Selon une enquêté réalisée pour le CEVIPOF et l’association Dialogues par IPOS en juin 2021, les salariés attendent de leurs représentants du personnel d’être plus compétents que combatifs. Fini l’image du délégué syndical brandissant une banderole en pleine réunion ou bloquant l’entrée aux bureaux ! Les collaborateurs attendent de leurs représentants qu’il connaissent bien les dossiers pour défendre leurs intérêts auprès de la direction (29% des salariés interrogés).
Les partenaires sociaux en entreprise viennent souvent de parcours professionnels différents et pour beaucoup, ils découvrent à l’occasion de leur mandat, les notions de budget, d’effectif, de gestion des compétences ou de prévention des risques professionnels. Sans compter aujourd’hui l’enjeu environnemental qui est désormais une des missions du Comité Social et Économique.
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Je télécharge le guideÊtre représentant élu au Comité Social et Économique ou être délégué syndical, c’est développer des compétences professionnelles (techniques et soft skills) tout au long de son mandat (I). Des compétences à reconnaître et à valoriser pendant le mandat et à la fin de celui-ci (II).
Les partenaires sociaux : des couteaux-suisses aux multiples compétences dans de nombreux domaines de l’entreprise
Non, le rôle des membres du Comité Social et économique ne se limite pas à distribuer des cadeaux en fin d’année et non, les délégués syndicaux ne se contentent pas de dire non aux réunions de négociations.
Devenir membre du Comité Social et Économique ou être désigné délégué syndical, c’est accepter des missions et responsabilités envers les salariés. Des missions qui amènent à développer de nombreuses compétences techniques et savoir-être.
Des compétences diverses dans le cadre de leurs missions
Les missions des représentants du personnel et des représentants syndicaux en font de véritables couteaux-suisses dans des domaines variés comme : les finances, la stratégie, les risques professionnels, la gestion des compétences, la qualité de vie et conditions de travail. Et parfois, certains deviennent même des spécialistes sur des sujets comme la formation ou les risques professionnels.
Pour réussir dans leurs missions, les compétences que doivent développer les salariés élus ou mandatés sont multiples. Voici une liste non exhaustive :
- Réaliser une veille sociale (avec un droit du travail en constante évolution).
- Rechercher la documentation économique, juridique et financière nécessaire pour analyser les enjeux stratégiques, mais aussi les impacts sur l’environnement des décisions de l’entreprise.
- Faire des propositions argumentées auprès de la direction sur les sujets individuels et collectifs.
- Négocier un accord, rédiger les procès-verbaux.
- Analyser les facteurs de risques professionnels en tant qu’acteur de la sécurité, de la qualité de vie et des conditions de travail.
- Communiquer, en interne, sur les réseaux sociaux.
Et nous ne pouvions pas parler compétences sans évoquer les soft skills, ces fameux savoir-être :
- La coopération.
- L’esprit critique.
- La résolution de problèmes.
- Le sens du service.
- La négociation.
- L’écoute.
- Des qualités relationnelles et rédactionnelles.
Selon la taille de l’entreprise, être représentant du personnel devient presque un « poste » à part entière au regard des nombreuses missions et tâches qui sont dévolues aux élus du Comité Social et Économique ou aux mandataires syndicaux qui sont au cœur d’un dialogue social de plus en plus riche.
La réussite dans leurs missions dépend du développement de ces compétences clés. Mais comment acquérir ou développer ces compétences ?
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Des formations pour accompagner les partenaires sociaux à acquérir et développer les compétences nécessaires à leurs missions
Les élus au Comité Social et Économique bénéficient obligatoirement à leur prise de mandat d’une formation économique et d’une formation en santé, sécurité et conditions de travail. Cette formation de 5 jours est nécessaire et indispensable pour que les membres du CSE nouvellement élus puissent assurer leurs missions.
Les délégués syndicaux peuvent également suivre une formation économique, sociale et syndicale qui va les préparer notamment aux techniques de négociation. Ce congé de formation ne peut excéder 18 jours.
Ces formations initiales sont complétées souvent sur le tas, par leur expérience, tout au long de leur mandat. En effet, les élus ou mandatés sont en première ligne des nouveaux défis que l’entreprise doit relever : travail hybride, enjeux environnementaux, qualité de vie au travail, nouvelles technologies et doivent maintenir le niveau de leurs connaissances pour représenter au mieux les salariés.
Les partenaires sociaux peuvent également suivre des formations pendant la durée de leur mandat. Certaines sont proposées par leurs organisations syndicales afin de les accompagner sur des sujets particuliers comme le télétravail ou les risques psycho-sociaux. Ces formations sont un moyen pour les syndicats de s’assurer d’un dialogue social d’égal à égal, où les partenaires sociaux disposent du même niveau de connaissances que l’employeur et donc de la possibilité de faire des propositions argumentées.
Dans le cadre d’accord collectif sur le droit syndical, certaines entreprises, conscientes de l’intérêt de renforcer la professionnalisation des partenaires sociaux pour un dialogue social de qualité, proposent même de financer les formations spécialisées sur des compétences techniques particulières ou des thématiques.
De nombreux savoirs et connaissances techniques (comptabilité, gestion de projet, droit social, stratégie, politique d’achat, négociation, rédaction d’actes, logistique) sont donc mobilisés pour l’exercice de mandat et ces compétences sont transférables dans de nombreux métiers, voire des métiers qui ne sont pas ceux d’origine des partenaires sociaux !
Des compétences à reconnaitre et à valoriser dans le parcours professionnel des salariés élus et désignés
Être membre du Comité Social et Économique ou délégué syndical permet d’acquérir et/ou de développer des compétences techniques ou comportementales qui peuvent devenir des atouts pour leur parcours professionnel.
Et parfois, le mandat est l’occasion de se découvrir des talents insoupçonnés ! On pense au salarié manutentionnaire élu au Comité Social et Économique et nommé trésorier qui va souhaiter se reconvertir vers un poste en comptabilité !
Comment valoriser ces nouvelles compétences dans le parcours professionnel des partenaires sociaux ?
Reconnaître les compétences des partenaires sociaux
L’expérience acquise pendant l’exercice d’un mandat et les compétences associées peuvent être évaluées tout au long du mandat, notamment dans le cadre des entretiens professionnels obligatoires. Cet entretien est l’occasion pour le salarié élu ou désigné de partager ses projets professionnel, et pour l’employeur d’anticiper les évolutions.
Les représentants du personnel bénéficient également d’un entretien de fin de mandat permettant de procéder au recensement des compétences acquises au cours du mandat et de préciser les modalités de valorisation de l’expérience acquise (C. trav., art. L. 2141-5, al. 4).
Cet entretien est obligatoire pour tous les représentants du personnel titulaires et titulaires de mandat syndical dans les entreprises d’au moins 2 000 salariés. Dans les entreprises de moins de 2 000 salariés, l’entretien n’est obligatoire que pour les représentants du personnel et titulaires de mandat syndical qui disposent d’heures de délégation sur l’année représentant 30% de la durée de travail fixée dans leur contrat de travail. Rien n’empêche l’employeur d’être plus royaliste que la loi et de faire bénéficier à chaque partenaire social d’un entretien, quel que soit l’importance de son mandat.
Cet entretien, qui ne doit pas être confondu avec l’entretien professionnel, permet d’échanger sur les perspectives d’évolution professionnelle du salarié, notamment en termes de qualifications et d’emploi.
Pour identifier et apprécier les compétences acquises, certains accords collectifs ont mis en place un référentiel de compétences qui servira de base pour une auto appréciation, une démarche de regards croisés syndicat/direction, en complément de l’entretien professionnel et de l’entretien de fin de mandat.
Un référentiel de compétences permet d’ailleurs de rester objectif sur les compétences et de faire abstraction des tensions ou débats qui ont pu survenir ! Négocier un accord reste une compétence objective, que le salarié mandaté ait été ou non en désaccord avec la direction.
Valoriser les compétences dans les parcours professionnels
Reconnaître ces compétences permet d’accompagner le salarié titulaire d’un mandat représentatif ou syndical dans son parcours professionnel (nouveau poste, promotion). Promouvoir la mobilité interne, prendre en considération des vocations que l’exercice du mandat ont pu faire naître sont de formidables leviers de fidélisation de ces salariés qui se sont engagés pendant plusieurs années dans l’entreprise.
Cette démarche permet également de préparer l’évolution ou la reconversion professionnelle, parfois vers des métiers bien différents du métier d’origine ! Et si notre salarié trésorier du CSE était le candidat interne idéal pour ce poste au service comptabilité.
Mais certains élus ou délégués syndicaux regrettent néanmoins l’étiquette « syndicaliste » qui peut freiner leur parcours professionnel en interne. Dans le 12ème baromètre réalisé par le Défenseur des droits et l’Organisation internationale du travail (OIT), publié en septembre 2019, sur la perception des discriminations syndicales dans l’emploi, une personne syndiquée sur deux déclare avoir été discriminée en raison de son activité syndicale au cours de sa vie professionnelle.
Pourtant les compétences développées par les partenaires sociaux sont des compétences qui sont parfois recherchées sur le marché du travail.
C’est dans cet objectif de promouvoir l’employabilité également en externe que les organisations syndicales ont travaillé sur une certification de compétences professionnelles permettant une équivalence avec des titres professionnels. Mais si cette certification existe depuis la loi n°2015-994 du 17 août 2016, il aura fallu attendre 2018 pour que deux arrêtés précisent les conditions de délivrance de cette certification.
Cette certification est structurée en 6 domaines de compétences dénommés certificats de compétences professionnelles (CCP) qui vont constituer des blocs de compétences d’un titre professionnel :
- CCP « Encadrement et animation d’équipe ».
- CCP « Gestion et traitement de l’information ».
- CCP « Assistance dans la prise en charge de projet ».
- CCP « Mise en œuvre d’un service de médiation sociale ».
- CCP « Prospection et négociation commerciale ».
- CCP « Suivi de dossier social d’entreprise ».
Ces certificats de compétences sont validés par un jury et les sessions d’examen sont organisées par l’AFPA (Agence nationale de formation professionnelle des adultes).
Il peut y avoir d’autres voies pour faire reconnaître ces compétences professionnelles acquises pendant la durée du mandat électif ou syndical comme la validation des acquis par expérience (VAE).
La délivrance d’une certification permet aux salariés élus ou désignés de valoriser les compétences acquises pendant leur mandat et de promouvoir leur capacité professionnelle à évoluer sur de nouveaux postes, y compris des postes à responsabilité, dans ou en dehors de l’entreprise.
Valoriser les compétences acquises par les élus, ce n’est pas que valoriser l’individu, c’est aussi valoriser les mandats et l’importance donnée par l’employeur au dialogue social dans l’entreprise.
Reconnaître le parcours syndical comme partie intégrante du parcours professionnel, c’est aussi faire évoluer l’image du syndicalisme vers celui d’acteur de l’entreprise au même titre que le management. Et pourquoi pas susciter des vocations syndicales quand le taux de syndicalisation en France est l’un des plus bas d’Europe en mettant en avant l’activité syndicale comme le terreau pour développer des compétences professionnelles recherchées en entreprise!
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