Comment embaucher un salarié étranger ? Point sur vos démarches !

Comment embaucher un salarié étranger ? Point sur vos démarches !

Embauche de salariés étrangers : le 6 novembre 2023, le Sénat débutera l’examen du projet de loi immigration . Nous faisons le point sur les règles en vigueur et sur vos obligations RH !

Vous êtes employeur et vous souhaitez embaucher un salarié, mais vous vous rendez compte qu’il n’a pas la nationalité française. Néanmoins, vous considérez que cela présente de nombreux avantages (mixité des équipes, partage de savoir-faire, ouverture à l’internationale…) et souhaitez poursuivre la procédure. Si les relations de travail peuvent tout à fait dépasser les frontières, la procédure d’un tel recrutement ne s’improvise pas. Quelles sont les démarches à suivre ? Faisons le point afin d’aborder ce recrutement sereinement !

Quelles sont les formalités à accomplir avant de recruter un travailleur étranger ? 

S’assurer de la nationalité du futur salarié

Avant toute embauche d’un salarié étranger, l’employeur doit vérifier la nationalité du candidat, car cette dernière va lui permettre d’identifier la procédure à appliquer ainsi que ses obligations. Cette formalité est à accomplir quel que soit le type de contrat envisagé (CDI, CDD, détachement…).

Si cet aspirant au poste est ressortissant de l’Union européenne (UE), ou de l’un des États de l’Espace économique européenne (EEE), ou encore de la Suisse, d’Andorre, de Monaco et Saint-Marin, il n’y a pas de difficultés particulières à surmonter. Les citoyens de ces pays jouissent de la libre circulation des travailleurs (1) et n’ont donc pas besoin d’obtenir une autorisation de travail (2). L’employeur doit ainsi se contenter de réaliser les formalités classiques liées à l’embauche (entretiens d’embauche, inscription au registre unique du personnel, déclaration préalable à l’embauche dans les 8 jours qui précèdent l’arrivée du salarié, etc.).

Pour les autres (résidant en France sans avoir la nationalité française, ou résidant hors du territoire national), l’employeur doit s’assurer que ceux-ci peuvent bel et bien séjourner en France, et/ou y travailler (3). Cette précaution doit obligatoirement être prise en amont du recrutement, car faire travailler un salarié sans autorisation de travail sur le territoire français fait l’objet de sanctions pénales (4).

Vérifier l’existence ou la validité du titre de séjour 

Avant de demander l’autorisation de travail, l’employeur doit s’assurer que le potentiel futur salarié est en situation régulière, c’est-à-dire qu’il possède bien un titre de séjour valide lui permettant de résider sur le territoire. 

Pour ce faire, il doit saisir le préfet du département dans lequel se trouve l’établissement employeur, au moins 2 jours avant l’embauche. Le préfet dispose alors de 2 jours à compter de la réception de la demande, pour y répondre. S’il ne répond pas dans ce délai, il est considéré que l’employeur a bien respecté son obligation de vérification (5).

Bon à savoir : si l’intéressé détient un justificatif d’inscription sur la liste des demandeurs d’emploi (Pôle emploi), cette formalité n’a pas besoin d’être accomplie (6).

Comment obtenir une autorisation de travail pour l’emploi d’un salarié étranger hors UE ? Combien de temps faut-il pour avoir une réponse ?

Un étranger autorisé à séjourner en France ne peut pas exercer d’activité professionnelle s’il n’a pas obtenu, au préalable, une autorisation de travail (7)

Si certains titres de séjour permettent automatiquement au salarié l’exercice d’une activité professionnelle sur le territoire, ce n’est pas le cas de toutes. Dans ce dernier cas, la demande d’autorisation de travail est nécessaire pour recruter l’intéressé.

Dans le cas où l’individu concerné n’a pas de titre de séjour l’autorisant à travailler en France, l’employeur (ou son mandataire), doit en faire la demande

La procédure de demande se fait via un téléservice officiel sur le site du ministère de l’Intérieur (8). Il est alors nécessaire de fournir certaines pièces justificatives variables selon la situation du salarié, par exemple (9) : 

  • une copie de l’état civil et les dates de validité du passeport, ou de la carte d’identité du ressortissant étranger ;
  • si le projet de recrutement est soumis à l’opposabilité de la situation de l’emploi (c’est-à-dire qu’il ne concerne pas un métier en tension) :  un document attestant du dépôt de l’offre d’emploi auprès d’un organisme du service public de l’emploi et de sa publication pendant 3 semaines (Pôle Emploi, Apec…) et un document mentionnant le nombre de candidatures reçues et attestant de l’absence de candidat répondant aux caractéristiques du poste de travail proposé ;
  •  si le salarié réside en France : une copie de son titre de séjour en cours de validité ;
  • pour le recrutement d’un salarié détaché : une copie de l’attestation de déclaration préalable de détachement si celle-ci est requise ;
  • etc.

Bon à savoir : vous pouvez retrouver la liste entière des documents et des informations à fournir sur le téléservice. De même, si vous souhaitez vérifier que le poste proposé est soumis à l’opposabilité de la situation de l’emploi, le téléservice propose un simulateur pour vous aiguiller.

Le préfet, chargé d’autoriser ou non le travail du ressortissant, notifie ensuite sa décision à l’employeur (ou son mandataire) ainsi qu’à l’étranger (10). Cette procédure pouvant être plus ou moins longue (environ 2 mois), il est ainsi recommandé de l’initier dès que possible. En outre, il est essentiel de noter que la demande seule ne permet pas de faire travailler le salarié. Il faut attendre la décision du préfet avant que le premier jour de travail puisse intervenir. 

Si le préfet accorde l’autorisation de travail, il la transmet à l’Office français de l’immigration et de l’intégration (11). S’il la refuse, il est possible d’intenter un recours hiérarchique auprès du ministre chargé de l’Immigration (12).

Une fois cela accompli, il est alors possible de réaliser les procédures habituelles d’embauche.

Bon à savoir : l’autorisation de travail est parfois limitée à certaines activités professionnelles ou certaines zones géographiques qu’il convient de respecter (13) !

Dans quelles situations la demande d’autorisation n’est pas nécessaire pour faire travailler le salarié en France ? Carte de séjour, visa… 

Si la demande d’autorisation de travail est généralement obligatoire, il est des cas prévus par la loi où celle-ci n’est pas nécessaire, car le contrat ou le titre de séjour concerné comporte, en lui-même, cette autorisation de travailler sur le territoire national.

C’est le cas si l’étranger entre en France pour une activité salariée de moins de 3 mois (14) dans des domaines spécifiques définis par la loi. À titre d’exemple, sont concernés (15) : 

  • les manifestations sportives, culturelles, artistiques et scientifiques ;
  • le mannequinat ;
  • les colloques, séminaires et salons professionnels ;
  • la production et la diffusion cinématographiques, audiovisuelles, du spectacle et de l’édition phonographique ;
  • etc.

De la même manière, la demande d’autorisation de travail n’a pas à être effectuée lorsque l’étranger détient certains titres de séjour listés par la loi (carte de séjour, visa, carte de résident) (16) : 

  • la carte de séjour temporaire portant la mention “vie privée et familiale” ;
  • la carte de séjour pluriannuelle portant la mention “passeport talent (famille)” ;
  • la carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention “étudiant” ou “étudiant-programme de mobilité” ;
  • etc.

L’employeur doit-il réaliser des formalités auprès de Pôle Emploi ? Que désignent les métiers en tension ?

En principe, l’employeur doit publier l’offre d’emploi pendant 3 semaines auprès des organismes concourant au service public de l’emploi (Pôle Emploi), et n’avoir reçu aucune candidature le satisfaisant, avant de pouvoir recruter un salarié étranger hors UE. L’accomplissement de cette démarche doit d’ailleurs être prouvé – comme vu précédemment – lors de la demande d’autorisation de travail (17).

Néanmoins, pour certains postes, la publication préalable de l’offre d’emploi n’est pas nécessaire. Cette dérogation concerne les métiers en tension, à savoir les difficultés à recruter pour certains métiers, dans des zones géographiques données. Autrement dit, il s’agit de métiers où il est difficile de trouver des candidats.

La liste de ces métiers est fixée par décret (18), mais un simulateur sur le téléservice précité permet, en quelques clics, de savoir si le poste concerné est considéré comme métier en tension ou non.

Exemples :

  • Auvergne-Rhône-Alpes : agents d’entretien de locaux, charpentiers, conducteurs routiers, géomètres, maîtres d’hôtel… ;
  • Centre-Val de Loire : agriculteurs salariés, bouchers, cadres techniques de la maintenance et de l’environnement, aides à domicile et aides ménagères, techniciens en mécanique et travail des métaux… ;
  • Nouvelle-Aquitaine : agriculteurs salariés, carrossiers automobiles, chefs de chantier, couvreurs, maçons, spécialistes de l’appareillage médical… ;
  • etc.

Quelle est la taxe dont l’employeur doit s’acquitter lors de l’emploi d’un travailleur étranger hors UE ?

En sus des formalités liées à l’embauche d’un travailleur étranger hors UE et EEE, l’employeur doit s’acquitter d’une taxe pour embauche d’un travailleur étranger ou accueillant un salarié détaché par une entreprise non établie en France (19).

Cette taxe est éligible une seule fois, à la fin du mois au cours duquel intervient le premier jour d’activité professionnelle en France du travailleur étranger (ou du salarié détaché). Si elle était autrefois recouvrée par l’Office Français de l’Immigration et de l’Intégration (Ofii), elle est désormais gérée et recouvrée par la Direction générale des Finances publiques (DGFiP) depuis le 1er janvier 2023.

Son montant varie selon la durée du contrat concerné : 

Type et durée du contratMontant de la taxe
Embauche pour 12 mois minimum55 % du salaire brut mensuel versé au salarié (dans la limite de 2,5 fois le SMIC).
Embauche temporaire comprise entre plus de 3 mois et moins de 12 mois (20)74 euros, si le salaire versé est inférieur ou égal au SMIC ;

210 euros, si le salaire versé est inférieur ou égal à 1,5 SMIC ;

300 euros, si le salaire versé est supérieur à 1,5 SMIC.
Emploi à caractère saisonnierMontant modulé selon la durée du contrat, à raison de 50 euros par mois d’activité salariée, complet ou incomplet.
Emploi d’un jeune professionnel recruté dans le cadre d’un accord bilatéral d’échanges de jeunes professionnels (20)72 euros.

A propos de l’auteur

Yoan El Hadjjam

“Juriste rédacteur chez Juritravail depuis 2021, mon souhait est de simplifier au mieux le droit social pour le rendre accessible à toutes et tous.

Diplômé d’un Master en Droit du travail et de la Protection sociale, j’ai une affinité particulière pour les évolutions du droit social au gré des nouvelles technologies !”

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Références

(1) Article 45 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne
(2) Article R5221-1 du Code du travail
(3) Articles L5221-2 et R5221-1 du Code du travail
(4) Articles L8251-1 et L8251-2 du Code du travail
(5) Articles R5221-41 et R5221-42 du Code du travail
(6) Article R5221-43 du Code du travail
(7) Articles L5221-2 et L5221-5 du Code du travail
(8) Article R5221-1 du Code du travail
(9) Article R5221-12 du Code du travail et Arrêté du 1er avril 2021 fixant la liste des pièces à fournir à l’appui d’une demande d’autorisation de travail
(10) Article R55221-17 du Code du travail
(11) Article R5221-18 du Code du travail
(12) Article R5221-19 du Code du travail
(13) Article L5221-7 du Code du travail
(14) Article 5221-2-1 du Code du travail
(15) Article D5221-2-1 du Code du travail
(16) Article R5221-2 du Code du travail
(17) Article R5221-20 du Code du travail
(18) Arrêté du 1er avril 2021 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l’emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d’un État membre de l’Union européenne, d’un autre État partie à l’Espace économique européen ou de la Confédération suisse
(19) Article L436-10 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile
(20) Article D436-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile

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