Comment réindustrialiser un pays sans pouvoir s’appuyer sur les compétences industrielles adéquates ?
Alors que les plans sociaux se multiplient aux quatre coins de l’Hexagone, plus de 66 000 postes étaient, en fin d’année dernière, à pourvoir dans l’industrie française.
Tiré des statistiques du ministère du Travail (Dares), ce chiffre montre un triplement, depuis 2015, du nombre d’emplois vacants dans le secteur.
Une pénurie chronique de main-d’œuvre qui affecte toutes les filières industrielles, qu’elles soient traditionnelles ou d’avenir.
Les Français aiment l’industrie, mais ne s’y projettent pas
Paradoxal à l’heure où le chômage augmente, cet apparent désamour des Français pour l’emploi industriel plonge ses racines dans un ensemble, complexe, de facteurs – au premier rang desquels l’image que se font de ces métiers les candidats potentiels.
Pour le dire simplement, les Français ont plutôt une bonne perception de l’industrie, mais ils n’ont pas vraiment envie d’y travailler.
C’est ce qui ressort d’une enquête menée en 2024 par l’Usine nouvelle, selon laquelle près de six personnes interrogées sur dix (59 %) déclarent avoir une image « bonne » ou « très bonne » de l’industrie française.
Les choses se gâtent, en revanche, quand il s’agit de se projeter dans un emploi industriel. Selon la même étude, plus de la moitié (56 %) des Français excluent en effet de faire carrière dans l’industrie, et seuls 16 % d’entre eux envisageraient une telle perspective.
L’industrie souffre donc d’un criant manque d’attractivité. Une mauvaise image causée notamment par la mémoire des vagues de désindustrialisation, qui demeure encore vive dans certains territoires ; mais aussi par la réputation de pénibilité, voire de risque, associée à certains métiers ; ou encore par le fait que l’industrie reste associée à des représentations passéistes, synonymes d’organisation verticale et nécessairement masculine.
L’inquiétant déficit de compétences industrielles
Sans surprise, cette désaffection des Français pour les métiers de l’industrie se répercute sur le plan des compétences. Déjà plus faible qu’au sein d’autres pays développés, le niveau en sciences et en mathématiques des jeunes Français est ainsi en constant recul. De même, trop peu d’étudiants (12 %) s’orientent vers des cursus techniques ou en ingénierie.
Résultat : chaque année en France et faute de compétences, ce sont environ 6 000 soudeurs et chaudronniers qui manquent à l’appel, que ce soit dans les secteurs du nucléaire ou de la construction navale, ou encore dans l’industrie de l’armement – une pénurie embarrassante, alors que l’Europe aspire de toute urgence se réarmer face à la Russie.
Cheville ouvrière de la réindustrialisation, la formation a pourtant été délaissée par les pouvoirs publics. C’est pourquoi de plus en plus d’entreprises, refusant d’attendre un hypothétique sursaut politique, sautent le pas en créant leurs propres écoles d’entreprise, afin d’y développer les compétences requises par leur filière et de diffuser leur culture interne.
Il existe ainsi plus de 4 000 universités d’entreprise dans le monde, et une centaine en France, dont certaines sont devenues de véritables références dans leur domaine de prédilection.
À l’image, par exemple, du campus de General Electric à Crotonville, de la Airbus Academy, de la Alstom University, du Orange Campus ou encore de la ReKnow University, du constructeur automobile Renault.
Urgo lance son école de textile médical ; EDF, Orano, Naval Group et CMN ses soudeurs
Lancée en 2021 à Veauche (Loire), l’École Urgo Textile entend elle aussi répondre à des besoins non pourvus au sein du groupe éponyme.
La structure propose une formation certifiante en alternance : pendant plusieurs mois, une dizaine d’alternants apprennent, sous le regard d’un tuteur, le tricotage, le tissage et l’ourdissage des bandes de compression.
La quatrième promotion a fait sa rentrée en février 2025. Parallèlement, le groupe français a ouvert, en 2023, Industries Lab, proposant sur son site de Chevigny (Côte-d’Or) des formations de conducteurs de machines. Une manière, pour le groupe français, de développer des compétences aussi rares que nécessaires à son développement.
Du côté des soudeurs, les entreprises concernées prennent elles aussi les choses en main. À Cherbourg (Manche) a ainsi vu le jour, en 2022, une école d’un nouveau genre.
Baptisée Héfaïs, la structure, co-créée par EDF, Orano, Naval Group et CMN, se fixe pour objectif de former les « champions du soudage » de demain. Une trentaine d’élèves, demandeurs d’emploi ou en reconversion, composent les troupes de cette école dotée d’un budget de 9 millions d’euros.
Enfin, les écoles d’entreprise ne sont pas l’apanage de la seule industrie : en témoigne la création, en 2021, de l’École Amazon, qui a formé depuis son lancement plus de 1 300 salariés en logistique.
FAQ Marque employeur : Toutes les réponses à vos questions
Avantages différenciants, indicateurs à surveiller, réseaux sociaux... Notre partenaire Klaro vous apporte des réponses claires et des conseils concrets aux questions que vous vous posez. A la clé ? Une marque employeur qui attire et fidélise durablement, en valorisant vos actions et en renforçant votre image.
Je découvre