La modulation est un mode d’aménagement du temps de travail. En théorie, le terme de “modulation” n’existe plus depuis 2008. Il a été remplacé par celui, plus général, “d’aménagement du temps de travail” regroupant les dispositifs préexistants : modulation, cycles de travail, travail à temps partiel modulé…. Mais en pratique, ce terme reste fréquemment utilisé.
Grâce à ce dispositif, une entreprise peut s’affranchir du calcul hebdomadaire des heures de travail et aménager la durée du travail sur des périodes plus longues. L’entreprise reste soumise à la durée légale du travail de 35h par semaine. Mais celle-ci sera calculée sur une moyenne annuelle, par exemple, et non plus sur une semaine.
Cette souplesse lui permet donc d’être particulièrement adapté aux entreprises saisonnières ou soumises à des pics fréquents d’activités. Notamment, la modulation permet d’éviter le recours à l’activité partielle en cas de baisse d’activité ainsi que les heures supplémentaires pendant la haute saison.
La mise en place de la modulation s’inscrit dans le cadre de l’aménagement du temps de travail prévu par l’article L3121-41 du Code du travail.
Définition et entreprises concernées, mise en place, contenu de l’accord, conséquences …. Je vous propose dans cet article un point complet pour tout savoir sur la modulation du temps de travail.
La définition de la modulation du temps de travail.
Aménagement du temps de travail selon les besoins de l’entreprise.
L’aménagement variable du temps de travail autorise l’entreprise à répartir la durée du travail sur une période plus longue que la semaine, souvent sur l’année.
Elle peut ainsi alterner des phases de forte et de faible activité, en respectant une moyenne annuelle de 35 heures pour un temps plein.
Les semaines chargées peuvent dépasser les 35 heures, à condition d’être compensées plus tard.
Les plafonds légaux restent en vigueur : 10 heures par jour, 48 heures par semaine, un jour de repos hebdomadaire et une pause après 6 heures de travail.
Quelles sont les entreprises concernées ?
La modulation est un dispositif qui peut être mis en place par toutes les entreprises.
En pratique, elle est souvent utilisée dans les secteurs soumis à des variations régulières d’activités :
- Activités touristiques, loisirs, hébergement, etc.
- Agriculture.
- Secteurs liés aux vacances scolaires, activités pour les enfants, etc.
- Activités saisonnières diverses.
Comment mettre en place la modulation dans votre entreprise ?
L’aménagement variable du temps de travail s’applique à un groupe de salariés, jamais à une personne seule. Il doit concerner l’ensemble de l’entreprise ou un service identifié.
Sa mise en œuvre passe par un accord collectif (entreprise, branche ou convention) ou, à défaut, par une décision unilatérale de l’employeur.
Accord d’entreprise, de branche ou convention collective nationale.
L’instauration d’une modulation du temps de travail passe en priorité par un accord conclu au niveau de l’entreprise ou de l’établissement.
Cet accord doit ensuite être adressé à l’inspection du travail, qui vérifie sa conformité aux règles en vigueur. Les mentions devant y figurer seront détaillées plus loin.
À défaut d’accord d’entreprise, l’entreprise peut appliquer un accord de branche, mais cette solution reste secondaire et ne s’envisage que si aucun accord local n’existe. En cas de désaccord, l’accord d’entreprise prévaut toujours sur l’accord de branche.
En l’absence d’accord d’entreprise ou de branche, la modulation peut aussi être instaurée si elle est expressément prévue dans la convention collective applicable.
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Décision unilatérale de l’employeur.
En l’absence d’accord d’entreprise, de branche ou de CCN prévoyant la modulation, sa mise en place peut se faire par une décision unilatérale de l’employeur (C.trav.art.D. 3122-7-1 à D. 3122-7-3).
Attention : Une modulation mise en place sur décision de l’employeur ne permet pas d’aménager la période de travail sur une année. La durée maximale sera en effet de :
- 4 semaines pour les entreprises de plus de 50 salariés.
- 9 semaines pour les moins de 50 salariés.
Les aménagements doivent également respecter les limites légales du travail notamment la limite de 48 heures par semaine.
Cette mise en place de la modulation par l’employeur ne nécessite pas l’accord préalable des employés car les aménagements ne sont pas considérés comme une modification du contrat de travail.
Consultation obligatoire du CSE.
Quel que soit le mode de mise en place de la modulation (accord d’entreprise, décision de l’employeur …), l’information et la consultation du CSE sont obligatoires.
En effet, tout projet d’aménagement du temps de travail doit être soumis préalablement au CSE. Cette consultation pourra alors déboucher éventuellement sur un accord d’entreprise.
Si la modulation est mise en place directement par l’employeur, le CSE doit donner son avis sur le planning prévu pour l’aménagement du temps de travail.
En cas de modification, il devra à nouveau être consulté. L’employeur devra également communiquer au CSE une information annuelle sur l’aménagement des horaires.
Le contenu de l’accord ou de la décision de l’employeur.

Que ce soit dans l’accord ou dans la décision de l’employeur, l’acte doit contenir obligatoirement certaines mentions afin d’être valide (C.trav.art L3121-44).
La période de référence.
L’entreprise peut déterminer la période de référence la mieux adaptée à son activité et à son fonctionnement, dans le respect de certaines règles et limites.
Modulation mise en place par décision de l’employeur.
La période de référence maximale est de 4 semaines pour les entreprises de plus de 50 salariés. Elle peut aller jusqu’à 9 semaines pour les entreprises de moins de 50 salariés.
Modulation mise en place par accord collectif.
Dans le cadre d’un accord d’entreprise, la période de référence peut être prévue jusqu’à 1 an. En pratique, cette périodicité annuelle est en effet très courante.
En cas d’accord de branche et si celui-ci le prévoit expressément, la période de référence peut être portée jusqu’à 3 ans.
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Les limites de la durée du travail.
L’aménagement du temps de travail doit prévoir les différentes limites du temps de travail.
D’un point de vue annuel, la durée est généralement fixée à 1607 heures, correspondant à 35h/semaine ainsi qu’à la journée de solidarité.
L’accord ou la décision mentionne également les durées maximales, à savoir 10h par jour et 48h par semaine. Ces limites peuvent varier dans des cas exceptionnels, selon des dispositions prévues par la CCN ou sur autorisation de l’inspecteur du travail.
Conditions et délais de prévenance des changements de durée ou d’horaires de travail.
L’entreprise doit communiquer préalablement aux salariés le planning d’aménagement des horaires.
En l’absence de précisions particulières, ce délai est au minimum de 7 jours ouvrés. Dans les faits, il est souvent adapté aux besoins de l’entreprise. La CCN ou un accord peut prévoir un délai différent, afin de l’adapter au secteur d’activité.
Dans tous les cas, ce délai doit être expressément indiqué dans l’accord de mise en place.
Vigilance pour les temps partiel : un salarié à temps partiel, dont l’employeur ne respecte pas le délai de prévenance, peut demander la requalification de son contrat en temps plein, si cela le contraignait à rester à disposition permanente de l’entreprise.
Les conditions de prise en compte, pour la rémunération, des absences, arrivées et départs en cours de période.
La gestion des compteurs d’heures et de la rémunération peut s’avérer complexe lorsque le salarié n’effectue pas une année complète. Pour éviter tout questionnement ou conflit éventuel, il est indispensable de détailler au maximum ces modalités de calcul dans l’accord de mise en place.
Enfin, si l’accord concerne des temps partiels, il faut également mentionner les modalités de communication et de modification de la répartition de la durée du travail et des horaires.
Les conséquences de la modulation.
Comment calculer la rémunération du salarié ?
La modulation entraîne pour le salarié l’alternance entre des semaines ou des mois de basse activité et des périodes de haute activité.
Deux solutions sont alors possibles concernant sa rémunération :
- Rémunération en fonction de la durée du travail réellement effectuée dans le mois. Le salarié perçoit donc des rémunérations variables selon l’activité des différents mois de l’année.
- Lissage de la rémunération. Le salaire peut être lissé et calculé indépendamment de la durée du travail réelle du mois. Cette solution est davantage sécurisante pour le salarié. Il perçoit un salaire fixe toute l’année, correspondant à sa durée de travail contractuelle (sur une base de 35h s’il est à temps complet).
Comment décompter les heures supplémentaires ?
Dans le cadre d’une modulation sur l’année, le volume horaire d’un salarié correspondant à un temps plein est de 1607 heures.
Toutes les heures effectuées au-delà seront donc des heures supplémentaires. À chaque fin de période, l’employeur effectue un bilan de l’année. Il calcule les heures effectuées afin de régulariser le paiement d’éventuelles heures supplémentaires.
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Je lance mon diagnosticExemple : En fin de période, un salarié à temps plein a effectué 1620 heures de travail dans l’année. Il percevra donc 13 heures supplémentaires majorées à 25% (1620 h – 1607 h).
Les salariés à temps partiel bénéficient d’abord d’heures complémentaires dans la limite de 1/10° du volume horaire de leur contrat. Au-delà, il s’agit d’heures supplémentaires.
Notons qu’à défaut de dispositions conventionnelles spécifiques, les heures complémentaires sont majorées à 10%, puis les 8 premières heures supplémentaires à 25%.
Exemple : Salarié à temps partiel à 28 h hebdomadaires (80% d’un temps plein), soit 1285 heures annuelles. S’il effectue dans l’année 1420 heures de travail, il percevra : 128 heures complémentaires (10% de 1285h) et 7 heures supplémentaires (1420h – 1413h).
Pourquoi mettre en place la modulation ?
Organisation flexible adaptée aux besoins de l’entreprise.
La modulation offre à l’entreprise la possibilité d’ajuster l’organisation du travail selon les fluctuations de son activité.
Elle convient notamment aux secteurs soumis à des pics et creux réguliers, comme ceux qui dépendent des saisons.
Dans ce contexte, une répartition du temps de travail sur l’année se révèle souvent plus pertinente qu’un horaire hebdomadaire fixe de 35 heures.
Cela permet d’éviter les heures supplémentaires lors des périodes chargées ou de limiter les recrutements temporaires.
En instaurant un accord adapté, l’entreprise conserve une certaine latitude pour définir les règles de mise en œuvre et d’application, tout en respectant les plafonds légaux.
Ce mode d’organisation améliore sa capacité d’adaptation, sa réactivité commerciale et sa performance globale.
Pour les salariés, il peut offrir une certaine liberté : les périodes creuses deviennent l’occasion de se former, de se consacrer à d’autres activités ou d’exercer un second emploi.
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Éviter l’activité partielle.
Dans les secteurs saisonniers l’entreprise ne pourrait pas maintenir l’ensemble de ses emplois pendant la basse saison. Alors qu’en haute saison le temps de travail est souvent supérieur à 35h. L’annualisation du temps de travail peut donc éviter de recourir à l’activité partielle.
Ce dispositif sécurise à la fois l’entreprise, assurée d’avoir ses salariés au moment où elle en a besoin, mais également les salariés eux-mêmes, qui bénéficient d’une activité (et d’une rémunération) en toute saison.
Les inconvénients.
Mettre en place une modulation du temps de travail implique une gestion précise des plannings. L’employeur doit assurer un suivi rigoureux des heures effectuées par chaque salarié.
Il est donc essentiel de vérifier en amont que l’organisation interne, notamment les ressources humaines, est capable de suivre ce dispositif dans de bonnes conditions.
Le passage à un rythme de travail variable peut aussi représenter un changement pour les salariés, nécessitant une phase d’adaptation.
La réussite du dispositif repose en grande partie sur la clarté des règles fixées et la qualité des échanges.
Il est recommandé d’intégrer dans l’accord les modalités d’information des salariés, en particulier la transmission anticipée des plannings et un suivi transparent des heures travaillées.