 24 minutes par semaine.
  • Ce repos peut être attribué sous forme d’un repos forfaitaire équivalent à 2 postes de travail de 8 heures chacun sur une période de 12 mois. Ainsi, Jean pourrait bénéficier de deux jours de repos supplémentaires dans l’année.
  • Jean et son employeur doivent convenir des dates de ces jours de repos avec un préavis d’au moins 15 jours.

Contreparties sous forme de rémunération

  • Pour chaque poste de nuit de 8 heures (22h à 6h), Jean reçoit une majoration de 15 % de son salaire effectif pour les heures travaillées entre 21 heures et 6 heures.
  • Si le salaire horaire de Jean est de 15 €, pour une nuit de travail de 8 heures, il recevra une majoration de 1,80 € par heure (15 € x 15 %), soit un supplément de 14,40 € pour chaque nuit travaillée.
  • En suivant une formation réglementaire, Jean conserve cette majoration de 15 % sur sa rémunération pendant la période de formation.

Grâce à ces contreparties, Jean bénéficie à la fois de temps de repos supplémentaire et d’une rémunération majorée pour compenser les inconvénients liés au travail de nuit.

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Quelles sont les règles qui encadrent le travail de nuit ?

Le travail de nuit est régi par les articles L. 3121-1 à L. 3123-38 du Code du travail.

La mise en place du travail de nuit en entreprise est subordonnée à la conclusion préalable d’un accord d’entreprise ou d’établissement, ou une convention ou un accord collectif de branche, qui doit obligatoirement prévoir :

  • Les justifications du recours au travail de nuit.
  • Une définition de la période de travail de nuit.
  • Les contreparties pour les salariés appelés à travailler la nuit.
  • Les mesures destinées à améliorer les conditions de travail des salariés.
  • Les temps de pause.

À titre exceptionnel, un employeur qui souhaiterait recourir au travail de nuit sans accord collectif, doit obtenir l’autorisation de l’inspection du travail.

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Travail de nuit après 50 ans

En France, le travail de nuit après 50 ans est soumis à des régulations spécifiques et à des considérations particulières, notamment en matière de santé et de conditions de travail.

Le Code du travail définit le travail de nuit comme toute période de travail de neuf heures consécutives, incluant l’intervalle entre minuit et cinq heures du matin, généralement de 21 heures à 6 heures du matin.

Les travailleurs de nuit bénéficient de protections spécifiques, et les entreprises doivent justifier la nécessité du travail de nuit, démontrant qu’il est indispensable à leur fonctionnement.

De plus, une surveillance médicale renforcée est obligatoire, avec un examen médical réalisé avant l’affectation au travail de nuit et régulièrement par la suite, au moins tous les six mois.

Les risques de santé

Le travail de nuit est associé à divers problèmes de santé, notamment des troubles du sommeil, des maladies cardiovasculaires, des troubles métaboliques comme le diabète et des troubles psychologiques.

Ces risques augmentent avec l’âge, car la capacité de l’organisme à s’adapter aux changements de rythme circadien diminue à partir de 50 ans, rendant le travail de nuit plus difficile et plus pénible.

Les entreprises peuvent être amenées à adapter les horaires de travail de nuit pour les travailleurs plus âgés afin de limiter les effets négatifs sur leur santé. Cela peut inclure des pauses plus fréquentes, une réduction des heures de travail de nuit ou la mise en place de rotations plus longues pour permettre une meilleure récupération.

La sensibilisation

Il est également crucial de sensibiliser les travailleurs et les employeurs aux risques liés au travail de nuit et de former les salariés aux bonnes pratiques pour minimiser les effets négatifs sur la santé.

Certaines entreprises ou secteurs peuvent avoir des accords collectifs spécifiques concernant le travail de nuit des travailleurs de plus de 50 ans, incluant des dispositions particulières pour protéger leur santé et assurer de meilleures conditions de travail.

Durée du travail de nuit 

En l’absence d’accord d’entreprise, la durée de travail de nuit ne peut pas dépasser 8 heures quotidiennes de suite, ni 40 heures par semaine en moyenne sur 12 semaines d’affilée.

Des dépassements sont admis, uniquement, par accord d’entreprise ou d’établissement, ou par la loi, sous certaines conditions ou dans certains secteurs d’activité, ou par l’inspection du travail, en cas de circonstances exceptionnelles.

Dans ce cas, l’employeur doit consulter les délégués syndicaux et demander l’avis du comité social et économique (CSE).

En l’absence d’institutions représentatives du personnel, l’employeur transmettra un document attestant de l’information préalable des salariés.

La demande, accompagnée des justificatifs nécessaires, est transmise par l’employeur à l’inspecteur du travail.

L’accord collectif définit la durée maximale quotidienne et la durée maximale hebdomadaire du travail de nuit jusqu’ à 44 heures sur 12 semaines si l’activité du secteur le justifie.

Les protections particulières des travailleurs de nuit

Outre les dispositions particulières prévues, le cas échéant, par l’accord collectif, en tant que travailleur de nuit, le salarié a droit à :

Le bénéfice du compte professionnel de prévention 

Le travail de nuit étant un facteur de pénibilité, à ce titre, le travailleur de nuit peut accumuler des points sur un compte professionnel de prévention.

Ces points peuvent être utilisés partiellement ou en totalité, pour accéder à une formation, bénéficier d’un temps partiel sans diminution de salaire ou partir plus tôt en retraite anticipée. 

Une surveillance médicale renforcée 

Les travailleurs de nuit bénéficient d’une surveillance médicale renforcée qui a pour objet  de permettre au médecin du travail d’évaluer les conséquences éventuelles du travail de nuit sur leur santé et leur sécurité et les répercussions sur leur vie sociale. 

Un salarié ne peut pas être affecté à un travail de nuit s’il n’a pas été examiné au préalable par le médecin du travail qui attestera que son état de santé est compatible avec le travail de nuit. Cet examen médical sera renouvelé tous les six mois.

Les contreparties du travail de nuit

Le repos compensateur

Le repos compensateur est la contrepartie obligatoire du travail de nuit, d’une durée minimale de 11 heures, et doit intervenir immédiatement à la suite de la période de travail de nuit. 

Si le travailleur de nuit effectue plus de 270 heures au cours de 12 mois consécutifs, il bénéficie de repos compensateur sous forme de journées. 

Une compensation financière ne peut pas se substituer à un jour de repos non posé. 

La rémunération : quelle majoration ?

D’un point de vue légal, la loi ne prévoit aucune rémunération particulière pour les travailleurs de nuit. 

L’employeur n’est donc pas obligé de majorer les heures de nuit. 

Cependant, à l’exception de certains secteurs d’activité comme l’hôtellerie ou la restauration par exemple, les conventions collectives ou accords collectifs prévoient une compensation salariale pour les salariés effectuant un travail de nuit. 

Pour les heures de travail, entre 21H et 22H ou entre 5H et 6H du matin, la majoration  de paiement est de 10%. 

Pour celles habituellement effectuées entre 22H et 5H du matin, le salaire de nuit est majoré de 30%. 

Enfin, pour celles effectuées occasionnellement ou exceptionnellement, la majoration des heures de nuit atteint 60%. 

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Laurence Ruaux

Avocate de formation, je suis consultante juridique auprès de TPE/PME de tous secteurs, et en particulier les entreprises du secteur de la restauration. Parallèlement, formée au coaching professionnel, j’accompagne les acteurs des professions juridiques et RH dans leur gestion de carrière et leurs transitions professionnelles.