La pĂ©riode d’essai est un dispositif facultatif. Elle permet Ă l’employeur d’Ă©valuer les compĂ©tences du salariĂ© et Ă celui ci d’apprĂ©cier si son nouveau poste lui convient. En cas de souci, chacune des parties peut mettre fin unilatĂ©ralement et sans motif Ă la relation de travail. Dans les faits elle concerne donc l’essentiel des contrats de travail.
MalgrĂ© cette simplicitĂ© apparente, la pĂ©riode d’essai doit ĂŞtre maniĂ©e avec prĂ©caution. Les litiges devant le conseil de prud’hommes sont d’ailleurs nombreux Ă ce sujet.
Pour que tout se passe bien, il est important pour l’employeur comme pour le salariĂ© de bien connaitre tous les aspects de la pĂ©riode d’essai. Quelle est sa durĂ©e ? Peut-elle ĂŞtre prolongĂ©e ou renouvelĂ©e ? Comment la rompre de manière anticipĂ©e ? etc.
Autant de questions auxquelles je vous propose de répondre dans cet article, consacré spécifiquement aux CDI.
DĂ©couvrez Ă©galement notre article dĂ©diĂ© Ă la pĂ©riode d’essai CDD.
Durée de la période essai CDI
Durée initiale
Le code du travail prévoit les durées suivantes (art L1221-19) :
- 2 mois pour les ouvriers et employés
- 3 mois pour les techniciens et agents de maîtrise
- 4 mois pour les cadres
Ces durées sont normalement impératives. Elles doivent être obligatoirement respectées.
Néammoins, il est envisageable de prévoir des durées plus longues ou plus courtes mais dans des cas strictement définis (art L1221-22) :
- Durées plus longues, uniquement si elles sont prévues par des accords de branches étendus conclus avant le 26 juin 2008
- Durées plus courtes, valables si elles sont prévues par le contrat de travail ou par un accord de branche conclus après le 26 juin 2008
Pourquoi cette date du 26 juin 2008 ? Il s’agit de la date de publication de la loi du 25 juin 2008. Cette loi a introduit des nouveautĂ©s majeures concernant la pĂ©riode d’essai, notamment les durĂ©es dĂ©sormais inscrites dans le code du travail. Auparavant, elles n’Ă©taient prĂ©vues que par les contrats de travail ou les conventions collectives. Cela est toujours possible mais dans des conditions prĂ©cises, en fonction de la date de signature de ces textes, postĂ©rieure ou antĂ©rieure Ă la loi.
DĂ©compte de la pĂ©riode d’essai
Une fois que la durée est établie, il est important de savoir comment la décompter.
La cour de cassation a pris une position simple. La pĂ©riode d’essai est systĂ©matiquement dĂ©comptĂ©e en jours calendaires, qu’elle soit prĂ©vue en mois, en semaines ou en jours (C.Cass 28 avril 2011 no 09-40.464).
Concrètement, cela signifie que chaque jour est pris en compte, qu’il s’agisse de jours travaillĂ©s ou non.
Exemple. Le contrat dĂ©bute le 4 janvier et prĂ©voit 2 mois de pĂ©riode d’essai. Elle se terminera donc le 3 mars Ă minuit. La pĂ©riode de 2 mois correspond Ă des jours calendaires, donc Ă des mois civils complets (et non Ă 2 mois de jours travaillĂ©s).
Si la pĂ©riode d’essai se termine un dimanche ou un jour fĂ©riĂ©, cela n’a pas d’incidence. La règle de computation des dĂ©lais de procĂ©dure (permettant de prolonger le dĂ©lai s’il expire un jour non travaillĂ©), ne s’applique pas ici (sauf accord des parties) (Cass. soc. 21-1-1987 n° 83-45.686).
Temps partiel. La pĂ©riode d’essai des temps partiels est dĂ©comptĂ©e de la mĂŞme manière. Le temps de travail du salariĂ© n’a pas d’importance.
Conséquences de la fin de la période essai
Quelles formalités ?
Lorsque la pĂ©riode d’essai arrive normalement Ă son terme, le contrat se poursuit automatiquement. L’employeur ou le salariĂ© n’ont pas de formalitĂ©s particulières Ă respecter.
NĂ©ammoins, l’employeur remet la plupart du temps un courrier au salariĂ© lui confirmant que la pĂ©riode d’essai a Ă©tĂ© concluante et son embauche dĂ©finitive dans l’entreprise. Il peut Ă©galement le faire Ă la demande du salariĂ©.
Ce dernier peut en effet en avoir besoin dans le cadre de dĂ©marches personnelles : prĂŞt bancaire, location de logement. Elle lui permet en effet de prouver qu’il n’est plus en pĂ©riode d’essai et que son contrat est confirmĂ©.
Quels effets pour le contrat ?
Au terme de la pĂ©riode d’essai, le contrat de travail du salariĂ© devient dĂ©finitif.
Les parties ne bĂ©nĂ©ficient plus de la facilitĂ© de rupture de la pĂ©riode d’essai. Si elles souhaitent par la suite rompre le contrat, elles devront se conformer aux procĂ©dures prĂ©vues par le code du travail, selon le cas : licenciement, dĂ©mission, rupture conventionnelle, etc.
Les possibilités de prolongement de la période essai CDI
La fin de la pĂ©riode d’essai initialement prĂ©vue peut ĂŞtre modifiĂ©e dans deux cas prĂ©cis, qu’il ne faut pas confondre.
Report du terme
Le terme de la pĂ©riode d’essai peut ĂŞtre reportĂ©e en cas de suspension du contrat de travail du salariĂ©. En effet, s’il est absent, il ne peut pas apprĂ©cier si le poste lui convient et l’employeur ne peut pas Ă©valuer ses compĂ©tences. La pĂ©riode d’essai perd alors de son utilitĂ©.
Circonstances
Cette prolongation est possible notamment dans les cas suivants :
- Congés payés (Cass. soc. 5-3-1997 n° 94-40.042)
- RTT (Cass. soc. 11-9-2019 n° 17-21.976)
- Congés sans solde (Cass. soc. 23-5-2007 n° 06-41.338)
- Arrêt de travail (maladie, accident du travail) (Cass. soc. 12-1-1993 n° 88-44.572)
- Fermeture de l’entreprise (si le salariĂ© est bien en congĂ©s) (Cass. soc 5-03-1997 n°94-40.042).
Calcul
Le report se calcule en jours calendaires (sauf dispositions conventionnelles ou contractuelles contraires) et doit ĂŞtre strictement identique Ă la durĂ©e de l’absence.
Exemple. La fin de la pĂ©riode d’essai d’un CDI est prĂ©vue le 16 fĂ©vrier Ă minuit. Le salariĂ© est en arrĂŞt maladie du 7 au 14 janvier inclus, soit 8 jours calendaires. La pĂ©riode d’essai sera donc prolongĂ©e de 8 jours calendaires et se terminera donc le 24 fĂ©vrier Ă minuit.
Formalités
L’employeur adresse un courrier au salariĂ© (remise en main propre ou recommandĂ©) en indiquant la date initiale de fin de la pĂ©riode d’essai, les dates et la durĂ©e de l’absence et la nouvelle date de fin de l’essai.
Renouvellement
Le renouvellement de la pĂ©riode d’essai est possible pour les contrats Ă durĂ©e indĂ©terminĂ©e. Il ne s’agit pas ici de prolonger la pĂ©riode en raison d’une absence mais de prĂ©voir une nouvelle pĂ©riode d’essai consĂ©cutive Ă la première.
Cette possibilitĂ© est utilisĂ©e lorsque l’employeur estime que la pĂ©riode d’essai initiale n’a pas Ă©tĂ© suffisante et qu’il a besoin de temps supplĂ©mentaire pour apprĂ©cier les compĂ©tences du salariĂ©.
Durée
La pĂ©riode d’essai, renouvellement compris, ne peut pas ĂŞtre supĂ©rieure Ă (L1221-21) :
- 4 mois pour les ouvriers et employés
- 6 mois pour les agents de maîtrise et techniciens
- 8 mois pour les cadres
Une adaptation de ces durées reste possible dans les mêmes conditions que pour la durée initiale (accords de branche).
Conditions
Le renouvellement n’est possible qu’une seule fois.
Son principe doit être prévu à la fois par le contrat de travail et par la convention collective (art.L. 1221-23).
Formalités
L’employeur doit informer le salariĂ© en lui envoyant un courrier (lettre recommandĂ©e avec accusĂ© de rĂ©ception ou remise en main propre), mentionnant :
- Les textes permettant le renouvellement (article du contrat de travail et de la convention collective)Â
- La durée du renouvellement
- La nouvelle date de fin de pĂ©riode d’essai
Accord du salarié
Il est indispensable. Une simple signature de la lettre de renouvellement ne suffit pas.
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Je tĂ©lĂ©charge les 8 fichesLe salariĂ© doit inscrire sur le courrier une mention manuscrite indiquant expressĂ©ment et clairement son accord pour le renouvellement (par exemple : “lu et approuvĂ©, bon pour consentement de renouvellement”).
La rupture anticipĂ©e de l’essai
L’une des principales caractĂ©ristiques de la pĂ©riode d’essai est de permettre une rupture simple du contrat, sans motif ni indemnitĂ©s. Pour autant, le salariĂ© ou l’employeur doivent respecter certaines formalitĂ©s.
Délais de prévenance
La rupture de la pĂ©riode d’essai ne peut pas se faire du jour au lendemain. L’employeur et le salariĂ© doivent respecter un dĂ©lai de prĂ©venance, dĂ©terminĂ©e en fonction du temps de prĂ©sence du salariĂ© dans l’entreprise.
Rupture Ă l’initiative de l’employeur
Les délais de prévenance sont de (L1221-25) :
- 24 heures en deçà de 8 jours de présence
- 48 heures entre 8 jours et 1 mois de présence
- 2 semaines après 1 mois de présence
- 1 mois après 3 mois de présence
Attention Ă ne pas prolonger la pĂ©riode d’essai en raison des dĂ©lais de prĂ©venance. Ces derniers doivent ĂŞtre bien anticipĂ©s. Si un salariĂ© est encore prĂ©sent dans l’entreprise alors que sa pĂ©riode d’essai a pris fin, il s’agit alors d’un CDI qui ne pourra ĂŞtre rompu qu’avec une procĂ©dure de licenciement.
Rupture Ă l’initiative du salariĂ©
Si le salariĂ© souhaite rompre sa pĂ©riode d’essai, il doit respecter un dĂ©lai de prĂ©avis de 48 heures, ou 24 heures s’il est prĂ©sent dans l’entreprise depuis moins de 8 jours (art. L. 1221-26).
Lire notre article sur le prĂ©avis de la pĂ©riode d’essai.
Sanction en cas de non respect des délais de prévenance
L’employeur qui ne respecte pas ce prĂ©avis devra verser au salariĂ© une indemnitĂ© compensatrice. Celle ci correspond aux salaires et avantages que le salariĂ© aurait perçus s’il avait travaillĂ© pendant le dĂ©lai de prĂ©venance.
Le code du travail ne prĂ©voit pas de sanction particulière en cas de non respect par le salariĂ©. NĂ©ammoins, l’employeur pourrait demander le versement de dommages et intĂ©rĂŞts s’il prouve un prĂ©judice.
Formalités
Mis Ă part le respect des dĂ©lais de prĂ©venance, les formalitĂ©s de rupture de la pĂ©riode d’essai sont très rĂ©duites.
Principe
Aucun motif n’est nĂ©cessaire pour rompre une pĂ©riode d’essai. Il suffit Ă l’employeur ou au salariĂ© d’adresser un courrier Ă l’autre partie en mentionnant uniquement son souhait de mettre fin Ă la pĂ©riode d’essai.
Pour des questions de preuve, il est prĂ©fĂ©rable de passer par un Ă©crit (mĂŞme si cela n’est pas obligatoire) : lettre recommandĂ©e ou remise en main propre. Pensez Ă vĂ©rifier votre convention collective. Elle peut Ă©ventuellement prĂ©voir une procĂ©dure particulière
Exceptions
Dans certains cas, l’employeur devra respecter une procĂ©dure spĂ©cifique :
- Faute du salarié. Il faudra alors suivre la procédure classique de sanction disciplinaire : convocation à un entretien préalable, délais, etc ( Cass. soc. 10-3-2004 n° 01-44.750)
- SalariĂ©s protĂ©gĂ©s. La protection s’applique mĂŞme pendant la pĂ©riode d’essai. Sa rupture ne peut donc avoir lieu qu’en respectant la procĂ©dure de licenciement des salariĂ©s protĂ©gĂ©s : autorisation de l’inspection du travail, consultation du CSE…