Comment gérer le retard d’un collaborateur ?

Comment gérer le retard d’un collaborateur ?
Audrey Gervoise

DRH en temps partagé, j'accompagne les entreprises dans la gestion et l'optimisation de leurs Ressources Humaines

Comment réagir face au retard d’un salarié ? Tous les retards peuvent-ils, doivent-ils, être sanctionnés ?
Les employeurs se retrouvent souvent démunis face aux retards de leurs salariés. En effet, entre sanctions pouvant être jugées disproportionnées, risques de démotivation ou incitation au retard en l’absence de réactions, il n’est pas évident de trouver le juste milieu.
Notre experte fait le point avec vous sur la façon de gérer les retards de vos salariés.

Épineuse question que celle du temps de travail et du respect des heures de travail !

Il est évident que si le retard est exceptionnel, imprévu et inhabituel, il sera de bon ton pour l’employeur de le tolérer : une panne de réveil, des difficultés de circulation, une grève des transports, sont autant de possibilités pour l’employeur de manifester son indulgence, et d’effectuer un acte managérial.

Cette indulgence et cette compréhension ne dispensent toutefois pas le salarié de prévenir au plus vite son employeur, qui pourra ainsi prendre les mesures nécessaires pour pallier son absence momentanée.

Une chose est certaine : dès qu’il s’agit de sanctionner le comportement d’un salarié, l’employeur est bien souvent mal à l’aise, et de nombreuses questions sont soulevées, ou ne vont pas tarder à l’être.

Parmi les comportements méritant sanction, le retard est sans aucun doute le plus fréquent.

Et le retard récurrent, tout comme les absences sans motif répétées deviennent très rapidement des problématiques avec des enjeux financiers très importants.

Alors, comment réagir face à de tels manquements ?

Retour sur les faits :

L’un de vos salariés arrive régulièrement en retard. Il se présente au travail trop fréquemment après l’heure prévue, et désorganise le bon fonctionnement de votre entreprise.

Plusieurs questions à se poser :

Tous mes salariés connaissent-ils les horaires de travail de façon certaine ? Ai-je été suffisamment clair dans la communication des horaires de travail à mes collaborateurs ?

Vous pouvez, afin d’éviter tout problème, inscrire les horaires de travail dans le contrat de travail de vos collaborateurs (cas des horaires individualisés). Ainsi, chacun d’entre eux sera informé de ses horaires.

Pour mémoire, les horaires de travail ne figurent pas au titre des mentions obligatoires du contrat de travail. En pratique, le contrat de travail à durée indéterminée doit faire apparaître systématiquement les mentions suivantes :

  • Identité et adresse des parties.
  • Fonction et qualification professionnelle.
  • Lieu de travail.
  • Durée du travail.
  • Rémunération (salaire et primes).
  • Congés payés.
  • Durée de la période d’essai.
  • Délais de préavis en cas de rupture du contrat.

À défaut d’avoir inséré les horaires de travail dans le contrat de travail de votre collaborateur à titre individuel, vous pourrez lui reprocher d’être arrivé en retard à la condition que ceux-ci soient connus de tous.

Pour ce faire, rien de tel que l’affichage dans l’entreprise.

Ainsi, les heures auxquelles commence et finit le travail doivent être affichées dans l’entreprise. Il s’agit là évidemment d’horaires collectifs, mais ils s’appliquent à tous sauf dérogations. Cet affichage doit être effectué dans chacun des lieux de travail en caractères lisibles, et apparents. (Article D.3171-2 du Code du travail).

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Avant de sanctionner, rappeler les règles

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Dans de très nombreux cas, l’employeur est démuni, car le salarié en retard ne l’est que de quelques minutes. La prise de poste devant s’effectuer à 8H30, et le collaborateur arrivant à 8H35…

Outre le problème de discipline, dans la plupart des cas un tel retard ne porte que peu à conséquence. En effet, le collaborateur proposant spontanément de rester un peu plus tard le soir !

Aussi, selon la Cour de cassation, le seul fait d’arriver en retard à la prise de poste une seule fois, ne constitue pas une cause réelle et sérieuse de licenciement (Cour de cassation, chambre sociale, 23 mars 2005, 03-41400).

Là, où cela pose de gros problèmes, c’est dans l’industrie, et notamment lorsque ces retards perturbent entre autres les chaînes de fabrication. Les enjeux financiers et économiques sont énormes et de tels comportements ne peuvent pas être tolérés.

Vous ferez donc un point de situation et vous établirez une liste sur plusieurs semaines des retards, des temps de pause… et vous constituerez votre dossier : à l’appui de votre argumentaire, n’hésitez pas à chiffrer les pertes financières occasionnées à l’entreprise par ces retards.

Une fois ce travail effectué, vous organiserez une entrevue avec votre collaborateur afin de le mettre en garde oralement. On parle très souvent d’entretien de recadrage. Cette mise en garde orale vous permettra de rappeler les règles de base quant au respect des horaires de travail. Vous insisterez également sur les conséquences de son comportement sur le fonctionnement de l’entreprise et sur la surcharge de travail occasionnée pour ses collègues.

Il est important d’avoir en tête que le rappel à l’ordre n’est pas une sanction disciplinaire. Celui-ci est un outil permettant à l’employeur de demander au salarié dont le comportement cause un trouble à l’entreprise de le stopper. Il s’agit d’une mise en garde, l’employeur sollicitant de son salarié une modification impérieuse de comportement.

En cas de récidives, et de retards récurrents : sanctionner le retard

Dans l’hypothèse où la mise en garde ou le rappel des règles fait à l’oral n’auraient pas suffi à faire cesser le trouble, et que votre collaborateur continue à arriver en retard, il est peut-être temps de sanctionner ce salarié réfractaire ! En effet, plus longtemps vous tolérerez ces retards, plus il sera difficile de justifier une sanction, ne l’oubliez surtout pas.

Vous allez donc engager une procédure disciplinaire à son encontre, et sanctionner le fait fautif.

Il faudra donc :

  • Convoquer le salarié à un entretien préalable.
  • Le recevoir pour lui faire passer cet entretien.
  • Lui notifier la sanction dans les délais légaux.

Cette sanction, prise à l’encontre du salarié récalcitrant, peut ainsi aller de l’avertissement au licenciement. Elle devra comme pour les autres types de fautes être proportionnelle et adaptée à la gravité des retards du salarié.

Ainsi, les retards d’un salarié pourront constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement s’il existe une certaine répétition dans les retards et s’ils perturbent la bonne marche de l’entreprise et participent à sa désorganisation.

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Quelques exemples jurisprudentiels :

  1. Le licenciement est justifié lorsque le salarié a « un comportement particulièrement fautif en refusant de s’expliquer sur ces arrêts de travail et en s’abstenant de prévenir l’employeur de ces absences au moment des fêtes de fin d’année mettant en difficulté celui-ci pour organiser son remplacement, malgré des avertissements déjà reçus pour des retards répétés » (Cour de cassation, chambre sociale, 25 octobre 2007, n° 06-42394).
  2. Des retards répétés et qui ont déjà fait l’objet d’avertissements (dont un avec mise à pied) sont de nature à justifier la rupture du contrat (Cour de cassation, chambre sociale, 4 février 1981, n°79-40813).
  3. Encours également un licenciement pour faute grave le salarié auteur de retards importants (de plus de 30 minutes), réitérés sur une courte période, alors qu’il était chargé d’un travail posté et que son absence a désorganisé son équipe (Cour de cassation, chambre sociale, 15 janvier 2014, n° 12-24221).
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Audrey Gervoise

Généraliste confirmée dans le domaine des Ressources Humaines et dans la gestion des entreprises, je mets l'ensemble de mes compétences, de mon expérience et de mes savoir-faire au service des entreprises pour les aider et les éclairer dans la gestion RH et administrative du quotidien.