Une fiabilisation à marche forcée ?
La Déclaration Sociale Nominative (DSN), initialement conçue pour simplifier des flux déclaratifs complexes, franchit une étape décisive. À compter de 2026, l’URSSAF et les autres organismes sociaux pourront intervenir directement sur les DSN des employeurs, allant jusqu’à substituer les déclarations des entreprises par leurs propres versions corrigées. Si cette évolution vise à réduire drastiquement les erreurs et à fiabiliser les données sociales, elle soulève de nouvelles questions et impose aux entreprises une préparation rigoureuse face à cette prise de contrôle inédite.
La DSN : Genèse d’une déclaration en constante évolution
La DSN est un fichier mensuel qui transmet en une fois les données de la paie et les données issues de l’administration de la paie aux différents organismes sociaux nécessaires à la gestion de la protection sociale des salariés. La DSN est complétée par des signalements événementiels dans le cours du mois.
La DSN a été créée en 2012 dans l’objectif de simplifier la communication par les employeurs des informations nécessaires à la gestion de la protection sociale de leurs salariés. Ce processus déclaratif s’est substitué progressivement à un nombre croissant de formalités antérieures. Son périmètre a été progressivement étendu en 2017 à la totalité des entreprises du secteur privé puis en 2022 à l’ensemble du secteur public.
L’objectif était de centraliser la gestion des obligations sociales des entreprises en proposant un outil unique : la DSN.
La centralisation des déclarations a permis d’avancer significativement dans la fiabilisation des données et donc de réduire les erreurs et les possibles contentieux.
En 2022, la norme NEOReS a commencé à être déployée. C’est une norme d’échanges standardisés permettant aux OPS de faire des retours synthétiques et des propositions de corrections aux gestionnaires de paie et aux éditeurs. Cette norme traduit au travers de compte rendu métier (CRM) comme les CRM 119 et 120 pour l’URSSAF, le CRM 121 pour la MSA ou encore le récent CRM identité ont petit à petit été intégrés dans les solutions des éditeurs.
Cela a contribué à améliorer les échanges entre OPS, éditeurs SIRH et les gestionnaires de paies pour réduire les erreurs déclaratives.
Cela reste cependant un objectif de premier ordre pour les organismes de protection sociales (OPS) à ce jour. En effet le légitime besoin d’avoir des données de qualité pour les OPS tout en étant confronté à des situations correctives très diverses et parfois très complexes doublée d’un temps limité des gestionnaires de paie pour tout analyser, freinent encore l’atteinte d’une fiabilisation optimale.
Le tournant législatif : Des pouvoirs accrus pour les organismes
Pour atteindre une fiabilité accrue des données DSN, les législateurs sont intervenus.
Le principe d’une intervention directe des organismes dans la DSN des entreprises apparaît avec le projet de loi de finance de 2020 qui prévoyait que les déclarants soient informés des résultats des vérifications d’exhaustivité, de conformité et de cohérence réalisées par les organismes auxquels sont destinées les données déclarées. En cas de constat d’anomalie résultant de ces vérifications, les déclarants sont tenus d’effectuer les corrections requises.
Il est précisé ensuite qu’en cas de carence, les organismes auxquels la déclaration a été adressée peuvent procéder d’eux‑mêmes à cette correction.
Le Projet de Loi de financement de la Sécurité Sociale de 2022 puis le décret du 29 décembre confirme définitivement cette volonté de permettre aux OPS de corriger elles-mêmes les DSN des employeurs en cas d’anomalie.
L’objectif clair : Fiabiliser à tout prix les données sociales
Le principe de la DSN de substitution est de répondre à la carence en termes de corrections des anomalies. La DSN est dorénavant la principale source de données pour la déclaration, d’une part, des cotisations dues par les entreprises du privé et du public, et d’autre part, des droits sociaux des salariés comme la retraite, le RSA, les IJSS.
Il est donc primordial d’avoir des données complètement fiables pour obtenir un recouvrement des cotisations optimales tout en appliquant les droits des salariés sans régularisations ultérieures à réaliser.
Par conséquent, la DSN de substitution pose comme principe qu’en cas d’absence de correction des anomalies déclaratives par le déclarant, une fois avertis et selon une certaine échéance, les organismes pourront procéder aux corrections eux-mêmes et générer une DSN qui va s’imposer au déclarant. Une correction risque d’être entendue comme un remboursement ou un recouvrement de cotisations assorties d’éventuelles pénalités.
C’est un processus inédit au niveau des moyens, en effet le contrôle URSSAF des années 2000 disparaît au profit d’un contrôle automatisé de la DSN et de moyens de recouvrement totalement dématérialisés.
Le calendrier et le rôle clé du CRM 124
Pour les employeurs et les éditeurs de logiciels, la question du ‘quand’ et du ‘comment’ est essentielle. Voici le déroulé précis de l’entrée en vigueur de la DSN de substitution et le rôle central du nouveau CRM 124.
A compter de mars 2026, les déclarants recevront un CRM annuel de rappel qui sera émis de façon exceptionnelle.
Ce CRM fera la synthèse de toutes les anomalies détectées tout au long de l’année N-1 qui n’auraient pas été corrigé par le déclarant et qui sont susceptibles de faire l’objet d’une substitution.
Ces anomalies auront été auparavant transmis au déclarant par l’émission des CRM que transmettent l’URSSAF et la MSA tous les mois après les dépôts des DSN mensuelles sur l’année N-1.
Le bilan des anomalies susceptibles de faire l’objet d’une substitution sera accompagné des valeurs de corrections identifiées par l’URSSAF ou la MSA, ce qui permettra au déclarant d’anticiper les corrections envisagées par l’URSSAF/MSA en cas de substitution.
Ce compte rendu métier doit être compris comme un dernier avertissement avant l’émission d’une DSN de substitution et ses conséquences financières (remboursements, pénalités etc.…)
A la réception de ce CRM, les déclarants auront deux mois pour effectuer la correction attendue ou pour prendre contact avec l’Urssaf afin de comprendre et/ou éventuellement contester l’anomalie.
Votre droit de réponse : La procédure de contestation
A compter de la notification du CRM de rappel, le déclarant disposera de 2 options :
- Soit le déclarant corrige les anomalies constatées au plus tard à la seconde échéance déclarative suivant la notification du CRM de rappel.
- Soit le déclarant estime que tout ou partie des anomalies ne le sont pas. Il peut alors contester et motiver son opposition.
Le déclarant doit formaliser sa contestation au plus tard avant la seconde échéance déclarative après réception du CRM de rappel annuel (environ 2 mois).
La contestation doit être faite directement sur le site URSSAF dans SUIVI DSN, l’outil d’accompagnement des DSN du régime URSSAF. Le déclarant pourra sélectionner les anomalies concernées et formuler ses motifs d’opposition directement.

L’Urssaf prendra ensuite connaissance de l’opposition du déclarant et instruira celle-ci. Elle prépare le courrier de réponse au déclarant afin de l’informer des suites réservées à sa demande.
Que se passe-t-il si la contestation est acceptée ?
L’URSSAF reconnaît que l’anomalie signalée n’était pas une erreur, ou que la correction proposée n’était pas pertinente. Par conséquent, l’organisme ne procédera pas à l’émission d’une DSN de substitution pour l’anomalie concernée. La DSN originale de l’employeur est considérée comme correcte sur ce point.
Par ailleurs, L’URSSAF (ou la MSA) informera l’employeur de l’acceptation de sa contestation. Cette notification devrait idéalement être formalisée (par exemple, via un message sur le tableau de bord DSN ou une communication spécifique), attestant que l’anomalie est levée.
Que se passe-t-il si la contestation est refusée ?
Le déclarant prend connaissance via son espace en ligne Urssaf.fr de la lettre de réponse de l’Urssaf qui lui indiquera que son opposition à la proposition de correction concernant l’anomalie n’a pas été considérée comme motivée. Par conséquent, une correction automatique sera effectuée par l’Urssaf dans le cadre du processus de substitution au titre de cette anomalie.
Quand l’URSSAF prend la main : Le processus de substitution
Le processus de substitution se déclenche dès lors que les corrections sont ignorées ou les contestations invalidées par l’organisme, à l’issu de la seconde échéance déclarative suivant la notification du CRM de rappel.
Postérieurement à l’émission de la DSN de substitution, le déclarant est informé des corrections réalisées par l’Urssaf.
Cette information sera transmise par 3 supports différents :
- Un CRM post-substitution recensant uniquement les données ayant été substituées.
- Sur Suivi DSN : le déclarant peut visualiser les anomalies qui ont été corrigées dans le cadre de la substitution.
- Une notification sur l’espace Urssaf.fr qui indiquera au déclarant que des corrections ont été apportées aux données de la DSN et qu’en cas d’impact de la substitution sur le recouvrement, il pourra contester les effets de la substitution devant la Commission de Recours Amiable (CRA) à compter de la réception de la mise en demeure dans le délai de recours légal (2 mois).
En termes de calendrier voici les 3 prochaines dates à retenir :
- Après la date d’exigibilité de la DSN de février le 5 mars 2026
- Transmission du CRM de rappel annuel le 12/03/2026.
- La seconde échéance déclarative suivant la notification du CRM est celle de mai, relative aux DSN d’avril, donc le 06/05/2026.
Conclusion : le déclarant peut faire part de son opposition au plus tard le 06/05/2026.
Après la substitution : Les recours possibles
Il existe deux possibilités à la suite de l’émission d’une DSN de substitution :
- Une notification de l’Urssaf en l’absence de débit à la charge de l’employeur généré par la DSN de substitution.
- Une mise en demeure envoyée en cas de débit à la charge de l’employeur généré par la substitution
A compter de la notification Urssaf ou de la mise en demeure selon l’impact de la substitution sur le recouvrement, l’employeur dispose d’un délai de 2 mois pour contester la décision de l’Urssaf devant la Commission de Recours Amiable (CRA).
Si le déclarant décide de saisir la Commission de Recours Amiable (CRA),
- En cas de rejet de la demande : la CRA juge que la substitution a été faite à juste titre par conséquent la DSN de substitution est maintenue en l’état et le possible recouvrement résultant de celle-ci n’est pas remis en cause.
- En cas d’acceptation de la contestation : la CRA décide que la substitution a été faite à tort et annule celle-ci (partiellement ou en totalité). Une fois la décision de la CRA définitive, l’Urssaf devra gérer une annulation totale ou partielle de la substitution et en tirer les impacts sur le recouvrement.
La solution pour éviter cette procédure ? Anticiper !
Quelques conseils pour éviter de traiter des anomalies dans l’urgence et réaliser de substantielles économies en termes de remboursement et de pénalités :
Ne sous-estimez pas les erreurs non bloquantes, celles-ci appellent des corrections qui peuvent être réalisées ultérieurement. Mais ne tardez pas, une régularisation peut être complexe et chronophage, plus le temps passe plus le temps investi pour corriger la situation sera longue.
De nombreux SIRH dont le nôtre évidemment sont équipés de modules de contrôle qualité des données, permettant d’identifier les erreurs en amont, avant même la soumission de la DSN, vous pourrez ainsi anticiper toutes les anomalies avant même de déposer votre DSN et éviter de nombreuses corrections à posteriori.
Enfin concernant la gestion d’exceptions ou sur la gestion des populations complexes restez attentifs aux erreurs plus complexes qui nécessitent une intervention humaine.
Avec Nibelis, une conformité déclarative anticipée et sécurisée
Au-delà de la gestion courante des déclarations sociales, Nibelis s’engage à anticiper les évolutions réglementaires et à garantir une parfaite conformité. C’est tout l’enjeu du travail mené par notre département Produit DSN, qui participe activement aux échanges avec les instances nationales telles que le GIP-MDS et l’Association SDDS.
Cette implication directe nous permet d’intégrer les nouveautés DSN en amont, de conduire des phases de tests avec nos clients pilotes, et d’assurer une mise en œuvre fluide dès leur entrée en vigueur.
Notre solution bénéficie ainsi des dernières avancées du domaine, comme l’intégration du CRM Identité, qui facilite la gestion des données déclaratives et fiabilise le traitement des signalements.
En pratique, l’environnement Nibelis centralise et sécurise l’ensemble des processus déclaratifs :
- Accès immédiat à toutes les télétransmissions (DSN mensuelle, DSN événementielle, DPAE, FCTU, etc.)
- Génération, pré-contrôle, contrôle et envoi unitaire ou en masse
- Gestion des saisies hors paie (DOETH, CSA, BTP, MSA, honoraires…)
Un pilotage simple et rigoureux, pensé pour vous offrir une déclaration sociale toujours juste, toujours à l’heure.
Présentation de l’auteur

François Philippon
Diplômé en droit social et d’un master en audit juridique et social, François Philippon bénéficie de 20 ans d’expérience dans le domaine de la paie et des charges sociales. Aujourd’hui Product Manager et responsable du département déclaratif, il se consacre à l’amélioration continue des données déclaratives et des besoins des entreprises, contribuant ainsi à l’innovation des solutions RH.
A propos de Nibelis

Nibelis est une solution SIRH complète 100% SaaS qui optimise la gestion des ressources humaines. Elle simplifie et centralise les processus administratifs, sécurise la paie et favorise le développement des compétences. Son approche automatisée et conforme aux évolutions réglementaires permet aux entreprises de gagner en efficacité et d’améliorer la gestion RH.
Chiffres clés
Avec plus de 24 ans d’expertise dans la gestion des RH et de la paie, Nibelis atteint désormais 55 M€ de chiffre d’affaires au travers d’une croissance annuelle de 20%. Ses 550 collaborateurs, répartis dans 8 agences en France, accompagnent plus de 2200 sociétés, pouvant aller de 50 à 5 000 salariés issus de tout secteur d’activité.