Pour venir au secours financier des entreprises confrontées à la crise sanitaire du Covid-19, le gouvernement a mis en place un exceptionnel dispositif d’activité partielle, avec effet rétroactif à compter du 1er mars 2020, et en a largement facilité l’accès aux employeurs.
En effet, le décret N° 2020-325 du 25 mars 2020 relatif au dispositif d’activité partielle en a simplifié la procédure de recours, réduit le délai de traitement de la demande par la Direccte à 48H et amélioré le montant de l’allocation.
Activité partielle: Rappel
Pour soutenir financièrement les entreprises durant la crise du Coronavirus, le gouvernement a mis en place de nouvelles règles pour faciliter l’accès au chômage partiel, applicables à compter du 1er mars 2020 .
Pour rappel, l’activité partielle est un dispositif légal (art. L.5122-1 et suiv. C.Trav.) de prévention des licenciements économiques, qui permet à l’employeur dont l’entreprise est contrainte de réduire ou suspendre temporairement son activité, de placer tout ou partie de ses salariés en position d’activité partielle et de faire prendre en charge par l’Etat tout ou partie du coût de leur rémunération afin d’éviter d’avoir à les licencier.Â
Toutes les entreprises sont potentiellement concernées par cette procédure, quel que soit leur effectif.
Le dispositif d’activité partielle peut être sollicité par les entreprises dans les cas suivants :
- Conjoncture économique
- Difficultés d’approvisionnement
- Sinistres ou intempéries de caractère exceptionnel
- Transformation, restruturation ou modernisation d’entreprise
- Toute circonstance de caractère exceptionnel type Coronavirus
Et en pratique, le chômage partiel peut prendre deux formes :
- Soit un arrêt total de l’activité des salariés: le contrat de travail est alors suspendu et on parle, dans ce cas, de chômage partiel total.
- Soit une réduction du temps de travail hebdomadaire.
Cependant, un salarié, à la demande de l’employeur, peut très bien alterner des périodes de chômage partiel avec des périodes d’activité.
Durant cette période d’activité partielle, l’employeur verse au salarié une indemnité en lieu et place  du salaire. En contrepartie, l’État garantit à l’employeur une prise en charge partielle de l’indemnisation des heures chômées ( 70% de la rémunération brute par heure chômée ou 84% du salaire horaire net) dans la limite de 1000 heures par salarié et par an, ou de 100 heures en cas de transformation, restructuration ou modernisation de l’entreprise.
L’employeur dispose d’un délai de 30 jours à compter du placement des salariés en activité partielle pour déposer sa demande sur le portail prévu par le gouvernement à cet effet. La Direccte, autorité administrative, dispose de 48 heures pour valider la demande. À défaut de réponse, la demande est implicitement validée.
La constitution de fraude à l’activité partielle et ses diverses formes
Principe: Incompatibilité du travail et de l’activité partielle
L’activité partielle entraîne la suspension du contrat de travail et n’est donc pas compatible avec le télétravail.
S’il s’agit d’une réduction de l’activité et non d’une suspension totale d’activité, les salariés peuvent cependant continuer à travailler pendant leurs heures non chômées tandis que les heures chômées doivent être respectées et indemnisées.
En revanche, un salarié, dont l’activité est totalement suspendue par l’employeur, ne peut, en aucun cas, se voir imposer de travailler sur son lieu de travail ou à distance.
Le ministère du Travail l’a d’ailleurs clairement rappelé dans un communiqué du 30 mars 2020 : « La mise en activité partielle des salariés n’est pas compatible avec le télétravail. Lorsqu’un employeur demande à un salarié de télétravailler pendant ses heures chômées, cela s’apparente à une fraude et est assimilé à du travail illégal. »
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Je télécharge les 8 fichesPar conséquent, le salarié en activité partielle totale qui refuse de travailler, à la demande illégale de son employeur, pendant ses heures chômées, ne commet aucune faute et ne peut donc faire l’objet d’aucune mesure disciplinaire.
Quelles formes peut prendre la fraude à l’activité partielle?
De nombreuses fraudes sont à déplorer, facilitées par des procédures simplifiées, un afflux de demandes dans un contexte pandémique sans précédent et un contrôle quasiment nul des demandes. Ces fraudes peuvent revêtir plusieurs formes :
- l’employeur a recours à l’activité partielle  des salariés, tout en leur demandant de travailler pendant les heures chômées,
- L’employeur continue à faire travailler les salariés normalement, en télétravail ou sur place, sans les prévenir de la mise en place du dispositif d’activité partielle dans l’entreprise et/ou en déclarant des heures non travaillées ou en ne déclarant pas les heures travaillées.
- Les salariés sont en congés payés imposés ou en RTT, mais l’employeur déclare des heures non travaillées.
- promesse d’un maintien de salaire à 100%, sous forme d’une promesse de prime, si le salarié continue à travailler normalement, malgré le chômage partiel.Â
- Fraude sur les congés maladie : le salarié est en congé maladie et en même temps, l’employeur demande des indemnités pour activité partielle
- Fraude sur le nombre d’heures : l’employeur déclare plus d’heures en activité partielle que d’heures effectivement chômées ou des taux horaires supérieurs au taux réel.
-  demandes de remboursement majorées par rapport au montant des salaires effectivement payés .Â
Comment peut être repérée la fraude à l’activité partielle?
Le dispositif d’activité partielle étant déclaratif, l’entreprise déclare, chaque fin de mois, à l’État le nombre d’heures travaillées et non travaillées de ses salariés, mais également le nombre de salariés potentiellement couverts par la mesure.
La fraude à l’activité partielle peut se constater lors de cette double déclaration.
Les dénonciations de fraude auprès de la Direccte
Le ministère du Travail a invité tous les salariés et les représentants du personnel à signaler à l’Inspection du travail et aux Direccte, tout cas de non respect des règles du dispositif d’activité partielle.
Plan de contrôle du gouvernement pour lutter contre les fraudes éventuelles
Ces fraudes ont amené le gouvernement à charger les inspections du travail à renforcer les contrôles de demandes d’indemnisation faites par les entreprises ayant eu recours à l’activité partielle ces deux derniers mois. Une instruction du 5 mai 2020 émanant directement du Ministère du Travail détaille un plan des contrôles qui seront effectués.
Ce plan de contrôle soumis aux DIRECCTE (Direction régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi) comporte un double objectif. Les Direccte devront distinguer:
- les entreprises qui, de bonne foi, ont effectué, des erreurs en renseignant leurs demandes d’indemnisation de chômage partiel
- les entreprises qui ont fraudé intentionnellement.
En cas de bonne foi de l’entreprise
L’entreprise est alors invitée à régulariser, à l’amiable, sa déclaration, conformément au principe du droit à l’erreur accordé par le Gouvernement.
En effet, le Ministère du travail reconnait la difficulté pour les entreprises de recourir à ce dispositif, pour la première fois pour beaucoup d’entre elles, dont les règles ont été, à de multiples reprises, modifiées (on dénombre 8 phases de modifications entre le 1er avril 2020 et le 10 mai 2020).
Les modalités de remboursement des sommes dues devront ainsi tenir compte de la situation financière de l’entreprise et des solutions d’accompagnement pourront être proposées, notamment pour les entreprises en difficulté.
En cas de fraude de l’entreprise
L’élément constitutif de la fraude devra être constitué.
De quelle manière ?
L’article L5124-1 du Code du Travail dispose:
« Sauf constitution éventuelle du délit d’escroquerie, défini et sanctionné à l’article 313-1, au 5° de l’article 313-2 et à l’article 313-3 du code pénal, le fait de bénéficier ou de tenter de bénéficier frauduleusement des allocations mentionnées aux articles L5122-1 et L. 5123-2 du présent code est puni des peines prévues à l’article 441-6 du code pénal. Le fait de faire obtenir frauduleusement ou de tenter de faire obtenir frauduleusement ces allocations est puni de la même peine »
L’article 441- 6 du Code pénal complète l’article du Code du travail précédent et dispose en son alinéa 2 :
« Est puni des mêmes peines le fait de fournir sciemment une fausse déclaration ou une déclaration incomplète en vue d’obtenir ou de tenter d’obtenir, de faire obtenir ou de tenter de faire obtenir d’une personne publique, d’un organisme de protection sociale ou d’un organisme chargé d’une mission de service public une allocation, une prestation, un paiement ou un avantage indu ».
Ainsi, une déclaration faite à l’administration et le caractère mensonger de cette déclaration sont les deux éléments constitutifs du délit de fausse déclaration faite à l’administration aux fins d’obtenir un avantage indu et qui, dans le cas de fraude au chômage partiel, consiste à profiter de l’aide publique tout en limitant la perte d’exploitation.
Quelles sanctions en cas de fraude ?
Sanctions à l’encontre des entreprises
A l’issue de ces contrôles et en cas de fraude, les Direccte peuvent prendre les décisions ou sanctions administratives et/ou pénales suivantes :
- Retrait de la décision administrative d’autorisation d’activité partielle
- Retrait de la décision administrative d’indemnisation
- Remboursement intégral des sommes perçues au titre de l’activité partielle
- Sanctions administratives avec interdiction de bénéficier, pendant une durée maximale de 5 ans, d’aides publiques en matière d’emploi ou de formation professionnelle.
- Sanctions pénales pouvant aller jusqu’à 2 ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende (art .441-6 C.pénal)
Actions possibles du salarié.
Le salarié peut également avoir intérêt à agir devant le Conseil de prud’hommes.
En effet, le salarié, s’il a travaillé pour l’employeur durant des heures déclarées en chômage partiel, peut réclamer un rappel de salaire correspondant à la différence entre le montant du salaire qu’il aurait dû percevoir et le montant de l’indemnité d’activité partielle qui lui a été versée.
A condition que le caractère intentionnel de la dissimulation des heures dissimulées, le salarié peut également solliciter une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé égale au minimum à six mois de salaire lorsque l’employeur a déclaré un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli.
Le salarié peut enfin faire une demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ou pour préjudice moral, préjudice qu’il devra démontrer.