Actualité jurisprudentielle Avril 2023

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Pour ce mois d'avril 2023, nous vous proposons un décryptage de l'actualité jurisprudentielle sociale portant sur des sujets très divers et riches d'enseignements.

Auteur / Autrice

Juriste droit social, consultante et rédactrice juridique et RH

actualités droit social avril 2023
Sommaire de l'article

Dans l’actualité jurisprudentielle de ce mois d’avril, les thèmes abordés par les arrêts de la Cour de cassation sont particulièrement variés : inaptitude, conséquences de ne pas mentionner l’existence d’une période d’essai ou de ne pas préciser une durée de travail, CSP, attribution de titre-restaurant, salarié protégé. Allons ensemble faire le tour de ces sujets !

Inaptitude

Cass. soc. 29 mars 2023 n° 21-15.472

L’employeur est obligé d’aménager un poste en télétravail, préconisé par le médecin, si cet aménagement permet le reclassement d’un salarié inapte, peu importe que le télétravail n’ait pas été mis en place dans l’entreprise.

À l’issue de deux examens médicaux, une salariée est déclarée inapte à son poste puis licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Dans l’avis d’inaptitude, le médecin du travail préconisait le reclassement de la salarié inapte sur un poste en télétravail.

Contestant son licenciement, la salariée reproche à son employeur de ne pas avoir aménagé son poste en le transformant en emploi à domicile, malgré les recommandations du médecin du travail. L’employeur soutenait qu’il n’avait pas mis le télétravail en place dans l’entreprise. 

La Cour d’appel puis la Cour de cassation  donne raison à la salariée et approuve les juges du fond d’avoir déclaré abusif son licenciement aux motifs que l’employeur avait manqué à son obligation de reclassement en n’aménageant pas le poste occupé par le salarié en télétravail, bien que recommandé par le médecin du travail.

En effet, selon la Cour, il importe peu que le télétravail n’ait pas été mis en place au sein de l’entreprise, dès lors que l’aménagement du poste en télétravail peut être individuel et résulter d’un avenant au contrat de travail.

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Conséquences de l’absence d’écrit

Période d’essai

Cass. soc. 29-3-2023 n° 21-18.326 F-D. 

Il n’est possible de rompre une période d’essai que si elle est mentionnée au contrat.

Une salariée notifie à son employeur, moins d’un mois après sa prise de poste, qu’elle met fin à sa période d’essai et lui demande de mentionner sur son attestation Pole emploi « rupture de la période d’essai à l’initiative du salarié ». L’employeur refuse soutenant que l’intéressée n’avait pas signé de contrat de travail stipulant une période d’essai.

Saisie du litige, la Cour de cassation donne raison à l’employeur et rappelle que la période d’essai et la possibilité de la renouveler ne se présument pas, mais qu’elles sont expressément stipulées dans la lettre d’engagement ou le contrat de travail. 

Or, en l’espèce, les parties n’avaient pas signé de contrat de travail stipulant une période d’essai.  

En conséquence, le départ de la salariée pourrait potentiellement s’apparenter à un abandon de poste et la priver de tout droit aux allocations de chômage.

Durée du travail

Cass. soc. 29-3-2023 n° 21-23.491 F-D

Une salariée est engagée suivant plusieurs contrats à durée déterminée d’usage successifs.

La société ayant été placée en liquidation judiciaire, elle saisit la juridiction prud’homale afin d’obtenir la requalification de ses contrats en un contrat à durée indéterminée et le paiement de diverses sommes.

La Cour d’appel déboute la salariée de sa demande de rappel de salaire sur la base d’un temps plein.

la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel et rappelle que : 

– Le contrat de travail des salariés à temps partiel est un contrat écrit qui mentionne la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, la durée mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.

– L’absence d’écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l’emploi est à temps complet et il incombe à l’employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d’une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d’autre part, que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à la disposition de l’employeur. 

La Cour rappelle donc qu’en l’absence d’écrit, la charge de la preuve de la présomption de temps plein, revient à l’employeur et non au salarié.

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Adhésion au CSP 

Cass.soc. 05.04.2023, N°21-18.636

En cas d’acceptation par le salarié d’un CSP, l’employeur peut apporter des précisions sur le motif économique de la rupture dans un délai de 15 jours suivant l’adhésion du salarié au dispositif. 

Lors d’un entretien préalable au licenciement, deux salariées adhèrent à un contrat de sécurisation professionnelle dans lequel ne figurait pas la mention expresse de la suppression des postes de travail.

Moins de 15 jours après, l’employeur adresse aux salariées une « lettre de licenciement » dans laquelle est apportée la mention de la suppression des postes de travail des salariées.

À l’issue du délai de réflexion de 21 jours, la rupture de leur contrat de travail intervient.

Plus tard, les salariées saisissent la juridiction prud’homale et contestent la rupture de leur contrat de travail car, selon elles, les licenciements devaient être jugés comme étant sans cause réelle et sérieuse en raison d’une insuffisance de motivation du document remis le jour de l’entretien préalable.

La suite après la publicité

La Cour d’appel déboute les salariées de leur demande qui se pourvoient en cassation.

La question posée à la Cour de cassation est celle de savoir à partir de quel moment court le délai de 15 jours suite à la notification du licenciement, pour préciser les motifs du licenciement au sens de l’article L. 1235-2 du Code du travail, quand il s’agit d’une adhésion au CSP.

La Cour de cassation confirme la position de la Cour d’appel.

Après avoir rappelé qu’en vertu de l’article L. 1235-2 du Code du travail, les motifs énoncés dans la lettre de licenciement peuvent, après la notification de celle-ci, être précisés par l’employeur, soit à son initiative soit à la demande du salarié et que l’employeur dispose d’un délai de 15 jours « suivant la notification du licenciement » pour préciser les motifs du licenciement (art. R. 1233-2-2 du Code du travail), la Cour de cassation décide qu’en cas d’acceptation par le salarié du CSP, l’employeur peut apporter des précisions sur le motif économique de la rupture dans un délai de 15 jours suivant l’adhésion du salarié au dispositif. 

En l’espèce, l’employeur avait, dans les 15 jours à compter de leur acceptation du contrat de sécurisation professionnelle, précisé, dans un courrier adressée aux deux salariées, que les difficultés économiques invoquées dans les documents d’information qui leur avaient été remis, avaient pour conséquence la suppression de leur poste de travail. Aucun manquement ne pouvait donc être reproché à l’employeur.

Titre-restaurant

Cass.soc. 13 avril 2023, n°21-11.322, FS-B

Le salarié travaillant une demi-journée a droit à un titre-restaurant si son horaire de travail recoupe la pause déjeuner dans la plage horaire fixée par l’employeur, peu important qu’il ait effectivement pris sa pause déjeuner ou non au cours de cette demi-journée.

Par avenant, un salarié est autorisé à exercer ses fonctions selon un horaire hebdomadaire fixé à 36 heures sur quatre jours et demi. 

Quelques années plus tard, il saisit la juridiction prud’homale afin d’obtenir l’attribution d’un titre-restaurant pour chaque demi-journée travaillée passée et future. 

L’arrêt d’appel donne raison au salarié et condamne l’employeur à payer au salarié les titres-restaurant réclamés par le salarié et dont ce dernier pouvait bénéficier.

L’employeur se pourvoit en cassation.

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La Cour de cassation rejette le pourvoi.

Elle rappelle, qu’aux termes de l’article R. 3262-7 du Code du travail, un même salarié ne peut recevoir qu’un titre-restaurant par repas compris dans son horaire de travail journalier. Il en résulte que la seule condition à l’obtention du titre-restaurant est que le repas du salarié soit compris dans son horaire journalier. 

Or, en l’espèce, le salarié était autorisé à exercer ses fonctions selon un horaire hebdomadaire de trente-six heures en quatre jours et demi ; aucune disposition contractuelle ou conventionnelle n’imposait au salarié d’effectuer sa demi-journée de travail de façon continue et le fait que son horaire journalier du vendredi soit fixé sur une demi- journée n’empêchait pas l’attribution d’un titre-restaurant dès lors que, ses horaires de travail recoupaient nécessairement la pause déjeuner, dans la plage horaire fixée par l’employeur, peu important que le salarié ait effectivement pris ou non sa pause déjeuner. 

Salarié protégé

Cass.soc. 29 mars 2023, n°21-25.259

En cas de refus de licenciement du salarié protégé, la mise à pied doit être payée peu importe que celui-ci soit en arrêt maladie.

Un salarié protégé est convoqué à un entretien préalable en vue d’un licenciement et se voit notifier à cette occasion une mise à pied à titre conservatoire.

La même journée, ce salarié protégé est placé en arrêt de travail.

Une demande d’autorisation de licenciement est adressée à l’Inspection du travail qui la rejette. Un rappel de salaire est-il dû ?

La cour d’appel répond par la négative estimant que le salarié ayant perçu les IJSS, seul un complément de salaire doit être versé par l’employeur.

La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel. 

Elle rappelle qu’en cas de faute grave du salarié protégé, l’employeur a la possibilité de prononcer sa mise à pied à titre conservatoire, dans l’attente de la décision de l’inspection du travail quant à l’autorisation de licenciement. Si celle-ci est refusée, la mise à pied doit être payée.

Elle décide aussi que le rappel de salaire est dû, “peu important que le salarié ait pu être placé en arrêt maladie pendant cette même période”

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