Lorsque, le 24 décembre 2019, j’ai remis mon article à Culture RH autour des tendances de la formation en 2020, j’étais très loin de me douter des couleurs que prendrait cette année si particulière. J’introduisais cet article avec la phrase : « La formation est en perpétuelle évolution : elle reflète les mouvements de notre époque, qu’ils soient sociétaux ou technologiques. Et bouleverse régulièrement le quotidien de ceux qui la font… ». Cela fut on ne peut plus vrai cette année.
Un an plus tard, je ne peux évoquer avec vous les tendances de 2021 sans prendre le temps d’un arrêt sur image. Car 2020 aura eu un impact énorme sur la formation professionnelle continue, dont les conséquences vont continuer de se mesurer dans les années qui viennent.
C’est aussi pour cela que j’ai ajouté trois points de suspension au titre de cet article : parce que je crois que ces tendances se répercuteront sur plusieurs années et parce que j’ai appris aussi qu’on ne pouvait rien prévoir, qu’on ne pouvait qu’imaginer. Comme disent les anglais « Man plans and God laughs », l’Homme prévoit et Dieu rit.
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Je télécharge les 8 fiches# Tendance n°1 : La digitalisation de la formation.
Le confinement, les protocoles sanitaires, l’incertitude liée au retour à la vie « normale » ont donné un grand coup d’accélérateur à la digitalisation de la formation. Comment faire lorsque la distance devient la règle et que l’on veut continuer de former ses collaborateurs ?
En 2021 cette tendance à la digitalisation de la formation va s’accélérer : que ce soit sur un petit panel de formations ou sur des projets de plus grandes ampleurs, les organisations ont compris qu’il fallait passer au digital, en tout cas l’intégrer dans leurs pratiques.
Il n’est pas question ici de supprimer complètement l’apport du présentiel, son intérêt et son sens. Mais plutôt d’accompagner la formation à distance vers davantage de qualité et d’efficacité pédagogique.
Vite fait, bien fait ?
Nous l’aurons tous vécu avec plus ou moins de succès : on ne digitalise pas une formation en déportant le présentiel devant une webcam. Animer une classe virtuelle, imaginer un parcours de formation entièrement à distance, mettre à disposition des ressources ne s’improvise pas.
La formation à distance ne porte pas ce nom uniquement parce qu’elle a lieu à distance, elle désigne aussi des modalités pédagogiques qui lui sont propres, une manière de penser et de structurer le contenu, qui sont assez différentes du présentiel.
Bien sûr, beaucoup vont surfer sur la vague, vous proposer des formations digitales, impliquantes et ludiques. Regardez de près ces offres… Souvent elles n’ont de digitales que le nom et n’ont pas été pensées comme telles.
Les classes virtuelles durent 3 heures sans pause et consistent surtout à écouter le formateur parler. Il n’y a pas de tutorat, pas d’espace d’échanges. Les modules e-learning n’ont pas de scénarisation impliquant. Là aussi, on a fait vite pour répondre à la demande. Or la formation à distance peut s’avérer une formation de qualité si elle respecte les règles pédagogiques qui la régissent.
Former les formateurs.
De la même façon qu’on ne s’improvise pas formateur du jour au lendemain et que l’on doit être formé pour animer, il faut, là aussi, accompagner les formateurs à monter en compétences sur ces sujets. Leur donner des clés pour gérer un groupe à distance, pour préparer son espace d’intervention lors d’une classe virtuelle (non la contre-plongée n’est pas artistique dans ce cas, oui c’est perturbant de porter un pull bariolé pour passer devant la webcam et oui on voit en arrière-plan que le lit n’est pas fait et que la pile de linge sale posée dessus est tombée au bout d’une demi-heure d’intervention).
Formateur à distance demande des compétences spécifiques qu’il ne faut pas négliger ! Il faut aussi accompagner ce changement profond de posture pour les formateurs expérimentés, qui doivent remettre en cause leurs pratiques professionnelles pour s’adapter aux nouvelles contraintes de la formation à distance.
Ce « changement de paradigme » n’est pas simple à appréhender, et un accompagnement de qualité, bienveillant et dédramatisant est souvent indispensable !
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Rome ne s’est pas faite en un jour…
… votre formation digitale non plus ! Il faut accepter que la digitalisation de la formation prenne du temps et s’inscrit dans une stratégie d’entreprise.
Bien sûr qu’il faut pallier aux « urgences », que la suspension des présentiels nécessite de proposer des solutions rapides. Mais on peut aussi profiter de l’opportunité pour poser les choses à plat et voir dans quelle direction aller : même si le présentiel redevient possible -et c’est souhaitable ! -, la formation digitale ne va pas disparaître.
Alors penser son projet, intégrer les acteurs en amont, choisir ses outils avec soin en fonction de ses besoins, sans se précipiter sur la première plateforme venue… tout cela s’avérera payant à terme ! Car vous aurez pris le temps de comprendre les enjeux de ces nouveaux formats, les challenges et les contraintes auxquels vous devrez faire face, d’identifier par où commencer et bien sûr d’impliquer le plus de collaborateurs possible.
Blended, ô mon blended quelle est la meilleure formation ?
Toute l’expérience de la formation à distance pourra être exploitée au mieux lorsque les présentiels redémarreront, notamment avec des formats enrichis et des compléments digitaux.
Les avantages de la distance pour accompagner et « entourer » le temps en présence se feront sentir : ressources complémentaires, travaux de groupes, classes virtuelles de suivi, retours d’expériences….
La formation blended permet de renforcer encore l’impact de la formation dans la vie professionnelle des participants, en continuant le lien entre leurs expériences et la formation.
# Tendance n°2 : La fracture numérique.
Peut-être trouverez-vous étrange de mentionner la fracture numérique comme une tendance de 2021. J’en parle parce que je suis persuadée que c’est un challenge sous-estimé et qu’il va être au cœur des questions liées notamment à la digitalisation de la formation.
2020 a mis en avant que nous n’étions pas tous égaux face à la technologie. Que nous n’étions pas tous égaux sur trois points :
- L’accès à une connexion internet haut débit.
- L’accès à du matériel informatique permettant de participer à une formation (accès à un micro, à une webcam).
- L’aisance dans l’utilisation des outils.
Et enfin qu’il ne fallait pas sous-estimer les freins, les inquiétudes et la difficulté à investir ce changement de culture et de posture.
“Et là , vous m’entendez ?”
Nous l’avons vu avec les nombreuses classes virtuelles ou les visioconférences : nous n’avons pas tous les mêmes accès à la technologie. Que ce soit sur la qualité du réseau (j’ai une pensée ici pour un participant à une classe virtuelle, en Ardèche, au bout de la ligne ADSL, contraint d’écouter la réunion via le téléphone fixe, qui finira par lâcher, lui aussi, à cause de chutes de neige) ou sur le fait de disposer d’un ordinateur avec micro et webcam.
Ce sont les premiers freins à la valorisation de la formation à distance. Elle n’est pas accessible à tous dans les mêmes conditions. Et ce qui va être facile pour certains (flux audio et vidéo fluides), s’avérera beaucoup plus complexe pour d’autres (obligés de n’avoir que le son et pas l’image car le réseau n’est pas assez rapide).
Il est important de le prendre en compte notamment pour les formats que l’on va proposer : est-on vraiment « universel » ?
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Nous ne sommes pas tous égaux non plus quant à la prise en main des outils. D’autant plus qu’il n’y a pas un outil unique qui servirait à chaque fois. Mais qu’en fonction des contextes, des demandes, vous pouvez passer de Zoom à Teams, ou d’Adobe Connect à Big Blue Button.
Et que vous soyez formateur ou participant, il faut à chaque fois vous adapter à un nouvel environnement. Certes on retrouve des fonctionnalités de base communes à tous les outils. Mais chacun d’eux a aussi ses spécificités, ses comportements, les choses que vous pouvez faire avec l’un et pas avec l’autre.
On laisse souvent de côté le temps « en amont » pour s’assurer que tout le monde est suffisamment à l’aise avec l’outil utilisé, qu’il l’a testé, que sa configuration matérielle est bonne et qu’il n’y a pas de difficulté à brancher micro ou caméra.
Ce temps-là « passe à la trappe » et c’est dommage, car il impacte forcément le déroulé de l’intervention qui suivra. Une idée peut être d’intégrer ce temps de préparation au temps de la classe virtuelle par exemple : un rendez-vous fixé à 9h permettra en fait de démarrer la classe à 9h15, une fois que tout aura été vérifié.
Là aussi, la montée en compétences des formateurs sur les outils digitaux est clé.
À vos marques, prêts ? Changez !
L’un des gros enjeux de 2021 sera indubitablement l’accompagnement du changement sur tous ces sujets. La prise en compte des freins technologiques, des peurs, des résistances… Accompagner, expliquer, communiquer, impliquer seront des étapes déterminantes dans la réussite de vos projets de formation digitale.
2020 a « forcé » l’utilisation du digital. Beaucoup n’étaient pas prêts, ne le sont toujours pas d’ailleurs. Notamment parce que ce passage s’est fait au forceps, dans un contexte mondial terrifiant et inconnu. Tous ces changements d’habitude, ces bouleversements, ces coupures de liens, tout a eu lieu en même temps.
La formation digitale, même en plein essor, reste liée à ce climat anxiogène. 2021 devra donc lui redonner des lettres de noblesse en montrant pourquoi elle a sa place dans un dispositif de formation, même lorsque la situation sanitaire se sera apaisée.
Pour résumer.
2021 continuera de refléter les changements profonds que la crise sanitaire a impulsé autour de la formation professionnelle. La digitalisation de la formation sera la tendance forte de ces douze prochains mois.
Les formats pédagogiques vont se multiplier pour s’adresser à des publics toujours plus hétérogènes : formats plus courts, plus ludiques, plus impactants, formats plus faciles à produire.
J’aime penser la formation digitale comme une cuisine extraordinaire où tous les ingrédients sont à portée de main et qu’il suffit de les mélanger pour obtenir à chaque fois un plat différent, adapté à chacun des gourmets autour de la table.
Plus que jamais enfin, je vois la formation comme une créatrice de liens. Entre les gens, entre la communauté apprenante et son formateur, entre son expérience professionnelle et de nouvelles connaissances. Nous avons tant besoin de ces liens pour avancer que la formation doit continuer d’être au rendez-vous de nos attentes.