À l’heure où la mention des rémunérations sur les fiches de postes va devenir obligatoire dans les entreprises de plus de 100 salariés, l’égalité salariale devient un sujet de plus en plus prégnant. Selon une étude INSEE menée dans le seul secteur privé, le revenu salarial moyen des femmes en 2021 était inférieur de 24% à celui des hommes. Et, selon les résultats de l’index de l’égalité professionnelle 2023, un tiers des entreprises comptent moins de deux femmes parmi les dix plus grosses rémunérations ! Bref, il y a encore des marges de progrès en matière d’égalité salariale. Mais comment faire, au juste ? Quelles sont les bonnes pratiques en la matière ?
Que dit la loi en matière d’égalité salariale ?
En France, depuis longtemps, il y existe plusieurs lois en faveur de l’égalité salariale. En 1983, la loi Roudy a commencé à établir l’égalité entre hommes et femmes au travail, en explicitant que pour un travail identique, il doit y avoir un salaire identique. Cela signifie qu’aucune discrimination sur le salaire selon le sexe n’est permise, et cela concerne tous les employeurs et employés, que ce soit dans le public ou le privé.
Plus tard, la loi n° 2001-937 du 9 mai 2001 (dite “loi Génisson”) relative à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes encourage la mise en œuvre de “mesures de rattrapage tendant à remédier aux inégalités constatées notamment en ce qui concerne les conditions d’accès à l’emploi, à la formation et à la promotion professionnelle et pour ce qui est des conditions de travail et d’emploi”.
Dernièrement, en 2021, une nouvelle loi a été faite pour améliorer l’égalité professionnelle, et elle a ajouté de nouvelles règles avec des quotas de 40% pour les postes de direction dans les grandes entreprises d’ici à 2030, sous peine de pénalité financière pour les entreprises (1% de la masse salariale au maximum).
À travail égal, salaire égal
La jurisprudence en France a renforcé l’idée d’égalité de salaire. La Cour de cassation (Cass.soc. 14.09.23, n° 22-11.338) a jugé que la seule différence de qualification ne suffit pas à expliquer une différence de salaire. En d’autres termes, deux employés faisant un travail de même valeur doivent être payés de la même manière, peu importe leur qualification. Avec cet arrêt, nous savons désormais qu’une différence de qualification entre deux salariés au moment de l’embauche ne justifie pas ensuite, en elle-même, l’existence d’une différence salariale lorsque ces deux salariés exercent les mêmes fonctions.
Les nouveaux enjeux de la loi sur la transparence des salaires
Par ailleurs, la directive européenne sur la transparence sur la rémunération, adoptée en mars 2023, impose de nouvelles obligations aux entreprises pour la transparence salariale. Cette directive devra être intégrée dans le droit français d’ici juin 2026. Son objectif est d’améliorer l’équité salariale en exigeant des employeurs qu’ils fournissent des informations claires sur les salaires et qu’ils justifient les écarts possibles.
Comment parvenir à l’égalité salariale ?
Une fois ces principes posés, il reste néanmoins à concrétiser l’égalité salariale en entreprise. Mais comment faire ? Faut-il procéder à des rattrapages de salaires ? Quelles sont les étapes à suivre et les bonnes pratiques ?
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Je télécharge les 8 fichesDe l’analyse des écarts à la transparence salariale
Mettre en place l’égalité salariale demande une méthode et une organisation claire, en commençant par un examen détaillé de la situation. Les entreprises doivent d’abord faire un audit des salaires, y compris les rémunérations fixes et variables comme les primes. Cette analyse doit couvrir plusieurs années pour repérer les tendances et les biais possibles dans les politiques de rémunérations.
La transparence est le deuxième point clé pour une politique d’égalité salariale réussie. Les entreprises doivent créer des grilles de salaires claires, basées sur des critères précis pour chaque poste. Cette transparence doit s’accompagner d’une communication claire avec les employés concernant les augmentations salariales. Le processus d’augmentation doit être clarifié, avec des critères clairement définis pour garantir l’équité. Cela donne aux salariés l’occasion de mesurer eux-mêmes les écarts, et d’entreprendre des démarches de négociation salariale lorsque le besoin s’en fait ressentir.
Des mesures de rattrapage étalées sur 2 à 3 ans
Lorsque des écarts sont trouvés, les entreprises peuvent prendre des mesures correctives. Un plan de rattrapage salarial peut être mis en place : celui-ci identifie les inégalités et prévoit un budget spécifique pour y remédier. En général, ce plan s’étale sur deux à trois ans pour assurer une mise en œuvre progressive et ne pas plomber la masse salariale à court terme.
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Des recruteurs et des gestionnaires RH sensibilisés et formés
Au-delà des mesures correctives, il faut aussi penser aux actions préventives. La formation joue aussi un rôle important dans la mise en place de l’égalité salariale en paie. Les gestionnaires RH comme les recruteurs doivent être formés à reconnaître et à éviter les biais cachés qui peuvent affecter les décisions salariales.
Parmi les bonnes pratiques, on notera de :
- Ne pas demander le salaire précédent lors des recrutements.
- Veiller à l’impact des congés parentaux sur les salaires.
- Mettre en place des programmes de mentorat pour soutenir les carrières des femmes.
- Déployer des formations pour former les femmes (et tous les salariés) à la négociation salariale.
Le soutien de la direction est très important pour le succès de cette démarche. L’égalité salariale doit faire partie des objectifs de l’entreprise et être suivie régulièrement par la direction. Un référent peut aussi être nommé pour coordonner les actions.
Les dernières recommandations de la défenseure des droits
La Défenseure des droits a également formulé des recommandations pour combattre les inégalités salariales.
Elle propose de :
- Renforcer les vérifications et les sanctions contre les entreprises qui ne respectent pas l’égalité des salaires.
- D’améliorer la formation des employés sur les questions d’égalité au travail.
Elle propose également de réviser l’index de l’égalité professionnelle afin qu’il puisse notamment prendre en compte de nouveaux éléments, tels que la part des salariés à temps partiel parmi les femmes et les hommes ou encore la répartition femmes/hommes parmi les 10% des salaires les plus bas de l’effectif de l’entreprise.
Une égalité salariale au coeur des attentes de la gen Z
Déjà soumises à de nombreuses obligations en matière d’égalité salariale, les entreprises devront également bientôt compter avec la directive sur la transparence des salaires. De quoi agir et avancer sur cette question fondamentale et qui tient particulièrement à cœur aux nouvelles générations de salariés.
Pour la gen Z en effet, construire un monde meilleur passe par des engagements des entreprises en matière de diversité et d’inclusion. Et ces derniers se concentrent particulièrement sur l’égalité des chances (sur le genre, l’origine ethnique, l’orientation sexuelle…). Sur ce sujet, la GenZ est particulièrement sensible à l’engagement de la direction générale sur les sujets sociétaux, dont ceux liés à l’inclusion et à l’égalité salariale.
Bref, avancer en matière d’égalité salariale, c’est non seulement respecter ses obligations légales, mais c’est aussi répondre aux attentes de toute une génération de salariés !
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