Que cela soit à l’occasion de la tenue des premières élections ou lors des réélections professionnelles, la négociation du protocole d’accord préélectoral (le PAP) est une étape obligatoire du processus d’élections.
Élément central qui pose le cadre du déroulé des élections professionnelles, ce dernier peut invalider l’ensemble de votre process électoral si les conditions de forme et de fond ne sont pas respectées. Alors comment sécuriser la négociation de votre PAP ? Nous vous disons tout !
Le protocole d’accord préélectoral : quelques rappels
Le PAP n’est pas une simple formalité administrative à laquelle vous ne pouvez échapper. Souvent qualifié d’inutile et réalisé dans l’urgence, le protocole d’accord préélectoral donne pourtant le « la » à vos élections professionnelles et peut même empêcher la tenue de votre scrutin.
Quelles sont les règles de validité du PAP et comment organiser sa négociation ?
Qu’est-ce que le PAP ?
Le protocole d’accord préélectoral est un document qui présente les modalités d’organisation et de scrutin des élections professionnelles à venir. Il doit être issu de la consultation entre les organisations syndicales et la direction de l’entreprise.
Lors de cette négociation, différents sujets devront être abordés et notamment :
- « La présentation des effectifs permettant de déterminer le nombre de collège.
- La répartition du personnel et des sièges entre les collèges. Article L. 2314-13 du Code du travail.
- Les modalités d’organisation et de déroulement des opérations électorales. Article L. 2314-28 du Code du travail.
- Les critères ouvrant les droits d’électeur et ceux ouvrant droit à l’éligibilité.
- L’éventuelle augmentation du nombre de siège par rapport aux seuils réglementaires. Article L. 2314-1 du Code du travail. »
À noter que l’employeur doit présenter lors de la négociation du PAP la proportion d’hommes et de femmes au sein de son effectif.
Quand doit-il être négocié ?
Le PAP doit être négocié avant la tenue des élections professionnelles, puisqu’il déterminera les modalités de scrutin et son organisation.
La négociation est à l’initiative de l’employeur qui a la charge d’avertir et d’inviter les organisations syndicales à se présenter pour débattre des différents sujets en lien avec ces élections professionnelles. Les organisations syndicales doivent disposer d’un délai minimum de 15 jours entre la première présentation de l’invitation et la date effective de la négociation.
À noter que la négociation du PAP peut nécessiter la tenue de plusieurs réunions, il est donc conseillé d’envisager cette possibilité dans la détermination de votre rétroplanning électoral.
Qui faut-il inviter lors de cette négociation ?
L’employeur est tenu d’inviter les organisations syndicales à la négociation du PAP par tout moyen, pour certaines d’entre elles, à savoir par affichage, courriel ou courrier simple, et par courrier pour les autres.
Dans tous les cas, et par souci d’élément de preuve en cas de contestation, nous vous conseillons d’inviter l’ensemble des organisations syndicales par courrier recommandé avec accusé de réception.
Selon l’article L. 2314-5 du Code du travail, l’employeur devra convier à la négociation les organisations syndicales répondant aux critères suivants :
- « Les organisations syndicales qui satisfont aux critères de respect des valeurs républicaines et d’indépendance, légalement constituées depuis au moins deux ans et dont le champ professionnel et géographique couvre l’entreprise ou l’établissement concernés.
- Les organisations syndicales reconnues représentatives dans l’entreprise ou l’établissement.
- Les organisations syndicales ayant constitué une section syndicale dans l’entreprise ou l’établissement.
- Les syndicats affiliés à une organisation syndicale représentative au niveau national et interprofessionnel. »
Non présentation des organisations syndicales, que faire ?
Dans le cas où l’employeur a respecté ses obligations d’invitation et qu’aucune organisation syndicale ne se présente le jour de la négociation, il peut, après l’attente d’un délai raisonnable, convenir que ces dernières ne se présenteront pas.
Dans ce cas, l’employeur prend la responsabilité de l’établissement du PAP via un process de décision unilatérale de l’employeur. Il reprendra alors l’ensemble des clauses devant être présentes dans le PAP et conviendra de leur contenu.
Quelles sont les règles de validité du PAP ?
Le PAP ne répond pas seulement à des critères de validité de convocation et de contenu, il répond également à des critères de validité en ce qui concerne l’adoption des sujets évoqués.
En effet, pour que le PAP soit valide, les organisations syndicales devront signifier leur accord sur son contenu. Et en fonction des sujets, les règles de validité de l’accord ne seront pas les mêmes.
Ainsi, certaines clauses seront soumises à la double majorité, à savoir que leur validité sera reconnue par la signature de : « la majorité des organisations syndicales présentent au moment des négociations du protocole et par la signature de la majorité des organisations syndicales ayant obtenu, durant les élections professionnelles, la majorité des votes exprimés, ou à défaut par la majorité des organisations représentatives dans l’entreprise.
Certaines clauses demanderont, elles, une signature unanime des organisations syndicales représentatives afin d’être valides.
Clauses à double majorité
Seront soumises à la condition de validité de double majorité, les clauses suivantes :
- La répartition des membres du personnel entre les différents collèges, ainsi que la répartition des sièges à l’intérieur de ces collèges.
- Les modalités d’organisation et de déroulement des opérations électorales, comme la date des différents scrutins, la date limite de dépôt des professions de foi des candidats …
- Le cas échéant, l’augmentation du nombre de candidat à élire, la modification du nombre de membres élus au CSE ainsi que la modification du nombre d’heures de délégation de ces représentants.
- L’organisation du vote électronique et/ou du vote par correspondance si ces modalités sont prévues.
- Les mesures à destination des salariés isolés et ceux travaillant en équipes successives afin de faciliter leur accès au scrutin.
Clauses soumises à l’unanimité
Seront soumises à la condition d’unanimité les clauses en lien avec :
- La modification du nombre de collèges électoraux à élire et/ou leur composition. Article L. 2314-12 du Code de travail.
- La tenue du scrutin sur une période en dehors du temps de travail des collaborateurs. Article L. 2314-27 du Code du travail.
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Le PAP peut-il être contesté ?
Oui, le PAP peut être contesté par différents acteurs et à différentes étapes du process.
Ainsi, durant les négociations, il se peut qu’employeur et organisations syndicales ne parviennent pas à un consensus. Dans ce cas, l’une des parties aura la possibilité de saisir l’autorité administrative compétente afin que cette dernière puisse arbitrer la ou les clauses portant à désaccord.
Durant la période de saisie, le processus électoral est suspendu.
Une fois le PAP négocié, la contestation reste possible par l’employeur ou son représentant, par les organisations syndicales, par les électeurs eux-mêmes et les candidats (dans le périmètre de leurs collèges respectifs) devant le tribunal d’instance. Cette contestation peut porter sur les candidatures, les listes électorales, le déroulement du vote ou une décision prise par la DREETS.
En fonction de la contestation et de sa validité, le PAP peut être invalidé et donc invalider par là même les élections professionnelles.
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Comme nous venons de le voir, le PAP peut faire l’objet de différentes contestations, tant par ceux qui l’ont négocié que par ceux qu’il intéresse, à savoir les candidats et électeurs.
Les conséquences de ces contestations peuvent avoir de graves répercussions sur l’entreprise et l’organisation de son dialogue social, il est donc indispensable de prendre le temps de négocier cette étape dans les règles de l’art.
Alors, comment négocier le PAP dans de bonnes conditions ?
Étape 1 : Préparer l’ensemble des informations en amont
Une décision de la Cour de cassation (Cass.soc. 12.07.22, n°21-11.420) rappelle que pour être valide, les négociations du PAP doivent être loyales, c’est-à-dire qu’il est nécessaire que les parties démontrent une réelle volonté de négocier et qu’elles disposent l’une et l’autre de l’ensemble des informations permettant la négociation.
En amont de la première réunion de négociation, l’employeur devra alors rassembler les informations qui permettront aux organisations syndicales de déterminer les effectifs de l’entreprise et le cas échéant de ses différents établissements, mais aussi de déterminer les classifications professionnelles des effectifs afin de procéder à la répartition entre les différents collèges.
En fonction des effectifs et de l’existence de différents établissements, ces informations peuvent être nombreuses et demander une certaine rigueur administrative. Cette préparation doit donc intervenir en amont afin que les organisations syndicales puissent disposer du temps nécessaire à leur étude.
Étape 2 : Accorder du temps à la négociation
En fonction de vos effectifs, de l’organisation de la société, mais aussi en fonction du climat social régnant au sein de vos établissements, les négociations du PAP peuvent être plus ou moins longues.
Toujours dans un souci de loyauté des négociations, l’employeur ne peut s’opposer à la tenue de plusieurs réunions de négociation. Ainsi, lorsque vous présenterez votre planning prévisionnel des élections professionnelles, intégrez cette possibilité et ne précipitez pas la tenue du premier tour.
De même, lorsque vous planifiez les réunions de négociation, prévoyez d’y passer votre journée et soumettez les différents horaires : pauses, déjeuner et de fin de journée théorique, à l’ensemble des organisations présentes pour recueil de leur aval.
Étape 3 : Négocier dans de bonnes conditions
Au-delà de l’aspect temps, la logistique de la négociation est tout aussi importante. Assurez-vous donc que ces dernières se dérouleront dans de bonnes conditions.
Salle avec un espace suffisant pour accueillir l’ensemble des organisations syndicales, siège en nombre suffisant, aération de la salle possible, eau à disposition ou point d’eau à proximité, etc.
Autant de détails qui peuvent sensiblement améliorer les choses.
Étape 4 : Rester à l’écoute les uns des autres et se préparer à faire des compromis
Comme le nom de l’article l’indique, il s’agit de négociations et qui dit négociation, dit écoute et compromis.
Il se peut que vous arriviez avec un projet qui soit intégralement construit et qui n’a plus qu’à recueillir la signature de tous. Seulement voilà, il est possible qu’une ou plusieurs organisations syndicales vous demandent de revoir votre copie : nouvelles répartitions des sièges et des collèges, aménagement des heures d’ouverture du scrutin, intégration du vote électronique …
Vous devez vous préparer à cette éventualité et prendre en considération les remarques et retours des organisations syndicales. Acceptez d’entendre leur point de vue et faites en sorte de tendre vers un compromis. Si chaque partie fait un pas vers l’autre, il est certain que vous vous retrouverez à mi-chemin.
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