Fermeture exceptionnelle imposée par l’employeur, que dit la loi ?

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Dans certaines circonstances bien précises, l’employeur peut être amené à fermer temporairement l’entreprise ou l’un de ses sites. La fermeture exceptionnelle imposée par l'employeur pose de nombreuses questions pratiques, mais qu'en dit la loi ? On vous dit tout.

Auteur / Autrice

Juriste droit social, consultante et rédactrice juridique et RH

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Certaines circonstances, parmi lesquelles figurent les travaux nécessaires, les raisons saisonnières (été ou fêtes de fin d’année), les raisons économiques ou encore les situations imprévues, peuvent amener l’employeur à décider d’une fermeture exceptionnelle de l’entreprise ou d’un site, qu’il ne faut pas confondre avec les congés annuels planifiés ou les jours fériés.

Cette fermeture exceptionnelle, qu’elle soit anticipée ou brutale, soulève de nombreuses questions juridiques et sociales : l’employeur est-il en droit de fermer l’entreprise ? Peut-il imposer des jours de congés ou de repos ? Que deviennent les salaires ? À toutes ces questions, que dit la loi ? 

Fermeture exceptionnelle : les obligations de l’employeur

Dans le cadre de son pouvoir de direction, l’employeur dispose du pouvoir d’organiser le fonctionnement de son entreprise, ce qui inclut la possibilité de suspendre temporairement l’activité et d’imposer aux salariés la fermeture de l’entreprise pour les fêtes de fin d’année ou durant la période estivale.

Le salarié qui refuserait la fermeture exceptionnelle de l’entreprise décidée par l’employeur s’expose, sauf motif légitime, à des sanctions disciplinaires. En effet, le refus de prendre des congés imposés par l’employeur constitue un manquement aux obligations contractuelles.

Ces sanctions peuvent aller du simple avertissement au licenciement pour faute grave selon la gravité du comportement du salarié et les circonstances du refus.

La décision de l’employeur de fermer temporairement l’entreprise peut être prise de manière unilatérale ou en application d’un accord collectif? mais ce pouvoir ne peut pas s’exercer de manière arbitraire.

En effet, lorsque l’employeur impose une fermeture exceptionnelleil s’engage à se conformer à un certain cadre légal et à respecter certaines obligations.

Avoir des raisons justifiées pour imposer une fermeture exceptionnelle

Parmi ces raisons, on peut trouver :

  • Des circonstances climatiques extrêmes ou une catastrophe naturelle ;
  • un incendie, une inondation ou une panne technique ;
  • des événements extérieurs imprévisibles qui empêchent l’accès au lieu de travail (grèves, menaces de sécurité) ;
  • Les travaux d’entretien ou de rénovation pour maintenir la sécurité des installations ;
  • Une fermeture liée à des difficultés économiques ou à une réorganisation ;
  • Une chute de demandes de produits ou services, période de creux économique ;
  • Et, exceptionnellement, une crise sanitaire ou une pandémie. 

Vérifier les accords collectifs ou la convention collective en place au sein de l’entreprise  

Des dispositions conventionnelles peuvent déjà avoir fixé des modalités spécifiques en matière de fermeture d’entreprise, incluant la durée maximale, les délais à respecter et les compensations à prévoir.

Consulter le comité social et économique (CSE) avant toute prise de décision de fermeture (C. trav., art. L. 2312-8)

Cette consultation est requise, sur la durée de la fermeture et la période choisieau moins deux mois avant la fermeture exceptionnelle envisagée, afin d’assurer le respect des droits des salariés. En effet, le CSE joue un rôle clé dans le dialogue social et aide à déterminer la meilleure approche pour affecter les jours de congés des employés.

En l’absence de CSE, un accord collectif d’entreprise doit fixer les règles applicables et les formalités à respecter dans le cadre de la fermeture de l’entreprise.

En l’absence d’accord collectif, l’employeur peut décider seul de fermer l’entreprise et il n’est pas dans l’obligation d’obtenir l’accord des salariés.

Mais l’employeur doit également recueillir l’avis des représentants du personnel (positif ou négatif) sur ces questions et pas uniquement les informer de sa décision.

Néanmoins, et même en présence d’un avis négatif, la décision finale appartient à l’employeur, qui pourra fermer l’entreprise durant la période choisie, mais non sans s’être auparavant assuré de rester conforme aux règlements de travail en vigueur, et notamment de respecter les délais de prévenance.

Préciser le nombre de jours ou de semaines de fermeture 

Cette durée ne doit pas dépasser 24 jours ouvrables consécutifs, soit 4 semaines (article L.3141-17 C.trav.)

Les salariés doivent bénéficier d’au moins 12 jours continus de congés pendant la période de fermeture, selon l’article L.3141-18 du Code du travail.

Informer les salariés  

Une fois la décision de fermeture actée, les salariés doivent être informés de l’interruption des activités de l’entreprise, par tout moyen, dans un délai raisonnable, au moins un mois à l’avance avant la date de fermeture. Cela leur permet de prendre des dispositions pour s’adapter à ces changements, en termes de gestion du temps et d’organisation personnelle. 

À défaut, la fermeture de l’entreprise n’est pas considérée comme une période de congés payés et l’employeur a l’obligation d’indemniser ses salariés pour les salaires perdus. 

Pour que l’information soit bien reçue des salariés et pour conserver une trace en cas de litige, il est préférable qu’un avis écrit (courrier recommandé avec accusé de réception, affiche, panneau visible, mail) soit donné aux employés, qui stipule la date et la durée de la fermeture, la date de réouverture, les raisons et les dispositions prises concernant la gestion des jours de congés. 

Quelles conséquences pour les salariés ?

En pratique, la fermeture exceptionnelle peut affecter les salariés dans leur rémunération et la prise de leurs congés payés. Cependant, par principe, en cas de fermeture décidée par l’employeur, le salarié qui est prêt à travailler ne peut pas être privé de sa rémunération, sauf situations exceptionnelles telles que faute lourde du salarié.

Si l’origine de la fermeture est imputable à l’employeur (décision de gestion, travaux non anticipés…), le salaire doit être maintenu, même en l’absence de prestation de travail.

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Le recours au dispositif d’activité partielle en cas de circonstances de caractère exceptionnel

Conformément à l’article R.5122-1 du Code du travail, l’employeur peut placer ses salariés en position d’activité partielle lorsque l’entreprise est contrainte de réduire ou de suspendre temporairement son activité en raison de circonstances de caractère exceptionnel, mais que l’employeur ne peut pas en supporter seul le coût salarial.

Ces circonstances de caractère exceptionnel sont celles qui peuvent être assimilées à de la force majeure et qui ont un impact temporaire sur l’activité de l’entreprise, sans que cela soit imputable à une faute ou une négligence de l’employeur. Ces cas de force majeure sont les suivants :

  • La conjoncture économique ;
  • Les difficultés d’approvisionnement en matières premières ou en énergie ;
  • Un sinistre ou des intempéries de caractère exceptionnel ;
  • Une transformation, restructuration ou modernisation de l’entreprise ;
  • Toute autre circonstance de caractère exceptionnel.

Pour cela, l’employeur doit respecter certaines étapes dans la mise en place de l’activité partielle :

  • Consultation du CSE, avant la demande d’autorisation administrative d’activité partielle, dans les entreprises de plus de 50 salariés uniquement, sur les sujets suivants :
    • Les motifs de recours ;
    • Les catégories professionnelles et les activités concernées ; 
    • Le niveau et les modalités de mise en œuvre des réductions d’horaire ;
    • Les actions de formation envisagées ou tout autre engagement pris par l’entreprise.
  • L’envoi d’une demande d’activité partielle à la DREETS dans un délai d’un mois à compter du placement des salariés en activité partielle, accompagné de l’avis préalable du CSE. La décision de la DREETS est envoyée dans un délai de 15 jours calendaires à compter de la demande d’autorisation. L’absence de réponse vaut autorisation. 
  • Une demande en ligne mensuelle de remboursement.

En cas de circonstances exceptionnelles, le délai pour consulter et adresser l’avis du CSE à l’appui d’une demande d’autorisation préalable est de deux mois. 

En l’absence de CSE, l’employeur doit informer directement ses salariés de la mise en activité partielle.

Une fois l’autorisation obtenue, l’entreprise peut se mettre en activité partielle. L’employeur doit verser à ses salariés l’indemnité d’activité partielle à la date habituelle du salaire, correspondant à 60 % de son salaire brut par heure chômée, soit environ à 72 % du salaire net horaire. 

L’employeur peut percevoir une allocation d’activité partielle fixée à 36 % de la rémunération horaire brute.

Imposition de congés aux salariés

Lorsque la fermeture est décidée, l’employeur peut contraindre les salariés à la prise de congés durant la période de fermeture, estivale notamment, mais sans excéder 24 jours consécutifs et à condition de respecter un délai de prévenance d’un mois.

L’indemnisation du salarié durant la période d’inactivité varie selon qu’il a acquis suffisamment de jours de congés ou pas durant la période de fermeture de l’entreprise.

Le salarié a acquis suffisamment de jours de congés par rapport au nombre de jours de fermeture

Le salarié perçoit alors l’indemnité de congés payés dans les conditions habituelles, versées par l’entreprise, pendant toute la durée de fermeture de l’entreprise et de la cessation de son activité.

Lorsque l’entreprise est fermée pendant un nombre de jours dépassant la durée des congés légaux annuels (30 jours ouvrables), l’employeur verse au salarié une indemnité journalière pour chacun des jours ouvrables de fermeture au-delà de la durée légale.

Cette indemnité spécifique ne peut être inférieure à l’indemnité journalière de congés payés et elle est soumise à l’impôt sur le revenu. 

Le salarié vient d’être embauché ou n’a pas assez de jours de congés payés pour percevoir l’indemnité de congés payés 

Dans ce cas, il ne sera pas indemnisé sauf si la fermeture excède le nombre de jours de congés légaux, soit 30 jours ouvrables par an.

Afin de pallier le manque de jours de congés payés d’un salarié, et à défaut de dispositions conventionnelles contraires, l’employeur peut lui proposer de :

  • Travailler à distance, à condition que son activité le lui permette ;
  • Prendre des congés par anticipation (des congés qu’il n’a pas encore acquis) ou des RTT. L’employeur ne peut pas le lui imposer, il doit recueillir son consentement écrit ;
  • Prendre un congé sans solde si le salarié concerné ne souhaite pas prendre des congés par anticipation ;
  • Faire une demande d’aide financière pour congés non payés à France Travail. 

L’employeur devra informer le salarié de cette possibilité, mais c’est au salarié d’effectuer les démarches necéssaires. L’indemnité allouée est calculée en fonction du nombre de jours de fermeture de l’entreprise et des droits à congés payés éventuellement acquis.

À noter : Si un salarié est en période d’essai au moment de la fermeture de l’entreprise, cette période sera prorogée d’une durée équivalente à celle de la fermeture.

Pour conclure, la fermeture exceptionnelle de l’entreprise est donc possible, mais très encadrée par la loi. L’employeur doit, en effet, respecter les droits de salariés et les procédures légales.


Nous recommandons donc d’anticiper dans la mesure du possible la fermeture exceptionnelle de l’entreprise, bien la formaliser et informer les salariés dans un délai raisonnable pour éviter les litiges.

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