Comment prévenir le burnout chez les professionnel·les des Ressources Humaines

Comment prévenir le burnout chez les professionnel·les des Ressources Humaines
Bérangère Colignon

Ancienne RRH, fondatrice de Clart&Sens, entreprise de coaching et de formation en intelligence émotionnelle, j'aide les dirigeants et managers à conserver un bon niveau d'énergie.

Repérer les signes précurseurs et adopter les bons réflexes pour prévenir le risque de burnout chez les professionnel·les des ressources humaines.

Quand les professionnel·les des Ressources Humaines deviennent des cordonniers mal chaussé·es…

Le phénomène de burnout reste difficile à mesurer, mais d’après le « Baromètre T10 » d’Opinionway réalisé à la veille de l’été 2022 – consulter l’infographie – le burnout toucherait 34% de salariés : sujet donc très préoccupant pour les professionnel.les des Ressources Humaines.

Ce même « Baromètre T10 » indique que 46% de femmes et 43% de managers sont exposés aux problèmes de santé psychologique, sachant que les femmes représentent environ 2/3 des professionnel·les des Ressources Humaines.

Selon le 9ème baromètre du cabinet Empreinte Humaine publié en mars 2022, 64% des RH interrogés se déclarent en situation de détresse psychologique.

Le burnout : une notion à trois dimensions

Le syndrome d’épuisement professionnel est l’équivalent donné en français pour le terme anglais « burnout ». Cet épuisement se manifeste quand le travail est perçu comme pénible, dans une situation qui dure dans le temps avec des conditions de travail trop exigeantes sur le plan émotionnel.

Il provoque fatigue, stress, angoisse et dépression. Il se ressent aussi bien physiquement, émotionnellement que mentalement et contribue à la perte d’efficacité professionnelle.

Les travaux de Christina Maslach, psychologue du travail, ont permis de définir le burnout comme un processus de dégradation à travers trois dimensions :

  • L’épuisement émotionnel, ou syndrome anxieux dépressif, directement en lien avec un travail ressenti comme pénible et stressant qui disparaît en dehors du travail, pendant les vacances par exemple, ce qui le distingue de la dépression.
  • La dépersonnalisation se manifeste par une perte d’empathie dans les rapports avec les autres pouvant conduire au repli sur soi voire au mépris.
  • La perte de l’accomplissement personnel correspond à une auto-évaluation négative avec une incapacité à faire évoluer la situation. Cette dimension est la conséquence des deux précédentes.

Chaque dimension du test MBI (Maslach Burnout Inventory) donne lieu à un résultat pour mieux cibler et remédier au processus de déconstruction créé par le burnout.

Vous souhaitez faire le point ? Voici le test MBI.

Les facteurs propices au burnout chez les professionnel·les RH

Le burnout est multifactoriels. Et même si les déclencheurs sont tournés vers le milieu professionnel, des fragilités annexes peuvent favoriser le risque d’épuisement.

Les facteurs personnels

Une personne qui supporte une charge mentale élevée, si elle doit par exemple aider un proche (parents en situation de dépendance, enfants en bas âge…), fatiguera plus rapidement.

La monoparentalité ou les familles nombreuses concernent également les professionnel·les des Ressources Humaines : ce type de situation familiale peut également favoriser la perte d’énergie et influencer le niveau de fatigabilité.

Adopter des comportements addictifs est à la fois un facteur aggravant, mais aussi une manifestation du burnout. Ce type de comportements regroupe non seulement l’alcool, la cigarette, voire les drogues « plus dures » mais aussi les médicaments psychotropes, les écrans ou la caféine.

Les causes relationnelles

Devoir gérer des tensions relationnelles, mission courante pour les professionnel·les des Ressources Humaines, voire traiter un conflit ou un litige, également dans la sphère personnelle, est une épreuve qui prend à la fois beaucoup de temps et d’énergie. Cette situation peut créer une méfiance dans la relation aux autres, propice au risque de « dépersonnalisation ».

Vivre une situation de harcèlement moral ou sexuel peut aussi être un défi à relever tout en portant une « casquette RH ». La remise en question et la perte de confiance en soi contribuent alors à un possible épuisement émotionnel.

La frustration liée au manque de temps pour répondre aux besoins profonds des salariés sur des sujets tels que la QVT, la formation, la gestion des carrières et des compétences, peut nourrir une perte de sens quant aux motivations profondes du/de la professionnel·le des Ressources Humaines.

Les risques organisationnels liés aux métiers des Ressources Humaines

Si le télétravail est un bon moyen pour s’isoler et favoriser la concentration, à outrance il sert également la déconnexion humaine et peut contribuer à la « dépersonnalisation ».

La surcharge de travail, notamment administrative, et la complexification règlementaire, peuvent noyer l’essentiel dans des méandres chronophages. Le manque de valeur ajoutée risque alors de nourrir la perte de sens pour le/la professionnel.le des Ressources Humaines investi et animé par L’Humain.

Si les valeurs affichées par l’organisation ne correspondent pas à celles du/de la professionnel·le, ou pire, si elles ne sont qu’une obscure façade incitant à la loi du silence plus qu’à la politique de confidentialité, alors le/la professionnel.le des Ressources Humaines risquerait de se retrouver pris au piège d’une dichotomie culturelle française ancestrale opposant les « patrons » aux salariés.

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Les signes précurseurs du burnout chez les professionnel·les des Ressources Humaines

La symptomatologie du burnout est assez complexe et peu spécifique, mais peut évoluer vers la dépression ou l’anxiété si elle n’est pas détectée et prise en compte.

Les manifestations de l’épuisement professionnel, d’intensité variable selon les personnes, revêtent différentes formes.

Des réactions émotionnelles et comportementales dysfonctionnelles

Le/la professionnel·le des Ressources Humaines, alors même que l’Humain est au cœur de son métier, peut perdre son empathie, ressentir une tristesse inexpliquée, des frustrations plus fréquentes, voire du mépris et du dégoût contre lui-même ou son entourage.

Une forme de cynisme peut alors s’installer dans les échanges, y compris envers les personnes avec lesquelles le contact est pourtant habituellement agréable. Un sentiment d’impuissance, de vide, une perte de confiance en soi et de l’irritabilité sont aussi parfois observés.

Une motivation en berne

Derrière le désengagement et le repli sur soi, avec un possible dénigrement envers le travail des autres, se cache une perte profonde de sens dans les actions menées au quotidien. Les participations aux réunions, même utiles, deviennent un fardeau et les relations aux autres se complexifient.

Un cerveau en perte de vitesse

Même dans un environnement calme, il peut devenir difficile de se concentrer ou de retenir les informations, lors d’une réunion ou d’un entretien par exemple. La prise des décisions ou l’enchaînement de tâches pourtant simples, comme rédiger un mail, passer un appel ou organiser un RDV, deviennent délicats.

Le corps qui ne suit plus

Physiquement, la fatigue se généralise et les troubles du sommeil, les tensions musculaires, les maux de tête, de dos ou de ventre ne font qu’alimenter cette spirale énergivore descendante.

Attraper des virus à répétition témoigne d’une fragilité immunitaire qui, après un bilan avec le médecin éliminant d’autres causes, peuvent être des signes précurseurs au burnout.

Le stress est aussi anormalement présent et il peut devenir difficile de se lever le matin même après avoir eu l’impression de dormir.

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Comment prévenir le burnout chez les professionnel·les des Ressources Humaines ?

La prévention passe avant tout par l’information sur le sujet, ses risques et manifestions. Une fois alerté·e, il appartient à chacun.e d’être attentif·ve à soi-même et aux autres et d’adopter les bons comportements.

La prévention individuelle

Il est possible d’agir pour soi-même au travers de ces quelques pistes :

  • Faire le point (voir le test MBI en introduction) et repérer ses propres facteurs de risques.
  • Apprendre à bien se connaître, comprendre son mode de fonctionnement, et faire le point sur ses propres drivers et « auto-injonctions » : à quel équilibre se situent les messages intérieurs « sois parfait », « fais plaisir », « dépêche-toi », « fais des efforts », « sois fort », « il faut que », « je dois » ?
  • Repérer ses valeurs et leurs applications concrètes dans son quotidien permet de poser ses limites dans l’espace, le temps et ses relations.
  • Découper ses grands objectifs, tant professionnels que personnels, en petites actions et penser à chaque début d’activité, aussi courte soit elle, à vérifier son côté SMART (Spécifique, Mesurable, Atteignable, Réaliste, Temporel).
  • S’accorder le droit à l’erreur : tout n’est pas parfait et même si le/la professionnel.le des Ressources Humaines est souvent un « couteau suisse », il a le droit de ne pas tout connaître ni de tout maîtriser.
  • Se distinguer de son poste et de ses responsabilités associées, pour se reconnecter à sa personne tout en dissociant sa propre valeur de celle de sa rémunération.
  • Ralentir le rythme pour répondre aux signaux du corps, s’octroyer des véritables temps de pauses et/ou de sport et rétablir les habitudes propices à un sommeil réparateur.
  • Respirer par le ventre sur un rythme de dix secondes pour se recentrer et accueillir ses états émotionnels afin de mieux les comprendre.
  • Apprendre à se réénergiser en se créant une « bibliothèque de ressources » composée de tous les petits moments agréables de sa vie qui soutiennent dans les moments plus difficiles.

Les bons réflexes relationnels

Une fois le point sur soi réalisé, il est important d’exprimer son état et de maintenir des relations de qualité avec ces quelques réflexes :

  • Alerter son entourage en cas de détection d’un risque pour soi-même : ses proches, mais aussi son responsable et aussi ses collaborateurs en fonction du contexte. Et même si le/la professionnel.le des Ressources Humaines revêt un rôle particulier envers la médecine du travail, il reste avant tout un Être Humain qui a le droit de se tourner vers elle et/ou son médecin traitant afin d’obtenir des conseils personnalisés.
  • Demander de l’aide tant au niveau personnel que professionnel et se faire accompagner par son entreprise ou à l’extérieur avec un coaching, un sophrologue, une psychologue ou tout autre moyen adapté à son besoin.
  • Repérer et exprimer clairement ses besoins en utilisant le message « j’ai besoin de… » ou « je ressens… » pour clarifier son état et agir efficacement.
  • Repérer les injonctions paradoxales qui sont exercées par son entourage pour les clarifier ou les déjouer.
  • Dans les situations de tensions, penser à dissocier les personnes de leurs actes pour garder des liens de qualité et éviter le cynisme.
  • Distinguer la personne de la relation que l’on noue avec elle afin de conserver une distance tout en restant empathique.
  • Rester à l’écoute de la perception des autres et de leurs propres besoins qui peuvent parfois être de bons conseils ou des pistes de solutions pour soi-même.

Les actions favorisant l’environnement de travail

Des aspects d’ordre plus organisationnels permettent de réduire le risque de burnout :

  • Gérer au mieux son temps et ses priorités en s’outillant et automatisant les processus administratifs ou tâches répétitives chronophages.
  • Déléguer dans l’équipe tout ce qui est urgent, mais non important ou, à défaut, faire appel à des sous-traitants.
  • Si la délégation s’avère difficile, et plus largement, il est intéressant de repérer les objectifs prioritaires pour se centrer ensuite sur les actions ayant le plus d’impacts avec le moins d’énergie à déployer.
  • S’octroyer le droit à la déconnexion : retirer les notifications, se limiter dans le temps et stopper les écrans le soir au moins deux heures avant le coucher.
  • Favoriser l’environnement physique du poste : réduire le niveau de luminosité des écrans, mettre des huiles essentielles appropriées, écouter des musiques adaptées à son activité…
  • Éviter de morceler les activités démarrées : fermer la porte du bureau avec un message d’information, s’isoler dans une autre salle ou télétravailler sans abus
  • Cibler les réunions essentielles et se (faire) dispenser des autres.

Pour conclure

Prévenir le burnout implique une prise de recul et un recentrage sur soi. Faire preuve d’une grande résilience émotionnelle, compétence qui s’apprend et se développe tout au long de la vie, permet de « manager » son équipe émotionnelle intérieure avec efficience et ainsi éviter cet état.

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Bérangère Colignon

De formation supérieure et après un parcours de 15 ans en ressources humaines et management dans le secteur de la formation professionnelle pour les industries, Bérangère Colignon fonde Clart&Sens pour « clarifier et donner du sens à vos talents », un cabinet RH et organisme de formation qui applique l’intelligence émotionnelle et collective au cœur de vos ressources humaines profondes.