« Le changement est la seule constante de la vie » disait Héraclite. S’il se faisait touriste dans le monde d’aujourd’hui, il trouverait sans doute que son observation était un euphémisme. Le rythme du changement est non seulement important, mais il semble s’accélérer. En 1955, l’espérance de vie moyenne d’une organisation était de 75 ans. Aujourd’hui, on estime qu’elle est inférieure à 15 ans. Une étude affirme même que 52 % des entreprises du classement Fortune 500 ont disparu depuis 2000.
Dans un environnement où être « disruptif » est considéré comme la consécration ultime, les grandes entreprises naissent et disparaissent à vitesse grand V. Airbnb, Uber, Tesla ou Amazon sont de relativement jeunes entreprises qui dominent pourtant aujourd’hui le marché, voire dans certains cas, supplantent les poids lourds du business.
Dans ce contexte, l’une des préoccupations majeures d’une entreprise est sans doute de savoir naviguer le changement.
L’anatomie d’une organisation agile
Les entreprises qui s’en sortent le mieux partagent quelques points communs :
- Elles considèrent leurs collaborateurs comme une ressource plutôt que comme un coût. La conscience que c’est grâce à leur personnel qu’elles peuvent s’adapter aux forces disruptives du marché, amène ces entreprises agiles à leur proposer des formations et des opportunités de développement continu.
- Leurs équipes sont hétérogènes et fonctionnent en mode projet. Pour gagner en agilité face aux changements, l’organisation en silos traditionnels cède le pas aux équipes multi-compétences. Réunies en équipes projet le temps d’une mission, elles sont composées de compétences pluridisciplinaires.
- Elles ont évolué vers des structures organisationnelles plates avec un management horizontal. Abandonnant le modèle hiérarchique pyramidal au profit de celui des niveaux de hiérarchie réduits, ces organisations ont fondamentalement modifié leurs modes de communication, de subordination et de responsabilisation. À l’image de Google qui compte un responsable pour 50 personnes.
- Elles promeuvent le leadership transformationnel. Ce dernier cherche à concilier les objectifs organisationnels avec le facteur humain, parent pauvre du leadership transactionnel où la motivation a été basée sur la récompense ou la punition. Prenant à contre-pied cette approche court-termiste, le leadership transformationnel se donne comme objectif d’inspirer leurs collaborateurs en partageant une vision claire de l’avenir et en impliquant chacun dans cette mission.
À titre d’exemple, lorsque le groupe bancaire ANZ s’est restructuré, il a fait le choix de former des équipes de 10 personnes appelées « tribus » et de déléguer le rôle traditionnellement tenu par des managers à des coachs. Cette démarche s’inspire du modèle Spotify, l’un des pionniers de la méthode agile, une approche itérative où les solutions évoluent grâce à la collaboration au sein des équipes transverses et autonomes. Pour favoriser l’autonomie et la rapidité d’action, le recrutement dans ces entreprises cible la capacité de nouveaux candidats à s’adapter et à collaborer plutôt que leurs hard skills. Une approche qui contraste radicalement avec le modèle où les équipes ont des objectifs stricts qu’elles doivent atteindre contre vents et marées.
Des avancées notables, mais comme une sensation de flottement
Beaucoup de ces initiatives font évoluer nos modèles dans le bon sens, en améliorant notre capacité à :
- Définir les rôles et les responsabilités
- Gérer les compétences et les potentiels
- Déployer des changements structurels, systémiques et technologiques
- Définir des missions et des objectifs spécifiques
- Tenir compte de notre impact sur l’environnement
Pour autant, il est quelque peu surprenant (et un peu triste) de constater que tant d’initiatives de changement organisationnel échouent ou n’aboutissent pas à un changement durable. Mais qu’est-ce qui ne tourne pas rond ? Malgré ces progrès, beaucoup d’entreprises ne semblent pas savoir ce qui fait leur culture organisationnelle. Certes, tout le monde sait qu’elle existe et qu’elle est certainement importante. Mais savoir la définir et l’ajuster est une tout autre affaire.
Par ailleurs, malgré l’engagement collaborateur qui est sur toutes les lèvres depuis quelques temps, peu savent encore comment s’y prendre sur le terrain.
Comment donc aider les entreprises à s’approprier ces concepts d’apparence assez nébuleux ?
Tenir la barre
« Mieux vaut prendre le changement par la main avant qu’il ne nous prenne par la gorge. » (Winston Churchill)
La majorité des facteurs qui influent sur les changements organisationnels échappent à notre contrôle. Pour faire face à ces forces disruptives, la stratégie gagnante ne serait-elle pas de concentrer nos efforts sur les leviers qui sont à notre portée, en commençant par la meilleure connaissance des collaborateurs qui sont les artisans et l’atout majeur face au changement ?
Ainsi, toute conduite de changement gagnerait à inclure dès les premières étapes une évaluation des forces en présence. En commençant par un état des lieux objectif des préférences psychologiques, des besoins, des intérêts et de l’intelligence émotionnelle de chaque acteur du changement. Non seulement cela permet de comprendre le type de culture dans l’entreprise, mais aussi d’identifier les domaines qui peuvent ou doivent être ajustés pour renforcer l’engagement des collaborateurs et la résilience face au changement.
Contrairement aux idées reçues, les individus ne sont pas opposés au changement – si c’était le cas, il est peu probable que nous en serions arrivés là où nous en sommes aujourd’hui. Mais nous avons pu en tirer un enseignement : mieux nous nous connaissons, plus nous maîtrisons nos potentialités et ressources pour faire face au changement. Qu’il soit désiré ou subi. Et cela va de même pour les entreprises.
À propos de l’auteure
Sherrie Haynie
Sr. Director of US Professional Services pour The Myers-Briggs Company, elle accompagne des groupes internationaux, leurs leaders et partenaires RH dans le déploiement des initiatives stratégiques.
À propos de The Myers-Briggs Company
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