Les heures supplémentaires, un sujet important dans le monde du travail, soulèvent de nombreuses questions tant pour les employeurs que pour les salariés. Au-delà de la durée légale de 35 heures hebdomadaires, ces heures additionnelles ne sont pas rémunérées au même taux que les heures normales, ce qui suscite des interrogations sur leur fonctionnement, leur calcul et leur impact sur la paie.
Dans cet article, nous allons plonger au cœur de cette thématique complexe pour vous offrir une compréhension approfondie des heures supplémentaires. Nous commencerons par définir ce concept et le distinguer des heures complémentaires, tout en précisant qui est concerné. Ensuite, nous explorerons leur fonctionnement, en abordant les conditions de recours, le contingent annuel, ainsi que les méthodes de calcul et de valorisation. Nous examinerons également leur impact sur le bulletin de paie, en détaillant le régime social et fiscal applicable.
Notre analyse se penchera aussi sur des cas particuliers comme l’aménagement du temps de travail ou la mensualisation des heures supplémentaires. Enfin, nous répondrons à des questions fréquentes, telles que la preuve des heures effectuées ou les droits des cadres en la matière.
Les heures supplémentaires, c’est quoi ?
Définition
Les heures supplémentaires sont les heures effectuées au delà de 35h hebdomadaire ou de la durée d’équivalence (article L3121-28 du code du travail).
Notion de durée d’équivalence : il s’agit d’une durée plus élevé que la durée légale du travail (35h hebdomadaire) dans certains métiers et secteurs d’activité ayant des périodes d’inaction. Ces durées sont établies, soit par les conventions ou accords de branche, soit par un décret en Conseil d’État.
Les heures supplémentaires sont effectuées à l’initiative de l’employeur ou si celui-ci en a tacitement admis la réalisation. Par ailleurs, l’employeur doit rémunérer les heures supplémentaires dès lors que celles-ci résultent de la quantité ou de la nature du travail demandé au salarié.
Différence entre les heures complémentaires et les heures supplémentaires
La différence entre les heures supplémentaires et les heures complémentaires résident dans la notion du temps de travail contractuel. En effet, les heures complémentaires sont les heures effectuées par les salariés à temps partiel au delà de leur durée contractuel jusqu’à 35H. Elles ne sont pas rémunérées au même taux que les heures supplémentaires et ne rentrent pas dans le contingent des heures supplémentaires.
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Qui est concerné ?
Tous les salariés à temps plein, qu’ils soient en contrat à durée déterminée ou à durée indéterminée, y compris les contrats particuliers comme le contrat d’apprentissage et de professionnalisation, peuvent bénéficier des heures supplémentaires.
Comment fonctionnent-elles ?
Avant de déterminer comment calculer les heures supplémentaires et à quel taux les payer , il est nécessaire de connaître son fonctionnement.
Quand un employeur peut-il recourir aux heures supplémentaires ?
L’employeur peut recourir aux heures supplémentaires sans nécessité d’un accord écrit du salarié ou d’un avenant au contrat de travail en respect de la législation concernant la durée maximale quotidienne et hebdomadaire de travail.
Au delà d’une certaine limite, que l’on nomme le contingent annuel des heures supplémentaires, et en absence d’accord d’entreprise sur le sujet, l’employeur doit consulter le Comité Social et Economique pour déterminer les conditions d’exécution de ces heures supplémentaires.
Le contingent annuel d’heures supplémentaires
Le contingent annuel d’heures supplémentaires représente le cumul des heures additionnelles réalisées par un employé au cours d’une année. Ce dispositif permet de suivre et de limiter le volume d’heures supplémentaires effectuées.
Par défaut, la législation fixe ce contingent à 220 heures par an et par salarié. Toutefois, cette limite peut être ajustée par le biais d’accords spécifiques. En effet, un accord d’entreprise, d’établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche peut définir un volume différent, offrant ainsi une certaine flexibilité dans la gestion du temps de travail supplémentaire.
Toutefois certaines heures ne s’imputent pas au contingent, il s’agit :
- des heures prises en compte comme heures supplémentaires suite à une absence considérée comme du temps de travail effectif pour jour férié chômé, repos compensateur attaché aux heures supplémentaires et congé pour événements familiaux.
- des heures dont le paiement est intégralement substitué par un repos compensateur de remplacement
- des heures effectués pour des travaux urgent pour des mesures de sauvetage, de prévention ou de réparation de certains accidents
Les heures effectuées au delà du contingent annuel des heures supplémentaires doit donner lieu à une contrepartie obligatoire en repos.
Comment les calculer ?
Il est essentiel de déterminer dans un premier temps quels sont les heures qui relèvent des heures normales et celles qui relèvent des heures supplémentaires.
Principe général
Le décompte des heures supplémentaires doit s’effectuer à la semaine (du lundi à 0h au dimanche à 24H) en prenant en compte les heures de travail effectif effectuées sur la semaine considérée et notamment les absences assimilées à du temps de travail effectif pour le calcul des heures supplémentaires.
A savoir qu’un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche peut définir une autre période de 7 jours consécutifs.
Le temps de travail effectif
La notion d’heures supplémentaires est étroitement liée à la notion de temps de travail effectif. En effet, en cas d’absence du salarié, il faut déterminer si celle-ci est considérée comme du travail effectif au regard des heures supplémentaires.
Les absences considérées comme du travail effectif pour le calcul des heures supplémentaires sont définis par le code du travail. Les conventions collectives, les accords d’entreprise ou usage dans l’entreprise peuvent prévoir des dispositions plus favorables, il faut alors s’y référer.
Absences considérées comme du temps de travail effectif par le droit du travail pour le calcul des heures supplémentaires :
- congé de formation (individuelle ou professionnelle)
- congé pour événements familiaux
- heures de délégations des représentants du personnel
- Repos compensateur de remplacement
- Contrepartie obligatoire en repos
Comment sont-elles valorisées ?
A quel taux les payer ?
Les heures supplémentaires sont majorées de 25% pour les 8 premières heures au delà de 35 H ou de la durée d’équivalence et de 50% pour les suivantes.
Un accord d’entreprise ou d’établissement, ou à défaut une convention ou un accord de branche, peut prévoir des taux différents, qu’ils soient inférieurs ou supérieurs, dans la limite plancher de 10% (article L3131-33 du code du travail).
La base de rémunération
Le calcul du taux horaire pour les heures supplémentaires repose sur une base salariale spécifique, sauf si des dispositions plus avantageuses sont prévues. Cette base inclut le salaire de base, la valeur des avantages en nature, ainsi que les primes directement liées à l’exécution du travail.
Par exemple, les primes de risque ou de conditions de travail particulières, comme une prime de froid, sont intégrées dans ce calcul. En revanche, certains éléments de rémunération sont exclus, tels que les primes d’ancienneté ou les remboursements de frais professionnels.
Quant aux primes de production, leur prise en compte dépend de leur nature. Si elles sont basées sur la performance individuelle du salarié ou celle de son équipe, elles sont incluses dans le calcul. Cependant, si ces primes ne sont pas directement liées au rendement personnel ou de l’équipe, elles ne sont pas considérées dans le calcul des heures supplémentaires.
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Sont elles obligatoirement payées ?
L’heure supplémentaire ainsi que sa majoration n’est pas obligatoirement payée. Elle peut être compensée par un repos compensateur de remplacement. Ceci peut être mis en place par accord d’entreprise ou d’établissement ou à défaut par une convention ou un accord de branche.
Quelques exemples
Un salarié effectue sur une semaine les horaires suivants. Aucun accord sur les heures supplémentaires n’est applicable dans son entreprise :
Lundi | Mardi | Mercredi | Jeudi | Vendredi | Samedi | Dimanche | Total |
9H | 9H | 9H | 9H | 9H | REPOS | REPOS | 45H |
Il bénéficie de 8 heures à 125% et de 2H à 150% soit 10 heures supplémentaires entrants dans le contingent des heures supplémentaires.
Son salaire de base est de 2000 €, il bénéficie d’une prime d’ancienneté de 100€ et d’une prime de froid de 100 €. Le salaire pris en compte pour le calcul des heures supplémentaires sera de 2100 €, la prime d’ancienneté étant ignorée.
Heures supplémentaires à 125 % : (2100/151.67) X 125% X 8 = 138,46 euros
Heures supplémentaires à 150 % : (2100/151.67) X 150% X 2= 41,54 euros
Sur la semaine suivante, il bénéficie d’un jour de congé mariage enfant et effectue le planning suivant :
Lundi | Mardi | Mercredi | Jeudi | Vendredi | Samedi | Dimanche | Total |
10H | 10H | CONGE MARIAGE ENFANT | 10H | 10H | REPOS | REPOS | 40H |
L’absence pour congé mariage enfant étant considérée pour 7H de travail effectif, son horaire habituel contractuel, il bénéficie de 8 heures supplémentaires à 125% et de 4 heures supplémentaires à 150% soit 12 heures supplémentaires.
Pour le calcul du décompte dans le contingent annuel d’heures supplémentaires, seulement 5 heures sont prises en compte car l’absence pour mariage enfant est ignorée.
Heures supplémentaires à 125 % : (2100/151.67) X 125% X 8 = 138,46 euros
Heures supplémentaires à 150 % : (2100/151.67) X 150% X 4= 83,08 euros
Quel est l’impact des heures supplémentaires sur le bulletin de paie ?
Le régime social et fiscal des heures supplémentaires
Sont-elles soumises à cotisations et contributions sociales ?
Déduction patronale
Les entreprises de moins de 250 salariés peuvent bénéficier d’une déduction forfaitaire de cotisations patronales de 1,50 € par heure supplémentaire effectuée.
Depuis le 1er octobre 2022, la loi “Pouvoir d’achat” a étendu ce dispositif aux entreprises de moins de 250 salariés.
Les heures effectuées doivent être payées au moins pour l’heure (la majoration peut être compensée en repos si un accord le permet).
Montant de la déduction :
- Entreprise de moins de 20 salariés : 1,50 € par heure supplémentaire
- Entreprise de 20 à moins de 250 salariés : 0,50 € par heure supplémentaire
Pour le calcul de l’effectif, il faut prendre en compte le mode de calcul de l’effectif “Sécurité Sociale”.
Exemple :
Un salarié d’une entreprise de moins de 20 salariés effectue 22 heures supplémentaires. L’heure ainsi que la majoration sont rémunérées.
La déduction patronale sera de : 1,5 X 22 = 33 euros
Réduction de cotisations salariales
Depuis le 1er janvier 2019, les salariés qui bénéficient du paiement des heures supplémentaires ont le droit à une réduction de cotisation.
La réduction se calcule de la manière suivante : rémunération de l’heure supplémentaire ainsi que sa majoration multiplié par les taux de cotisation vieillesse (0.40% + 6.90%) et de cotisations AGIRC-ARRCO (3.15% + 0.86%) soit un taux de 11,31 % pour le cas général sans particularité en matière de cotisations.
En cas de taux de cotisation inférieur, il faut ajuster le taux. En tout état de cause, le taux à appliquer ne peut pas être supérieur à 11,31%.
Exemple :
Un salarié bénéficie de 16 heures supplémentaires à 125% pour 276,92 euros et de 6 heures supplémentaires à 150% pour 124,61 euros. Son taux de cotisation vieillesse pris en compte est de 11,31%.
Calcul de la réduction de cotisation : 401,53 X 11,31% = 45,41
Sont-elles imposables ?
La rémunération des heures supplémentaires ainsi que la majoration est exonérée d’impôt sur le revenu dans la limite de 7 500 € net soit 8 037 euros brut.
Le plafond d’exonération fiscale a été relevé au 1et janvier 2022 par la loi de finances rectificative voté à l’été 2022. Pour rappel, avant le 1er janvier 2022, la plafond était de 5000 € net/ an soit 5358 € brut.
Mention sur le bulletin de salaire
Les heures supplémentaires doivent être distinctement mentionné sur le bulletin de salaire en distinguant les taux appliqués.
Les réductions de cotisation patronales et salariales doivent également être mentionnées. Aucune présentation obligatoire n’a été imposée par l’administration.
Exemple de bulletin de salaire
Les cas particuliers
L’aménagement du temps de travail
L’organisation du temps de travail peut s’étendre au-delà de la semaine traditionnelle, permettant une flexibilité accrue. Cette période de référence peut aller jusqu’à un an, voire s’allonger jusqu’à trois ans si un accord de branche le stipule expressément.
Dans ce contexte d’aménagement du temps de travail, le décompte des heures supplémentaires s’effectue sur l’ensemble de la période définie. Ce calcul tient compte des absences qui ne sont pas assimilées à du temps de travail effectif. La rémunération des heures supplémentaires ainsi identifiées n’intervient généralement qu’à l’issue de cette période de référence, permettant une vision globale de l’activité sur l’ensemble du cycle de travail aménagé.
La mensualisation des heures supplémentaires
Les entreprises fonctionnant avec une durée mensuelle de travail supérieure à 35H peuvent lisser les heures supplémentaires sur un mois. La rémunération du salarié doit tenir compte des majorations des heures supplémentaires conformément à la réglementation en vigueur dans l’entreprise. On parle alors d’heures supplémentaires fonctionnelles.
Les heures supplémentaires au delà de la durée légale doivent être expressément mentionnées sur le bulletin de salaire. Elles sont également prises en compte dans le calcul du contingent annuel.
Si le salarié effectue des heures au delà de l’horaire collectif, elles doivent également être rémunérées au titre des heures supplémentaires et distinguées des heures prévues au contrat.
Durée conventionnelle en dessous de la durée légale du travail
Il arrive que des conventions collectives ou des accords d’entreprise établissent une durée de travail inférieure à la durée légale de 35 heures par semaine. Dans ce cas, un régime particulier s’applique pour les heures travaillées.
Les heures effectuées entre cette durée conventionnelle et la limite légale de 35 heures ne sont pas considérées comme des heures supplémentaires au sens juridique du terme. Leur rémunération est déterminée selon les dispositions spécifiques prévues dans l’accord ou la convention en question.
En revanche, dès que le seuil des 35 heures hebdomadaires est dépassé, les heures additionnelles entrent dans le cadre légal des heures supplémentaires. Elles sont alors soumises au régime standard des heures supplémentaires, avec les majorations et les règles qui s’y appliquent.
Quelques questions sur les heures supplémentaires
Comment apporte-on la preuve des heures supplémentaires ?
La preuve incombe au salarié et à l’employeur, chacun devant apporter la preuve de l’existence ou non d’heures supplémentaires.
Afin de formaliser les heures supplémentaires et d’éviter tout litige, l’employeur peut mettre en place un système de pointage ou un planning hebdomadaire des heures effectuées signé par le responsable hiérarchique. A l’heure du “zéro papier”, ceci peut prendre la forme d’une intégration dans un système intranet ou même via le logiciel de paie avec l’intégration automatique des données dans la paie.
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Je m’inscris gratuitementL’absence pour jour férié chômé est-elle considérée comme du travail effectif pour le calcul des heures supplémentaires ?
Concernant les jours fériés chômés, l’administration les reconnait comme du temps de travail effectif pour le calcul de la majoration des heures supplémentaires (circulaire 2000-7 du 6 décembre 2000) mais la jurisprudence infirme cette position dans deux arrêts de la Cour de Cassation ( n°10-10701 et n°02-21304). En tout état de cause, cette absence n’est pas considérée comme du travail effectif pour le décompte du contingent annuel.
Le paiement des heures supplémentaires peut-il être forfaitaire ?
Une convention de forfait peut définir une rémunération forfaitaire incluant le paiement des heures supplémentaires. Ce forfait qu’il soit hebdomadaire, mensuel ou annuel doit être spécifié au contrat de travail et mentionné sur le bulletin de salaire.
Un cadre a t-il le droit aux heures supplémentaires ?
Un cadre, s’il ne dispose pas d’une convention de forfait, peut bénéficier des heures supplémentaires sauf les cadres dirigeants qui ne sont pas soumis aux mêmes règles concernant la durée du travail.
Que se passe t-il si une semaine est à cheval sur 2 mois ?
En cas de semaine à cheval sur 2 mois, le calcul des heures supplémentaires sera effectué à la fin de la semaine soit le mois suivant. Le paiement éventuel des heures supplémentaire interviendra donc également le mois suivant.