La période d’essai permet à chacune des parties de s’assurer de la bonne adéquation du poste. L’employeur peut évaluer les compétences du salarié et celui ci peut vérifier en situation que le poste lui convient.
La législation relative à la rupture de la période d’essai est volontairement souple et simple à mettre en œuvre afin que chacun puisse se libérer du contrat facilement si ce dernier ne convient pas.
Notamment, la rupture de la période d’essai d’un CDI ne requiert aucune justification, aucun motif, et une simple lettre suffit. Néammoins, cette simplicité ne doit pas conduire à sous estimer cette rupture.
Employeurs comme salariés doivent être particulièrement vigilant lorsqu’ils souhaitent mettre fin à une période d’essai. Les conséquences peuvent en effet être importantes, par exemple en cas de requalification en rupture abusive ou nulle.
Alors comment rompre une période d’essai dans de bonnes conditions ? dans quels cas une telle rupture peut elle être abusive ?
Découvrez également notre article qui présente la procédure de rupture de la période d’essai d’un CDD.
Comment rompre la période essai d’un CDI ?
Avant d’examiner la procédure, il est important de s’arrêter sur les motifs de cette rupture. Nous verrons également que la rupture doit respecter certains délais de prévenance.
Les motifs de la rupture
Aucun motif n’est nécessaire
Les modalités de rupture des CDI définies dans le code du travail ne sont pas applicables pendant la période d’essai (art L1231-1 code du travail). La rupture de la période d’essai obéit donc à des règles spécifiques, contrairement aux autres ruptures prévues pour les CDI (licenciements notamment).
En particulier, l’une des spécificités majeures de la rupture de période d’essai réside dans l’absence de motif à donner.
Que la rupture soit à l’initiative du salarié ou de l’employeur, ils n’ont aucun motif particulier à justifier pour mettre fin à la periode d’essai (Cass. soc. 20-10-2010 n° 08-40.822).
Cas d’une faute du salarié
Si le salarié à commis une faute pendant sa période d’essai et que l’employeur souhaite mettre fin à cette dernière, il devra alors respecter la procédure disciplinaire (Cass. soc. 10-3-2004 n° 01-44.750).
La procédure à suivre
En principe, la procédure à suivre est très simple. Il faut néanmoins veiller à respecter quelques principes.
Rédaction d’un courrier conseillée
Il n’y a pas de procédure particulière à respecter pour rompre une période d’essai. Du moins en principe. Dans les faits, il est vivement conseillé de recourir à une lettre recommandée avec accusé de réception ou à une remise en main propre en double exemplaire avec indication de la date de la remise. Cette formalité est un moyen de preuve qui pourra s’avérer utile en cas de problème.
La date de la rupture correspond au jour d’envoi de la lettre ou de sa remise en main propre.
Est il possible d’annuler la rupture de la période d’essai ? Oui. L’employeur qui a déjà informé le salarié de sa rupture de période d’essai peut l’annuler avec son accord. A noter que cet accord peut se déduire de la poursuite des relations contractuelles au delà de la fin de la période d’essai. (Cass. soc. 5-7-2017 n° 16-15.446)
La convention collective peut également prévoir une procédure particulière.
Une rupture explicite
Il est important que la rupture soit explicite. La lettre du salarié ou de l’employeur doit mentionner expressément la volonté de mettre fin à la periode d’essai.
Par exemple, la rupture de la période d’essai ne peut pas se limiter à :
- L’envoi au salarié de son attestation Pôle emploi. (Cass. soc. 17-10-2007 n° 06-44.388)
- A une simple déclaration orale en présence du personnel de l’entreprise (Cass. soc. 7-2-2001)
Dans la rédaction de la lettre, il est également conseillé de se limiter à l’annonce de la fin de la période d’essai, sans essayer de motiver la rupture et sans donner d’autres détails. Il faut bien penser que cette lettre est un moyen de preuve et qu’elle peut donc être produite devant le conseil des prud’hommes en cas de problème (voir dernière partie de cet article sur les ruptures abusives ou nulles).
Cas des salariés protégés
Il est possible qu’un employeur souhaite rompre la période d’essai d’un salarié protégé. Rappelons qu’il s’agit des salariés suivants :
- Salariés demandant l’organisation des élections professionnelles
- Candidats aux élections professionnelles
- Représentants élus
- Délégués syndicaux, représentants syndicaux au CSE, représentants de section syndicale
- Salariés mandatés pour négocier un accord collectif en l’absence d’un DS
- Salariés titulaires d’un mandat extérieur à l’entreprise : conseillers prud’homaux, conseillers du salarié, défenseurs syndicaux…)
Dans ce cas, l’employeur doit respecter la procédure spéciale prévue pour les ruptures de contrat concernant les salariés protégés. Il devra notamment consulter le CSE sur ce point et demander l’autorisation de rompre la période d’essai auprès de l’inspection du travail.
Délais de prévenance
Depuis 2008, les employeurs et salariés qui souhaitent rompre la periode d’essai doivent respecter un délai de prévenance.
Délais à respecter pour l’employeur
Pour les contrats à durée indéterminée, ce délai est de (art L1221-25) :
- 24 heures si le salarié est présent depuis moins de 8 jours
- 48 heures entre 8 jours et 1 mois de présence
- 2 semaines après 1 mois de présence
- 1 mois après 3 mois de présence
La période d’essai ne peut pas être prolongée du fait de la durée de ce délai de prévenance.
Dans le cas où le salarié serait encore présent dans l’entreprise après la fin de sa période d’essai, cette relation serait assimilée à un nouveau CDI, qui devra alors être rompu par un licenciement. (Cass. soc. 5-11-2014)
Si l’employeur ne respecte pas le délai de prévenance, il devra verser une indemnité compensatrice au salarié. Celle ci est égale au montant des salaires et autres avantages qu’aurait perçus le salarié s’il avait travaillé jusqu’à la fin de son délai de prévenance.
Sur ce point, la cour de cassation a bien précisé que le non respect du délai de prévenance ne s’analyse pas en un licenciement. (Cass. soc. 23-1-2013)
Délais à respecter pour le salarié
Le salarié souhaitant mettre fin à sa période d’essai doit également prévenir son employeur à l’avance.
Ce délai de prévenance est de :
- 24 heures en cas de présence inférieure à 8 jours
- 48 heures au delà de 8 jours
Modèles
Lettre type d’une rupture de periode d’essai d’un CDI à l’initiative de l’employeur
Identification de l’entreprise
Nom et prénom du salarié
Adresse
Lieu et date
LRAR n° xxxxxxxxxxxxxx OU Lettre remise en main propre contre décharge
Objet : Rupture de la période d’essai
Madame, monsieur,
Votre contrat de travail prévoit une période d’essai de (durée) .
Si concerné : Cette période d’essai à été renouvelée le (date) pour une durée de (durée). Elle se termine donc le (date).
Votre essai ne nous ayant pas donné satisfaction, nous mettons fin par la présente au contrat à durée indéterminée qui nous lie.
Si dispense d’exécuter le délai de prévenance :
Nous vous dispensons d’effectuer votre délai de prévenance et vous cesserez donc de travailler dés réception de cette lettre. Vous recevrez une indemnité correspondant au salaire que vous auriez perçu si vous aviez travaillez pendant le délai de prévenance.
Si le salarié doit exécuter son délai de prévenance :
Vous êtes tenus de travailler jusqu’à l’expiration du délai de prévenance légal.
Votre contrat se terminera à la fin du délai de prévenance soit le (date).
Nous vous transmettrons votre solde de tout compte, votre certificat de travail et votre attestation pôle emploi par courrier.
Formule politesse
Pour (nom société)
(Nom et prénom du représentant de l’employeur)
Lettre type d’une rupture de période d’essai d’un CDI à l’initiative du salarié
Nom et prénom du salarié
Adresse
Nom entreprise
Coordonnées entreprise
Lieu et date
LRAR n° xxxxxxxxxxxxxx OU Lettre remise en main propre contre décharge
Objet : Rupture de la période d’essai
Madame, monsieur,
Je vous informe que je souhaite mettre fin à ma période d’essai.
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Je vous remercie de bien vouloir me faire parvenir mes documents de fin de contrat : solde de tout compte, certificat de travail et attestation pôle emploi.
(Formule politesse)
Nom, prénom et signature
Les cas de ruptures abusives ou nulles
Même si aucune motivation n’est requise pour rompre la période d’essai, il faut néanmoins faire attention aux circonstances de la rupture. En effet, celles ci peuvent démontrer une attitude fautive qui sera sanctionnée devant les tribunaux.
Quelques exemples
Motif non inhérent à la personne du salarié
Pour l’employeur, la periode d’essai est destinée à évaluer les compétences professionnelles du salarié. Par conséquent, une rupture qui se fonde sur des éléments étrangers à la personne du salarié est abusive. En l’espèce, il s’agissait d’un salarié en arrêt maladie. (Cass. soc. 10-4-2013 n° 11-24.794)
Inexécution par l’employeur de ses obligations contractuelles
Un salarié avait mis fin à sa période d’essai du fait de l’inexécution par l’employeur de ses obligations contractuelles. La cour de cassation a admis qu’il s’agissait d’une rupture abusive imputable à l’employeur. (Cass. soc. 7-2-2012 n° 10-27.525)
Motif discriminatoire
Les spécificités dérogatoires de la rupture de periode d’essai n’empêchent pas l’application des dispositions sur les ruptures de contrat pour motifs discriminatoires.
En conséquent, toute rupture de période d’essai fondée sur de telles raisons est nulle.
Pour rappel, il s’agit des motifs suivants : origine, sexe, mœurs, orientation sexuelle, identité de genre, âge, situation de famille, grossesse, opinions politiques, appartenance syndicale, etc.
Conséquences de la rupture abusive ou nulle
En cas de rupture abusive ou nulle, le salarié peut obtenir la réparation du préjudice subi par le versement de dommages et intérêts.
En revanche, il ne s’agit pas ici d’une procédure dans le cadre d’un licenciement. Toute indemnité pour licenciement abusif ou nul est donc exclue.