Travail en hauteur : que prévoit la réglementation ?

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La gestion de vos salariés soulève des questions pour lesquelles vous n’avez pas toujours la réponse ?

Malgré les informations réglementaires à votre disposition, vous manquez de temps ou vous avez des doutes sur l’application des textes ?

Découvrez un exemple concret de question RH issu du service « Accompagnement juridique RH » des Éditions Tissot.

Profil de l’entreprise

Effectif de l’entreprise : moins de 50 salariés

Convention collective concernée par la demande : Convention collective unique de la métallurgie du 7 février 2022 – IDCC 3248

Question RH

Bonjour,

Nous souhaitons connaître la réglementation sur le travail en hauteur : à partir de quand considère-t-on qu’il s’agit de travail en hauteur ? Un salarié qui utilise un escabeau est-il considéré comme travaillant en hauteur ? Comment rédiger notre règlement intérieur sur ce type de situation ?

Merci par avance pour votre réponse.

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Réponse apportée par l’équipe « Accompagnement juridique RH » des Éditions Tissot

Bonjour Monsieur,

Voici les informations que nous pouvons vous communiquer concernant la réglementation sur le travail en hauteur.

Les chutes de hauteur constituent la seconde cause d’accidents du travail mortels et la troisième cause d’incapacité permanente et d’arrêts de travail. Il y a risque de chute de hauteur dès lors qu’il n’existe pas d’obstacle suffisamment efficace en bordure du vide.

La réglementation considère que toute chute de hauteur peut être dangereuse, peu importe la hauteur. Toute élévation au-dessus du niveau du sol constitue un travail en hauteur.

Comme tout autre risque, le risque de chute de hauteur doit être retranscrit dans le document unique avec les mesures de prévention nécessaires pour assurer la sécurité des travailleurs. Le règlement intérieur peut rappeler l’obligation de respecter les mesures de prévention et les sanctions   encourues pour manquement à cette obligation, mais ce n’est pas dans ce document que ce risque doit être évalué et faire l’objet d’un dispositif de prévention.

La chute de hauteur se caractérise par l’existence d’une dénivellation, par opposition à la chute de plain-pied. Il s’agit des chutes subies par les personnes situées en élévation, par exemple : toitures, élévateurs, escabeaux, marchepieds, etc., ou situées en bordure d’une ouverture dans le sol, par exemple : tranchées, fosses, etc.

Attention : Les situations concernées par ce risque sont très nombreuses et ne se limitent pas aux activités manuelles ; des salariés travaillant dans des bureaux peuvent être exposés à ces risques.

L’évaluation du risque de chute de hauteur nécessite d’identifier toutes les situations de travail exposant les salariés à ce risque.

Une analyse des postes de travail doit être faite pour identifier ceux concernés par le risque de chute de hauteur.

Voici les principes à respecter pour travailler en hauteur en sécurité

La protection collective : la prévention des chutes de hauteur est assurée par la mise en place de garde-corps pour toutes les plateformes de travail, quelle que soit leur hauteur (C. trav., art. R. 4323-59).

Les garde-corps doivent :

— être intégrés ou fixés de manière sûre ;

— être rigides et résistants ;

— avoir une hauteur comprise entre 1 m et 1,10 m ;

— comporter une main courante, une lisse intermédiaire, une plinthe de butée de 10 à 15 cm.

Quand il n’est pas possible de poser des garde-corps, les surfaces de travail doivent être équipées de surfaces de recueil souples (filets de sécurité) et conformes à la norme NF-EN 1263-1 (C. trav., art. R. 4323-60).

L’employeur ayant mis en place un dispositif de harnais de sécurité n’a pas l’obligation de mettre en place des garde-corps malgré l’injonction de l’inspection du travail (Cass. 2e civ., 3 avril 2003, n° 01-21.364). Voir également l’arrêt commenté ci-après.

Les dispositifs de protection collective doivent être conçus et installés de manière à éviter leur interruption aux points d’accès. Lorsque l’interruption est nécessaire, elle implique la mise en œuvre d’une sécurité équivalente.

Le recours aux équipements de travail individuels ne peut être envisagé qu’en cas d’impossibilité technique de mise en œuvre des protections collectives (C. trav., art. R. 4323-61). Les systèmes de protection individuelle doivent permettre d’arrêter les chutes.

Exemple : une entreprise a fait construire un immeuble comprenant un toit terrasse. L’inspection du travail avait demandé au maître d’ouvrage de mettre en place des garde-corps tout autour du toit afin d’assurer la sécurité des travailleurs amenés à effectuer des travaux sur le toit terrasse. L’entreprise avait refusé cette mise en place ayant pour conséquence une modification du permis de construire, estimant avoir mis en place des protections effectives avec un système de filets amovibles fixés sur un dispositif d’ancrage permanent. Les juges de la cour d’appel avaient débouté l’inspection du travail de sa demande. La Cour de cassation a également considéré que les acteurs de la construction ont le choix du système à mettre en œuvre pour la prévention des chutes à l’occasion de travaux temporaires en hauteur, à partir du moment où les moyens utilisés assurent une sécurité équivalente aux garde-corps (Cass. soc., 14 septembre 2016, n° 14-20.141).

Le salarié doit lui aussi prendre soin de sa sécurité. Le fait pour un salarié, couvreur, de détacher son harnais de la ligne de vie constitue un non-respect d’une règle de sécurité et un danger pour lui-même. Son licenciement pour faute grave est donc justifié, quand bien même il n’aurait pas fait l’objet de reproches durant ses 15 ans d’ancienneté (Cass. soc., 31 janvier 2012, n° 10-21.472).

Lorsque des équipements de protection individuelle sont mis en place, la réglementation interdit la présence isolée du travailleur afin que ce dernier puisse, le cas échéant, être secouru dans un délai compatible avec la préservation de sa santé. L’employeur doit donc mettre en place une organisation de travail appropriée.

L’employeur doit en outre préciser, dans une notice, les points d’ancrage, les dispositifs d’amarrage et les modalités d’utilisation de l’équipement individuel. Les salariés doivent être informés et formés sur le contenu de la notice, notamment les points à vérifier avant l’utilisation des équipements.

L’accès aux postes de travail en hauteur

Les accès aux postes de travail en hauteur et aux planchers d’échafaudages doivent être :

–           sûrs ;

–           appropriés ;

–           en nombre suffisant ;

–           adaptés sur le plan ergonomique ;

–           accessibles aux premiers secours et permettant l’évacuation.

Par exemple : échelles inclinées, trappes rabattables, tours d’accès, escaliers.

Des échafaudages conformes

Pour être conforme aux exigences réglementaires (C. trav., art. R. 4323-72 et R. 4323-73), un échafaudage doit réunir les conditions suivantes :

— être stable : tout échafaudage doit être construit et installé de manière à empêcher, en cours d’utilisation, le déplacement d’une quelconque de ses parties communes ;

— être solide : les éléments constitutifs de l’échafaudage doivent être constitués de matériaux d’une solidité et d’une résistance appropriées ;

— être construit avec des éléments compatibles : les assemblages doivent être réalisés de manière sûre, à l’aide d’éléments compatibles d’une même origine, et dans les conditions dans lesquelles ils ont été testés ;

— être monté et démonté par des salariés formés (C. trav., art. R. 4141-13 et R. 4323-69). La formation porte notamment sur :

·         la compréhension du plan de montage, de démontage ou de transformation de l’échafaudage,

·         la sécurité lors du montage, du démontage ou de la transformation de l’échafaudage,

·         les mesures de prévention des risques de chute de personnes ou d’objets,

·         les mesures de sécurité en cas de changement des conditions météorologiques qui pourraient être préjudiciables aux personnes en affectant la sécurité de l’échafaudage,

·         les conditions en matière d’efforts de structures admissibles,

·         tout autre risque que les opérations de montage, de démontage ou de transformation de l’échafaudage peuvent comporter ;

—     porter sur chaque plancher la mention de la charge admissible ;

—     être accompagné sur le chantier par sa notice de montage.

L’employeur doit veiller à la conformité des échafaudages ; lorsqu’ils sont défectueux, il doit les remiser (Cass. crim., 26 avril 2000, n° 99-83.659).

La formation doit être renouvelée et complétée aussi souvent que nécessaire pour prendre en compte l’évolution des équipements (C. trav., art. R. 4323-3). Le montage, le démontage et la modification des échafaudages doivent être réalisés selon la notice ou plan de montage du fabricant et avec les protections nécessaires (C. trav., art. R. 4323-70 et R. 4323-71).

L’employeur qui aurait dû avoir conscience du danger auquel le salarié était exposé et qui n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en protéger commet une faute inexcusable quand le salarié est victime d’un accident au cours de l’opération de montage d’un échafaudage (Cass. 2e civ., 25 juin 2009, n° 08-12.586).

L’utilisation dérogatoire d’équipements de travail spécifiques

Travail à l’échelle

La réglementation (C. trav., art. R. 4323-63) précise que l’échelle peut être utilisée comme poste de travail :

–    en cas d’impossibilité technique de recourir à un équipement assurant la protection collective des travailleurs ;

–    ou lorsque l’évaluation du risque de chute a établi que ce risque est faible et qu’il s’agit de travaux de courte durée ne présentant pas de caractère répétitif.

Pour justifier un travail sur échelle, escabeaux, marchepieds, il faudra pouvoir prouver :

–    l’impossibilité technique d’utiliser un échafaudage de pied, un échafaudage roulant, une PIR (plateforme individuelle roulante), une PIRL (plateforme individuelle roulante légère), etc. ;

–    ou accomplir un travail non répétitif avec un risque de chute faible.

Dans les deux cas, il faudra prouver que le travail a fait l’objet d’une évaluation préalable des risques avant de décider qu’il sera effectué à l’échelle.

L’organisation de formations à l’usage des échelles n’est pas obligatoire, néanmoins elle est vivement recommandée et son absence engage la responsabilité du chef d’entreprise (Cass. crim., 27 octobre 2009, n° 09-80.490).

La faute inexcusable de l’employeur ne peut pas être reconnue lorsqu’un salarié monte « à l’envers » sur une échelle et se blesse alors que rien ne justifiait une telle manoeuvre (Cass. soc., 16 décembre 2011, n° 10-20.525).

Pour compléter cette réponse, nous vous joignons un extrait de notre documentation destiné aux CSE* (le CSE est un partenaire important dans la prévention des risques de l’entreprise) concernant l’analyse de ce risque professionnel.

​​Souhaitant avoir répondu à votre question et restant à votre disposition pour toute précision que vous souhaiteriez nous voir vous apporter.

Bonne journée,
​Très cordialement,

L’équipe accompagnement juridique RH des Éditions Tissot.

*CSE : Agir en instance unique

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A propos des Editions Tissot

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