Convention collective de la métallurgie : les changements en 2024

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Le secteur de la métallurgie se sépare de ses quelque 76 conventions et autres accords nationaux pour se doter d'un texte unique au plan national : la nouvelle Convention collective de la métallurgie du 7 février 2022, entrant pleinement en vigueur le 1er janvier 2024. Décryptage des principaux changements et avantages de ce nouveau texte.

Le souhait d’un nouvel élan pour l’industrie grâce à convention collective nationale de la métallurgie unificatrice

Dans les cartons depuis 2016, la nouvelle Convention collective nationale de la métallurgie a finalement été signée le 7 février 2022 et entre pleinement en vigueur le 1er janvier 2024 (1). Constatant les profondes mutations du secteur (nouvelles technologies, nouvelles organisations du travail, mondialisation, respect de l’environnement, etc.), le souhait des partenaires sociaux est d’adapter les dispositions conventionnelles à toutes ces transformations.

L’objectif principal était donc d’unifier l’ensemble des conventions collectives territoriales et accords nationaux en une seule convention collective nationale. Une telle unification permet ainsi à chaque salarié de la branche de répondre à la même grille de classification, aux mêmes barèmes de rémunération conventionnelle, et au même système de protection sociale, tout en permettant de revitaliser et de faciliter le dialogue social entre les partenaires sociaux concernés.

En d’autres termes, outre les quelques dispositions qui sont applicables depuis le 1er janvier 2023, c’est cette nouvelle convention et ses nouvelles dispositions qu’il faudra appliquer dès les premiers jours de l’année 2024. L’extinction des anciennes dispositions conventionnelles territoriales par un avenant de révision a d’ailleurs été récemment validée par le juge de la Haute juridiction (2)

“La présente convention collective nationale est l’illustration de la volonté des signataires de construire un cadre conventionnel plus simple, plus accessible, plus juste, socialement et économiquement plus performant, au service du développement et de l’excellence de l’industrie » (3).

Une seule grille de classification pour tous les salariés de la branche

L’un des principaux avantages à n’avoir à appliquer qu’une seule convention est que tous les salariés de la branche répondent à la même et unique grille de classification, sur l’ensemble du territoire national (4) :

CotationsClasses d’emploisGroupes d’emplois
58 à 6018I
55 à 5717I
52 à 5416H
49 à 5115H
46 à 4814G
43 à 4513G
40 à 4212F
37 à 3911F
34 à 36 10E
31 à 339E
28 à 308D
25 à 277D
22 à 246C
19 à 215C
16 à 184B
13 à 153B
10 à 122A
6 à 91A

Point de repère : les groupes F, G, H et I correspondent à des emplois cadres.

Un emploi va ainsi être analysé selon 6 critères classants (5) :

  • la complexité de l’activité : difficulté/technicité et diversité du travail, solutions à mettre en œuvre, problèmes à traiter ;
  • les connaissances : savoirs et savoir-faire requis dans l’emploi, acquis par la formation initiale/contrôle associé ;
  • l’autonomie : latitude d’action, d’organisation et de décision dans le cadre de l’emploi, niveau de contrôle associé ;
  • la contribution : effet et influence des actions et des décisions sur les activités, l’organisation et son environnement, nature et importance du champ d’action et de responsabilité ;
  • l’encadrement-coopération : appui/soutien, accompagnement/transmission, supervision, encadrement, management/coordination, qu’il s’agisse d’une responsabilité hiérarchique, fonctionnelle ou de projet ;
  • et la communication : nature et variété des échanges et des interlocuteurs, transmission, concertation, négociation, représentation.

Pour chacun de ces critères, un degré de 1 à 10 va être attribué (1 correspondant aux tâches les plus simples et 10 aux tâches les plus complexes). Par exemple, le degré 10 « Encadrement-coopération » va être attribué à un emploi qui correspond à la direction ou la coordination de la totalité de l’organisation. Le degré 2 « Connaissances » est quant à lui réservé à l’emploi qui ne nécessite que des connaissances élémentaires. Ces exemples sont issus du « Référentiel d’analyse – Méthode de classification », consultable directement au sein de la Convention.

Enfin, il s’agit d’appliquer la méthode de cotation. Chaque degré retenu correspond à un nombre de points (degré 1 = 1 point ; degré 2 = 2 points ; etc.), qu’il convient d’additionner. Le total correspond à la cotation, et permet de classer le salarié et son emploi au sein de la grille (6). Plus le nombre de points est élevé, plus l’emploi correspond à un niveau exigeant. 

Grâce à ce système, les partenaires sociaux entendent faciliter la lisibilité de progression professionnelle que peut connaître un salarié au sein d’une entreprise. En effet, dès lors que les fonctions du salarié évoluent, l’employeur revérifie la cotation de la fonction, et si elle s’en trouve affectée, relève le classement attribué au salarié, avec son accord exprès, puisqu’il s’agit d’une modification d’un élément essentiel du contrat de travail.

Bon à savoir : un salarié peut demander à son employeur de lui fournir des explications concernant le classement de son emploi. Il doit le faire dans le délai de 1 mois suivant sa période d’essai (ou de l’embauche s’il n’y a pas de période d’essai). Cette réponse contiendra le degré retenu pour chaque critère classant du référentiel, et peut prendre la forme, si nécessaire, d’un entretien avec le salarié (7).

Pour en savoir plus, découvrez la synthèse de votre convention collective avec la nouvelle grille de classification de la métallurgie en 2024.

Des salaires minimas identiques sur l’ensemble du territoire

Classer les salariés de manière uniforme sur le territoire permet ainsi, via la négociation de branche, de mettre en place des salaires minima conventionnels de manière uniforme. Cela permet la convergence des différents salaires minima, notamment issus des 76 accords territoriaux.

Pour 2024, le barème unique des salaires minima hiérarchiques est le suivant (8) :

Groupe d’emploisClasse d’emploiSalaire minimal hiérarchique (pour 35 heures)
A119.420 euros
A219.700 euros
B320.300 euros
B421.200 euros
C522.300 euros
C623.500 euros
D724.400 euros
D826.400 euros
E928.400 euros
E1031.400 euros
F1132.500 euros
F1234.300 euros
G1337.400 euros
G1441.000 euros
H1544.000 euros
H1649.000 euros
I1756.000 euros
I1864.500 euros

Chaque année, à la fin du premier trimestre, les acteurs concernés se réuniront afin de déterminer les valeurs de ces salaires pour l’année en cours.

Ces salaires minima hiérarchiques sont majorés (9) :

  • de 15 % : pour le salarié en convention de forfait en heures sur l’année pour un horaire hebdomadaire moyen correspondant à la durée légale du travail de 35 heures majorée de 10 % au plus ;
  • de 30 % : pour le salarié en convention de forfait en heures sur l’année pour un horaire hebdomadaire moyen correspondant à la durée légale du travail de 35 heures majorées de 20 % au plus.

Période transitoire : pour accompagner cette transition, les entreprises de 150 salariés ou moins n’ont l’obligation d’appliquer le barème unique national qu’à partir du 1er janvier 2030, si et seulement si ce dernier entraînerait, dès le 1er janvier 2024, une hausse de la masse salariale supérieure à 5 % pour au moins 25 % de l’effectif. Pour réaliser ce calcul, les entreprises doivent comparer la masse salariale 2023 par rapport à la masse salariale prévisionnelle au 1er janvier 2024 (10).

Une nouvelle prime d’ancienneté

Les salariés ayant 3 ans d’ancienneté au sein de la même entreprise, et appartenant aux groupes d’emplois A à E bénéficient d’une prime d’ancienneté. Celle-ci s’ajoute à la rémunération mensuelle (11).

Pour obtenir le montant de cette prime, il convient d’appliquer le calcul suivant :
((base de calcul spécifique du salarié) x 100) x le nombre d’années d’ancienneté (dans la limite de 15 ans).

Info utile : la base de calcul spécifique du salarié = valeur de point x taux de pourcentage.

Ces taux de pourcentage sont les suivants (12) :

Classe d’emplois12345678910
Taux1,45 %1,6 %1,75 %1,95 %2,2 %2,45 %2,6 %2,9 %3,3 %3,8 %

Exemple tiré de la Convention : si le salarié a 8 ans d’ancienneté dans la même entreprise, qu’il occupe un emploi classé A1, et dont la valeur du point sur son territoire est de 5 euros, alors sa prime d’ancienneté est égale à ((5 x 1,45 %) x 100) x 8 ans = 58 euros mensuels bruts pour 35 heures.

De nouvelles durées de période d’essai 

Lors de son recrutement, un salarié est généralement amené à effectuer une période d’essai. Celle-ci correspond à une période durant laquelle le contrat de travail peut être rompu librement et sans justification, soit par le salarié qui se rend compte que ce poste n’est pas celui auquel il s’attendait, soit par l’employeur qui considère que sa nouvelle recrue n’est pas qualifiée pour occuper ce poste.

La Convention collective de la métallurgie fixe la durée de ces périodes pour les contrats à durée indéterminée (CDI), de la manière suivante (13) :

Groupe d’emploi du salariéDurée maximale de la période d’essai (hors renouvellement)
A, B et C2 mois calendaires
D et 33 mois calendaires
F, G, H et I4 mois calendaires

Cette période d’essai du CDI peut être renouvelée, moyennant le respect de certains plafonds :

Groupe d’emploi du salariéDurée totale maximale de la période d’essai (renouvellement compris)
A et B2 mois calendaires
C3 mois calendaires 
D4 mois calendaires
E5 mois calendaires
F, G, H et I6 mois calendaires

Appliquer les nouveaux congés de la convention

Les congés payés

Conformément au cadre légal, les salariés de la branche acquièrent 2,5 jours et demi de congés annuels payés par mois de travail effectif, soit 30 jours de congés payés pour une année complète. Il est précisé que le congé principal est de 24 jours, et les 6 autres jours correspondent à la 5ème semaine de congés payés (14).

Chaque entreprise est ensuite libre d’attribuer des congés payés supplémentaires.

Les congés exceptionnels pour événements de famille

Les congés exceptionnels pour événements de famille suivants sont issus des dispositions légales et des dispositions de la nouvelle Convention (15)

Événement familialJours de congés
Mariage d’un enfant1 jour ouvrable
Pour chaque naissance pour le père et, le cas échéant, le conjoint ou le concubin de la mère ou la personne liée à elle par un pacte civil de solidarité (PACS)3 jours ouvrables
Pour l’arrivée d’un enfant placé en vue de son adoption3 jours ouvrables
Décès d’un enfant âgé de 25 ans et plus, sans enfant lui-même5 jours ouvrables
Deuil d’un enfant âgé de moins de 25 ans ou deuil d’une personne âgée de moins de 25 ans à la charge effective et permanente du salarié8 jours ouvrables
Décès du conjoint, du partenaire lié par un PACS ou du concubin3 jours ouvrables
Décès du père, de la mère, du beau-père, de la belle-mère, d’un frère ou d’une sœur3 jours ouvrables
Annonce de la survenue d’un handicap, d’une pathologie chronique nécessitant un apprentissage thérapeutique ou d’un cancer chez un enfant 2 jours ouvrables
Décès d’un enfant âgé de moins de 25 ans ou décès d’un enfant lui-même parent quel que soit son âge ou décès d’une personne de moins de 25 ans à la charge effective et permanente du salarié 7 jours ouvrés
Mariage du salarié ou conclusion d’un PACSUne semaine
Décès du conjoint, du partenaire de PACS ou du concubin en cas d’enfant(s) à charge (non cumulable avec les jours décès prévus précédemment pour ces mêmes personnes)5 jours calendaires
Décès d’un grand-parent1 jour calendaire
Décès d’un petit-enfant1 jour calendaire

Comprendre la nouvelle protection sociale complémentaire de la branche

L’objectif des partenaires sociaux en instaurant ces nouvelles dispositions relatives à la protection sociale complémentaire est d’atténuer les conséquences pécuniaires des aléas de la vie pour les salariés des entreprises de la branche. Celles-ci sont applicables depuis le 1er janvier 2023 (16). Les salariés bénéficient ainsi d’un niveau minimal de garanties, peu importe l’organisme assureur de leur entreprise.

Un régime de garanties relatives à la prévoyance en cas d’incapacité, invalidité et de décès

Garantie incapacité temporaire de travailLes salariés bénéficient d’indemnités journalières complémentaires (IJC).Pour les salariés cadres :180 jours à 100 % du salaire de référence ;puis 75 % du salaire de référence jusqu’à expiration des droits.Pour les salariés non-cadres :75 % du salaire de référence jusqu’à expiration des droits.
Garantie invaliditéPour les salariés cadres, la rente d’invalidité complémentaire est la suivante : invalidité 1ère catégorie (au sens de la Sécurité sociale) : 45 % du salaire de référence ;invalidité 2ème catégorie : 75 % du salaire de référence défini
ci-dessus ;invalidité 3ème catégorie : 75 % du salaire de référence.Le montant de cette rente d’invalidité complémentaire pour les salariés non-cadres est de :invalidité 1ère catégorie : 42 % du salaire de référence ;invalidité 2ème catégorie : 70 % du salaire de référence ;invalidité 3ème catégorie : 70 % du salaire de référence.
Capital décèsLes bénéficiaires sont désignés par écrit par le salarié.Pour les salariés cadres : 200 % du salaire de référence.Pour les salariés non-cadres : 100 % du salaire de référence.
Rente éducationMontant de la rente en cas de décès du salarié cadre : de 0 ans à 15 ans : 4 % du salaire de référence ;de 16 ans à 18 ans : 6 % du salaire de référence ;de 19 ans à 26 ans : 8 % du salaire de référence.Montant de la rente en cas de décès d’un salarié non-cadre :de 0 ans à 15 ans : 4 % du salaire de référence ;de 16 ans à 18 ans : 6 % du salaire de référence ;de 19 ans à 26 ans : 8 % du salaire de référence. 

Un régime de garanties relatives aux frais de santé

En plus des garanties de prévoyance, des garanties minimales de remboursement de frais de santé sont instaurées. L’employeur s’engage à hauteur de 50 % de la cotisation globale venant financer la couverture minimale instituée à titre obligatoire. Il est également possible de mettre en place des garanties additionnelles, à titre obligatoire ou facultatif, au niveau de l’entreprise.

Enfin, des garanties relevant de l’action sociale sont mises en place, pouvant prendre la forme d’une prise en charge partielle ou totale de la cotisation pour certains salariés, d’une politique de prévention, voire de prestations d’action sociale.

Info utile : l’Annexe 9 de la présente convention détaille, sous forme de grilles, ces garanties minimales de frais de santé (17).

A propos de l’auteur

Yoan El Hadjjam

“Juriste rédacteur chez Juritravail depuis 2021, mon souhait est de simplifier au mieux le droit social pour le rendre accessible à toutes et tous.

Diplômé d’un Master en Droit du travail et de la Protection sociale, j’ai une affinité particulière pour les évolutions du droit social au gré des nouvelles technologies !”

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Références

(1) Convention collective nationale de la métallurgie du 7 février 2022, étendue par arrêté du 14 décembre 2022
(2) Cass. Soc. 4 octobre 2023, n°22-23551
(3) Préambule de la Convention collective nationale de la métallurgie du 7 février 2022
(4) Article 62.1 de la Convention collective nationale de la métallurgie du 7 février 2022
(5) Article 60 de la Convention collective nationale de la métallurgie du 7 février 2022
(6) Article 61 de la Convention collective nationale de la métallurgie du 7 février 2022
(7) Article 63.2.2 de la Convention collective nationale de la métallurgie du 7 février 2022
(8) Annexe 6 de la Convention collective nationale de la métallurgie du 7 février 2022
(9) Article 139 de la Convention collective nationale de la métallurgie du 7 février 2022
(10) Article 141 de la Convention collective nationale de la métallurgie du 7 février 2022
(11) Article 142 de la Convention collective nationale de la métallurgie du 7 février 2022
(12) Annexe 7 de la Convention collective nationale de la métallurgie du 7 février 2022
(13) Article 70 de la Convention collective nationale de la métallurgie du 7 février 2022
(14) Article 83 de la Convention collective nationale de la métallurgie du 7 février 2022
(15) Article 90 de la Convention collective nationale de la métallurgie du 7 février 2022
(16) Avenant du 11 juillet 2023 à l’Accord du 7 février 2022 relatif à la gouvernance et aux garanties contributives et non-contributives du régime de protection sociale complémentaire de la branche de la métallurgie, Titre XI de la Convention et Annexe 9. Définition d’un socle minimal de garanties en frais de soins de santé et en prévoyance de la branche de la métallurgie
(17) Annexe 9. Définition d’un socle minimal de garanties en frais de soins de santé et en prévoyance de la branche de la métallurgie