Rappel du droit à la preuve aux prud’hommes
Aux prud’hommes, le droit à la preuve est un principe fondamental. En effet, la preuve est libre par défaut, sauf disposition légale contraire. Cela signifie que les parties impliquées dans un litige, qu’il s’agisse d’un employeur ou d’un salarié, ont la possibilité d’apporter toute preuve qu’elles jugent nécessaire pour défendre leur cas.
Cette liberté de preuve s’applique à tous les moyens de preuve disponibles, à l’exception des cas où la loi en dispose autrement. Cependant, cette liberté n’est pas absolue, car les preuves présentées doivent respecter le principe de loyauté. Ainsi, il est crucial que les éléments de preuve soumis au juge soient obtenus de manière légale et loyale, sans recourir à des pratiques frauduleuses ou déloyales.
Pour étayer leurs arguments, les parties en litige disposent de plusieurs modes de preuve. Parmi les plus couramment utilisés dans les litiges entre employeurs et salariés figurent la preuve écrite et la preuve testimoniale. La preuve écrite comprend divers documents tels que les contrats de travail, les correspondances, les mails, les SMS, ainsi que toute autre documentation pertinente liée à la relation de travail.
Ces documents doivent être obtenus et présentés de manière à respecter les exigences de loyauté et de validité juridique.
Quant à la preuve testimoniale, elle peut être apportée par le biais de témoignages ou d’attestations. Toutefois, ces témoignages doivent être précis, factuels et obtenus de manière volontaire, sans contrainte ni manipulation. De plus, les témoins doivent être conscients que leurs déclarations seront soumises à l’examen du juge et qu’ils peuvent être tenus responsables en cas de fausse déclaration.
Outre ces modes de preuve, d’autres moyens peuvent également être utilisés pour étayer un argument devant les prud’hommes. Par exemple, le constat d’huissier peut être un outil utile pour documenter des faits matériels ou des situations spécifiques relevant du litige.
Cependant, comme pour toute preuve, il est essentiel que le constat soit réalisé dans le respect des règles de procédure et de loyauté.
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Le droit à la preuve déloyale dans un conflit salarié / employeur
Comme souligné par l’Assemblée plénière dans son arrêt du 22 décembre 2023, certaines preuves illicites et déloyales peuvent désormais être admises devant le tribunal sous certaines conditions strictes.
Dans le contexte du droit du travail, bien qu’il ne soit pas toujours aisé de faire la distinction, on peut généralement considérer qu‘une preuve est jugée illicite lorsqu’elle porte atteinte à la vie privée du salarié, même si elle a été obtenue de manière licite.
En revanche, le critère de loyauté permettra d’écarter une preuve qui, bien que licite, aurait été obtenue par le biais de manœuvres ou de stratagèmes déloyaux.
Il est donc essentiel, dans les litiges prud’homaux, de veiller à ce que les preuves présentées respectent à la fois les exigences de légalité et de loyauté, afin d’assurer un déroulement équitable et éthique des procédures judiciaires.
L’affaire de la preuve déloyale aux prud’hommes
L’arrêt du 22 décembre 2023 de l’Assemblée plénière de la Cour de cassation a profondément modifié la façon dont la preuve déloyale est traitée dans les procès civils. Cette décision marque un tournant significatif en reconnaissant la recevabilité des preuves obtenues de manière déloyale, sous certaines conditions strictes.
Ce revirement de jurisprudence de la Cour de cassation s’aligne sur le droit européen, qui n’exclut pas systématiquement les preuves considérées comme déloyales. Cela a été le cas dans une affaire où un employeur a utilisé un enregistrement clandestin pour prouver la faute grave d’un salarié.
Dans une affaire récente datant du 17 janvier 2024, les juges ont appliqué les conditions posées par cette nouvelle jurisprudence en écartant un enregistrement clandestin d’un entretien du CHSCT, jugeant qu’il n’était pas indispensable aux débats.
En somme, la Cour de cassation permet désormais la présentation de preuves déloyales si elles sont essentielles à l’exercice des droits du justiciable et ne portent pas atteinte de manière disproportionnée aux droits fondamentaux de la partie adverse.
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